Les États-Unis s’appuient sur l’expertise ukrainienne acquise au cours de la guerre pour développer des drones

Le Pentagone établit un partenariat avec des fabricants de drones ukrainiens, faisant confiance à leur savoir-faire éprouvé en temps de guerre pour construire une puissance de feu moins coûteuse et à plus longue portée pour les conflits modernes

Par Stephen Xia & Sean Tseng
22 mars 2025 19:00 Mis à jour: 22 mars 2025 19:00

Au début du mois, un organisme du ministère américain de la Défense a annoncé l’octroi de contrats de défense à deux partenariats ukraino-américains pour la construction de drones à longue portée.

Les entreprises ukrainiennes ne sont pas nommées pour des raisons de sécurité. Elles fourniront des modèles pour les essais américains.

Il s’agit d’une décision inhabituelle, car Washington s’en tient généralement à ses propres géants de la défense pour les projets d’armement.

Toutefois, dans ce cas, les Ukrainiens disposent d’un avantage unique : une expérience durement acquise dans la guerre en cours avec la Russie.

Le contrat concerne le projet Artemis, géré par l’Unité d’innovation pour la défense (DIU : Defense Innovation Unit) du Pentagone.

Le projet, lancé l’année dernière, a un objectif clair : construire des drones « kamikazes » ou à usage unique, abordables et à longue portée. Ces drones doivent voler sur une distance de 186 miles (300 km) et travailler dans des conditions difficiles, telles que des conditions météorologiques extrêmes et des télécommunications perturbées.

Ce sont les commandements américains en Europe et dans l’Indo-Pacifique qui ont poussé au développement de ces drones, en prévision des nouveaux défis posés par les conflits modernes. La DIU souhaite disposer d’un prototype Artemis opérationnel d’ici la fin de l’année 2025, les essais devant être achevés d’ici la fin du mois de mai.

Depuis le début du conflit russo-ukrainien, les fabricants de drones ukrainiens ont acquis une grande expérience pratique dans la construction et les essais de drones d’attaque à longue portée – certains volant plus loin que la distance requise par Artemis – et les ont utilisés pour frapper des bases aériennes russes, des installations pétrolières et d’autres cibles clés.

Ils ont appris ce qui fonctionne dans une zone de guerre réelle et ce qu’il faut pour survivre à des tactiques telles que le brouillage du GPS, l’usurpation d’identité et d’autres contre-mesures électroniques qui peuvent abattre ou mettre hors d’état de nuire des drones moins sophistiqués.

Le général James Hecker, commandant des forces aériennes américaines en Europe, a déclaré en juillet dernier que la Russie et l’Ukraine avaient montré comment des systèmes de drones plus petits et moins coûteux pouvaient aboutir à des résultats exceptionnels.

Lors d’une conférence virtuelle organisée par l’Institut Mitchell d’études aérospatiales de l’Association des forces aériennes et spatiales, M. Hecker a souligné que certains pays de l’OTAN préféraient même construire des équipements plus simples, faute d’avoir les moyens d’acheter des produits sophistiqués. Le général a également déclaré que des systèmes moins coûteux pouvaient parfois accomplir les mêmes missions que les systèmes haut de gamme, voire les compléter pour obtenir de meilleures performances globales.

Cette réflexion semble avoir guidé la décision du Pentagone d’aller au-delà des géants de l’armement établis et de s’associer à de nouvelles entreprises plus agiles, en particulier celles qui ont l’expérience du champ de bataille.

Entre-temps, les États-Unis se sont montrés réticents à utiliser des systèmes de missiles haut de gamme et coûteux, tels que les systèmes de missiles tactiques de l’armée (ATACMS), contre des cibles russes, ce qui rend les drones plus petits et moins contraignants d’autant plus attrayants.

Les drones Artemis ont une mission spécifique. Ils doivent être capables de décoller du sol, de transporter différentes charges utiles et de rester suffisamment bon marché pour être produits en masse.

Ils doivent également continuer à fonctionner même si le GPS est hors service, une capacité technique que la Russie et l’Ukraine ont maîtrisée au combat. La Russie a eu recours à des drones captifs pour réduire les risques de brouillage, bien que leur portée soit limitée et qu’ils soient principalement utilisés sur la ligne de front. En revanche, les drones ukrainiens ont une portée plus importante et ont été utilisés pour des attaques de précision, des leurres et tout ce qui se trouve entre les deux.

La guerre a mis en évidence la rapidité avec laquelle les munitions peuvent s’épuiser. Les industries de défense américaines n’ont pas pu produire rapidement les obus de 155 millimètres pour les tirs d’artillerie à longue portée afin de reconstituer les stocks. Dans de vastes espaces de combat, tels que le Pacifique, où les États-Unis pourraient un jour affronter la Chine, des armes à longue portée rentables pourraient changer la donne, et Artemis représente un pas en avant vers la constitution de ce stock.

L’intégration d’entreprises ukrainiennes ne se limite pas à l’ajout d’une expertise : elle bouleverse la chaîne d’approvisionnement traditionnelle de la défense américaine. En élargissant son champ d’action, le Pentagone montre qu’il repense ses méthodes d’acquisition d’armes, en particulier pour les scénarios où le coût, la rapidité et l’adaptabilité comptent autant que la puissance de feu brute.

En fin de compte, Artemis est plus qu’un programme de drones : c’est un modèle pour l’avenir de la guerre. La production rapide, l’accessibilité financière et l’adaptabilité sont désormais des facteurs clés dans les conflits à grande échelle. En exploitant le savoir-faire ukrainien, les États-Unis investissent dans des drones capables de déjouer les menaces modernes en Europe de l’Est, dans le Pacifique occidental ou partout ailleurs où ils seront déployés.

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