Le second tour des élections présidentielles brésiliennes a eu lieu ce dimanche 30 octobre. L’ancien président, Lula da Silva, qui a purgé une peine de prison pour corruption, a obtenu 50,9% des voix, et le président sortant, Jair Bolsonaro, 49,1%.
C’est ce qu’ont indiqué les juges du Tribunal supérieur électoral (TSE), la principale autorité électorale du Brésil.
Des élections régulières impliquent toujours un vote sur papier ou une trace écrite qui permet aux électeurs, même électroniques, de contrôler le décompte des voix ou de vérifier eux‑mêmes leurs bulletins de vote.
C’est pourquoi la plupart des pays développés utilisent encore principalement des bulletins de vote en papier et des urnes physiques faites de toile, de plastique et d’autres matériaux non électroniques, car cela facilite les choses.
Cependant, avec le système de vote électronique actuel au Brésil, il n’y a pas de garantie absolue que les votes des Brésiliens correspondent exactement à ce qui a été déposé dans les urnes, car il n’y a pas de registre papier conservé par le gouvernement pour chaque vote électronique.
En d’autres termes, les Brésiliens ne sont pas en mesure de confirmer si leurs votes ont été exprimés correctement car, le 10 août 2021, le Congrès brésilien n’a pas réussi à adopter un amendement constitutionnel qui aurait exigé l’impression de bulletins de vote physiques pouvant être vérifiés par l’électeur, fournissant ainsi une preuve physique au processus électronique.
Malheureusement, cette importante proposition a été rejetée en grande partie grâce au fort lobbying politique du juge électoral le plus haut placé de l’époque, Luís Roberto Barroso, qui est également juge à la Cour suprême.
Il a réussi à convaincre suffisamment de députés de rejeter ces propositions d’amendement raisonnables.
Le gouvernement perd sa légitimité en raison de l’implication du pouvoir judiciaire
Le Brésil dispose d’un tribunal supérieur électoral (TSE) où ses juges électoraux créent des règles, tranchent les litiges et supervisent jusqu’aux finances des campagnes électorales. Composé de sept membres, trois sont élus par vote secret parmi les juges de la Cour suprême, et deux autres sont élus par vote secret parmi les juges de la Cour supérieure de justice (STJ), la deuxième plus haute juridiction du Brésil. Les deux derniers sont nommés par le président de la République parmi six avocats désignés par les juges de la Cour suprême.
Curieusement, certains de ces hauts magistrats électoraux ont fait campagne ouvertement et férocement contre l’un des candidats, le président Jair Bolsonaro. Le 19 février, par exemple, le président du tribunal électoral de l’époque, Luis Roberto Barroso, a prononcé un discours à la faculté de droit de l’université du Texas sur le thème assez particulier de « l’abandon d’un président ».
Quelques mois plus tard, il était conférencier à l’université d’Oxford lorsqu’il a été interrompu par deux étudiants brésiliens d’Oxford alors qu’il parlait de la fiabilité supposée des machines à voter électroniques le 25 juin.
Comme des millions d’autres concitoyens, ces deux étudiants soupçonnaient que les machines à voter électroniques n’étaient peut‑être pas totalement fiables et souhaitaient simplement disposer d’une vérification sous la forme d’un registre physique pour chaque bulletin de vote électronique, une feuille de papier qui pourrait être imprimée afin que les citoyens puissent confirmer si leurs votes ont été émis correctement.
En outre, le 1er août 2021, des millions de personnes sont descendues dans les rues des principales villes du Brésil pour protester contre le manque apparent de transparence du système de vote électronique.
En raison notamment du fait que certains juges non élus jouent ostensiblement un rôle politique qui ne correspond pas à la fonction judiciaire, un sondage d’opinion réalisé par DataPoder360, publié le 15 juin 2020, a révélé que la grande majorité des Brésiliens considèrent les performances du système judiciaire comme passables, mauvaises ou horribles.
Ces juges ne sont perçus positivement que par 23% de la population.
Ce résultat témoigne d’une baisse de confiance dans les tribunaux et d’un cynisme accru quant à la réalisation de l’État de droit dans le pays. En effet, de nombreux Brésiliens pensent que le système judiciaire a été un facteur critique contribuant à un net déclin de l’État de droit.
Certes, ce n’est pas une nouveauté puisque, au début des années 2000, un sondage d’opinion réalisé par Garibaldi‑Fernandez dans le livre du professeur de droit américain William Prillaman, The Judiciary and Democratic Decay in Latin America [Le pouvoir judiciaire et la décadence démocratique en Amérique latine, ndt], a révélé que 74% des Brésiliens n’avaient aucune confiance dans les juges.
Par ailleurs, pas moins de 86% ont déclaré que certaines personnes, y compris des juges et des hommes politiques, ne sont jamais punies de manière adéquate lorsqu’elles enfreignent la loi. Enfin, près de 50% n’étaient pas d’accord avec l’opinion selon laquelle les juges punissent convenablement les coupables et laissent les innocents en liberté.
Le résultat démontre, selon le Pr Prillaman, « un manque de confiance presque total dans le système judiciaire et que le Brésil semble être au bord d’un grave déclin démocratique, l’échec du système judiciaire étant un facteur essentiel contribuant à la baisse de la confiance dans l’État de droit ».
Le président élu n’est autorisé à se présenter qu’en raison d’un vice de forme
La situation semblait avoir changé lorsqu’en 2017, l’ancien président brésilien Lula da Silva a été condamné à 12 ans et un mois de prison pour corruption généralisée et blanchiment d’argent.
Et pourtant, il n’a passé qu’un an et demi en prison. En 2021, la Cour suprême a annulé toutes ces condamnations pour des raisons entièrement techniques. Cette cour n’a pas dit un mot sur la culpabilité de Lula, qui a été démontrée dans trois décisions de justice, devant neuf juges, et dans une série de procédures pénales où il y a eu de nombreux témoins qui ont avoué, des accords de plaidoyer et même la restitution de l’argent volé.
Au lieu de cela, le tribunal a simplement déclaré que l’ancien président n’aurait pas dû être poursuivi dans la ville de Curitiba mais plutôt à Brasilia, rétablissant ainsi les droits politiques de Lula qui lui ont permis de se présenter à l’élection présidentielle de cette année.
Dans une interview du 10 janvier, le président Bolsonaro a accusé certains de ces juges non élus de « vouloir que Lula soit président ».
Par exemple, Alexandre de Moraes, un juge de la Cour suprême qui a assumé la présidence du tribunal des élections supervisant le processus de vote, a ordonné aux réseaux sociaux de supprimer des milliers de messages et a emprisonné arbitrairement des partisans du président sans procès pour des messages sur les médias sociaux qui, selon lui, « attaquaient les institutions du Brésil », à savoir son propre tribunal.
Dans de nombreux cas, selon un article du New York Times : « Moraes a agi unilatéralement, enhardi par les nouveaux pouvoirs que le tribunal s’est octroyé en 2019 et qui lui permettent, dans les faits, d’agir à la fois comme enquêteur, procureur et juge. »
L’article ajoute : « C’est un rôle sans précédent, qui transforme le tribunal dans certains cas en accusateur et en juge, explique Marco Aurélio Mello, un ancien juge de la Cour suprême. »
Bien entendu, il serait incroyablement imprudent pour les Brésiliens de reconduire un homme politique notoirement corrompu à la présidence. Il est très difficile de croire qu’ils seraient à ce point dépourvus de sens moral pour récompenser une personnalité véreuse d’extrême gauche telle que Lula da Silva. Il est désormais en mesure de terminer le travail qu’il a commencé en transformant le Brésil en un autre Cuba ou Venezuela.
Alors, y a‑t‑il eu une élection présidentielle équitable et transparente au Brésil ? Après tout, deux journalistes américains du New York Times, l’avaient anticipé en écrivant avant les élections : « L’influence croissante de la Cour pourrait avoir des implications majeures pour le vainqueur du vote présidentiel. »
Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.
Comment pouvez-vous nous aider à vous tenir informés ?
Epoch Times est un média libre et indépendant, ne recevant aucune aide publique et n’appartenant à aucun parti politique ou groupe financier. Depuis notre création, nous faisons face à des attaques déloyales pour faire taire nos informations portant notamment sur les questions de droits de l'homme en Chine. C'est pourquoi, nous comptons sur votre soutien pour défendre notre journalisme indépendant et pour continuer, grâce à vous, à faire connaître la vérité.