Plus de 5 % de la population mondiale est atteinte de rosacée, une affection cutanée courante qui ne répond pas aux traitements traditionnels ou qui est généralement gérée à l’aide de médicaments entraînant des effets secondaires désagréables. Un article révisé par des pairs et récemment publié dans la revue Pharmaceuticals montre que les substances botaniques dérivées de certaines plantes peuvent aider à traiter les causes sous-jacentes de l’affection afin de mieux gérer les symptômes à court et à long terme.
Les chercheurs ont examiné une liste exhaustive d’études sur la rosacée dans des bases de données scientifiques entre février et septembre 2023 et ont identifié de nombreux extraits botaniques actifs et phytocomposés isolés purs ayant des propriétés anti-inflammatoires, vasoprotectrices, antioxydantes et antimicrobiennes prometteuses dans la gestion de la rosacée.
Bien que les études cliniques existantes se concentrent sur les symptômes plutôt que sur la maladie elle-même, les auteurs ont déclaré que l’utilisation de composés végétaux naturels pour gérer la rosacée, seuls ou en combinaison avec des médicaments homologués, pourrait être plus efficace et apporter un soulagement à des millions de personnes.
Qu’est-ce que la rosacée ?
La rosacée est une affection cutanée inflammatoire chronique qui touche principalement le front, le nez, les joues et le menton. Les symptômes typiques incluent des bouffées de chaleur érythémateuses, des rougeurs souvent accompagnées de picotements et de démangeaisons désagréables. La peau apparaît rouge et gonflée, et de petits vaisseaux sanguins sont visibles immédiatement. Souvent, de petites papules se développent sur les joues et le nez, parfois avec du pus (pustules). Chez certaines personnes la peau qui entoure le nez s’épaissit parfois, ce qui la rend rouge et bulbeuse (rhinophyma). La rosacée est plus susceptible d’affecter les personnes à la peau claire. Elle peut apparaître plus tôt chez les femmes et est plus susceptible de se développer sur le nez chez les hommes.
La physiopathologie de la rosacée est inconnue, mais la recherche suggère que cette affection pourrait impliquer divers processus inflammatoires et à médiation immunitaire, des facteurs génétiques, des dysfonctionnements vasculaires, le stress oxydatif et l’inflammation neurogène. A ce jour, il n’existe pas à proprement dit de remède médical pour soigner la rosacée qui nécessite souvent un traitement sur le long terme. Ce qui pousse de nombreuses personnes à se tourner vers des composés naturels pour gérer la maladie.
Actuellement, le traitement de la rosacée comprend des agents topiques tels que l’acide azélaïque, le métronidazole ou le sulfacetamide-soufre de sodium, des antibiotiques oraux, la thérapie au laser et des médicaments tels que l’isotrétinoïne. Les médecins recommandent également de modifier le mode de vie et d’éviter les facteurs déclencheurs courants qui pourraient aggraver les symptômes.
Selon une enquête de la National Rosacea Society, les dix principaux facteurs déclenchants, d’après les réponses de 1.066 patients atteints de rosacée, sont l’exposition au soleil, le stress émotionnel, le temps chaud et le temps froid, le vent, l’exercice physique intense, la consommation d’alcool, les bains chauds, les aliments épicés et l’humidité. Les autres déclencheurs sont les produits cosmétiques et de soin, les médicaments, les fruits et les produits laitiers.
Composés végétaux susceptibles d’aider au traitement de la rosacée
Les parties médicinales des plantes, ou botaniques, sont utilisées dans le monde entier depuis des siècles pour les soins de la peau et constituent des alternatives aux traitements standards et aux médicaments sur ordonnance ayant des effets secondaires indésirables, ont indiqué des chercheurs. Elles peuvent également agir en synergie avec les médicaments pour en réduire les effets secondaires et en renforcer les bénéfices thérapeutiques.
Voici quelques exemples de composés naturels qui, selon les chercheurs, pourraient aider à gérer la rosacée. Bien que certaines plantes n’aient pas été étudiées directement pour la rosacée, les chercheurs ont noté qu’il avait été démontré qu’elles traitaient les symptômes communément associés à cette maladie.
Racine de réglisse
Selon l’article, diverses formes de réglisse en quantités élevées ont des propriétés anti-irritantes et anti-inflammatoires qui peuvent atténuer les symptômes de peau sensible, d’érythème, d’inflammation et de démangeaisons couramment observés dans la rosacée. Une autre forme anti-irritante de réglisse s’est avérée utile pour les rougeurs faciales légères à modérées.
Le chrysanthème d’Inde ou camomille de Chine
Le chrysanthème d’Inde pourrait jouer un rôle important dans la manière dont la rosacée se développe, progresse et se résorbe. Selon les chercheurs, les parties de cette plante contiennent une combinaison unique de saponines, d’acides phénylpropénoïques et de flavonoïdes qui augmentent la résistance mécanique des capillaires. Dans une étude, les patients qui ont appliqué une crème contenant du chrysanthème indien deux fois par jour ont montré une amélioration significative de la rougeur de la peau et de la sévérité de la rosacée.
Avoine colloïdale
Approuvé comme « protecteur sûr et fiable de la peau », l’avoine colloïdale est un agent apaisant utilisé pour soulager les démangeaisons, la sécheresse et l’irritation de la peau. L’avoine finement moulue contient des acides férulique, caféique et coumarique, des flavonoïdes, de la vitamine E et des polyphénols appelés avenanthramides qui lui confèrent des propriétés antioxydantes, absorbantes des ultraviolets, anti-démangeaisons et anti-inflammatoires.
Bois amer
Le bois amer est un petit arbre tropical qui contient des substances phytochimiques anti-inflammatoires. Dans une étude ouverte, 30 patients atteints de rosacée ont été traités avec un gel topique contenant 4% de bois amer pendant six semaines. Les résultats ont montré une amélioration significative des télangiectasies (petits vaisseaux sanguins élargis sur la peau). Il a également inhibé l’inflammation et la production d’oxyde nitrique, qui est connu pour augmenter la vasodilatation.
La grande camomille
La grande camomille est une plante médicinale bien connue qui possède des propriétés anti-inflammatoires, antioxydantes et anti-irritantes. Selon les auteurs, la grande camomille joue un rôle important dans l’inflammation, l’immunité, la prolifération, la différenciation et la survie des cellules.
On a constaté que cette plante réduisait l’irritation due au rasage, protégeait contre l’exposition aux UV et améliorait les taches faciales, les rougeurs et la rugosité de la peau.
L’absinthe
Plus d’un million de patients ont utilisé l’absinthe pour sa sécurité et son efficacité thérapeutiques. Selon l’article, les bienfaits de l’absinthe peuvent être attribués à ses fortes propriétés anti-inflammatoires et à sa capacité à tuer les parasites microscopiques qui vivent sur le visage et causent des problèmes de peau. Des études expérimentales montrent que l’absinthe a des propriétés anti-angiogéniques, ce qui signifie qu’elle peut réduire la croissance de nouveaux vaisseaux sanguins. En outre, des données montrent que l’absinthe pourrait avoir des effets comparables à ceux d’un antibiotique et d’un antiprotozoaire couramment utilisés pour traiter la rosacée.
La camomille
La camomille contient des huiles volatiles et d’autres propriétés qui inhibent certaines enzymes et régulent l’activation des cellules T auxiliaires et la libération d’histamine. Un lymphocyte T auxiliaire est une cellule immunitaire qui détecte l’infection et active ensuite d’autres cellules pour la combattre. Bien que la camomille puisse induire une dermatite de contact allergique chez les personnes à la peau sensible, des études récentes montrent que son application topique peut aider la dermatite atopique et l’irritation de la peau.
Tormentille (ou Potentille)
La tormentille est une plante vivace de la famille des roses qui peut resserrer les petits vaisseaux sanguins élargis dont souffrent les personnes atteintes de rosacée. Une étude réalisée en 2020 et publiée dans l’Iranian Journal of Pharmaceutical Research a montré que la tormentille augmentait le collagène et modifiait les phénomènes d’oxydation chez les rats diabétiques.
Le thé vert
Le thé vert contient des antioxydants et des catéchines, des substances phytochimiques polyphénoliques naturelles dont il a été démontré qu’elles déclenchent des réponses cellulaires dans l’épiderme et réduisent les rougeurs induites par les UV. Selon l’article, le thé vert pourrait être utile dans le traitement de la rosacée, car les rayons UV peuvent déclencher cette affection. D’autres études montrent que les composés chimiques du thé vert peuvent inhiber la formation de nouveaux vaisseaux sanguins associée à la rosacée.
Artemisia Lavandulaefolia L. (variété d’armoise)
Artemisia lavandulaefolia L. est une plante vivace aux propriétés antimicrobiennes, antifongiques, insecticides, anti-inflammatoires et anti-angiogéniques.
Dans une étude in vitro publiée en 2022 dans Biomedicines, des chercheurs ont évalué les effets de deux constituants bioactifs de cette plante – les acides isochlorogéniques A et C – sur le dérèglement des réponses vasculaires et immunitaires de la rosacée. Ils ont constaté que les deux supprimaient la réponse inflammatoire médiée par les macrophages et les mastocytes. L’acide isochlorogénique A s’est également révélé protecteur contre les rayons UVA.
Yuzu
Le yuzu est un agrume commun dans les pays asiatiques, riche en antioxydants et dont l’effet anti-inflammatoire sur la peau a été démontré. Les huiles essentielles de citron peuvent supprimer les médiateurs pro-inflammatoires impliqués dans le développement et la progression de la rosacée et pourraient aider à normaliser la réponse immunitaire innée, améliorant ainsi les symptômes de la maladie.
L’achillée millefeuille
L’achillée millefeuille est une plante populaire qui contient des substances phytochimiques telles que des flavonoïdes, des phytostérols, des phénols, des terpènes et des huiles essentielles. L’extrait d’achillée contient des propriétés anti-inflammatoires qui peuvent réduire l’inflammation causée par les cytokines (protéines de signalisation). Selon les chercheurs, les études menées sur l’achillée millefeuille montrent qu’elle peut apaiser la peau, équilibrer le pH et réduire les rougeurs, en plus d’inhiber le processus inflammatoire.
Caféier
Le caféier contient de nombreux antioxydants et composés polyphénoliques qui protègent contre les rayons UVA et UVB, ce qui peut prévenir les dommages causés par le stress oxydatif et l’exposition aux radicaux libres. Bien que la consommation de caféine par voie orale ait été autrefois considérée comme un facteur déclenchant de la rosacée, des études plus récentes montrent qu’elle pourrait avoir l’effet inverse. Une étude a montré que la caféine supprimait les cellules responsables de l’inflammation et des lésions cutanées par le biais d’un mécanisme d’autophagie. L’autophagie se produit lorsque l’organisme élimine les cellules endommagées et les remplace par de nouvelles.
L’aloe vera
L’aloe vera a fait l’objet d’études approfondies et est connu pour ses propriétés cicatrisantes. De nombreuses études ont montré que cette plante possède des propriétés anti-inflammatoires, anti-douleur et anti-démangeaison. Selon l’article, les propriétés antioxydantes, anti-inflammatoires et antimicrobiennes de l’aloe vera sont prometteuses pour le traitement de la rosacée. L’aloe vera peut également inhiber la synthèse des protéines bactériennes, ce qui rend difficile la croissance des bactéries en sa présence. Les personnes qui utilisent l’aloe vera ont constaté une amélioration des symptômes associés à la dermatite induite par les UV, tels que les démangeaisons, les brûlures et les cicatrices.
« Compte tenu de tous ces éléments, l’extrait d’Aloe vera L. devrait être un excellent candidat pour soigner et apaiser la peau affectée par la rosacée », écrivent les auteurs de l’article.
Limites de l’étude
Bien que l’étude soit très prometteuse pour les personnes atteintes de rosacée, les chercheurs ont indiqué que leurs conclusions comportaient plusieurs limites. Tout d’abord, ils peuvent être limités par l’absence de méthodes normalisées pour déterminer la gravité et l’efficacité du traitement. En outre, de nombreuses études ne font état que de changements sur des échelles d’évaluation globales et ne décrivent pas l’amélioration des symptômes. Les formulations d’extraits botaniques ne sont pas non plus normalisées et n’ont pas été testées cliniquement.
Cependant, les chercheurs ont déclaré que leur article « fournit une image complète » des plantes actives qui peuvent aider à traiter la rosacée et « ouvre de nouvelles voies pour la recherche sur les composés naturels dans la gestion de la rosacée, seuls ou en combinaison avec des médicaments consacrés ».
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