Selon un récent rapport du think tank tchèque Sinopsis, le député Buon Tan de la 9e circonscription de Paris (13e arr.), entretient des « liens solides » avec les réseaux d’influence du Parti communiste chinois (PCC).
Le rapport révèle que M. Tan, membre de La République en Marche (LREM), est en lien avec six organisations du Front uni du PCC. Le Front uni est un réseau de groupes et d’individus contrôlés par le PCC pour faire avancer ses intérêts.
Le rapport signale que M. Tan a toujours agi dans l’intérêt de Pékin, parmi tous les députés français, c’est lui qui entretient « les relations les plus étroites avec le PCC ».
Buon Tan est l’actuel président de la commission de l’amitié France-Chine à l’Assemblée nationale, ainsi que le secrétaire de la commission des Affaires étrangères. Sa position de secrétaire au sein de la commission lui permet de superviser les questions liées à la Chine et à l’Asie du Nord‑Est.
En outre, M. Tan a lancé et codirigé une « mission d’information » chargée d’analyser la politique chinoise de la France et des nations européennes en général.
Enfin, le rapport indique que M. Tan contribue aux efforts de transfert de technologie soutenus par l’État chinois. Ce type d’activités font l’objet d’une attention croissante en Occident, car la Chine est passée maître dans la récupération de la propriété intellectuelle et du savoir‑faire étranger.
Agir dans l’intérêt du PCC
En février, M. Tan a sollicité et corédigé avec Mme Bérengère Poletti (députée) un rapport intitulé Rapport d’information sur la stratégie de la France et de l’Europe à l’égard de la Chine. L’élaboration du rapport a suscité de grandes divergences entre les auteurs, globalement en désaccord sur tout. Les auteurs auraient même envisagé de publier chacun leur propre série de recommandations. Selon Sinopsis, Mme Poletti en est venue à penser que M. Tan considérait la relation de la France avec la Chine davantage en termes économiques que politiques.
En définitive, le rapport des deux députés appelle à rééquilibrer la relation entre la France et la Chine et à ne pas agir de concert avec les États‑Unis sur les questions liées à la Chine, en particulier Taïwan et la concurrence avec la Chine, car les États‑Unis se sont engagés dans un combat qui leur est propre et qui ne doit pas impliquer la France. M. Tan et Mme Poletti n’abordent les questions de sécurité ou de droits de l’homme dans aucune de leurs 48 recommandations.
Les chercheurs de Sinopsis décrivent M. Tan comme un homme politique qui avance sur un chemin étroit, défendant les intérêts du PCC sans trop diffuser la propagande communiste.
« Buon Tan s’abstient de reprendre ouvertement les sujets de discussion du PCC, mais son comportement s’aligne largement sur les intérêts de Pékin pour les questions que le PCC considère comme très sensibles. »
Le rapport note qu’en janvier, M. Tan est le seul député français (169 voix contre 1) à avoir voté contre la résolution visant à dénoncer et condamner le caractère génocidaire du comportement de Pékin à l’égard de la minorité ouïghoure.
En novembre 2021, lorsqu’une proposition « en faveur de l’association de Taïwan aux travaux de plusieurs organisations internationales » a été soumise au vote de l’Assemblée nationale, M. Tan s’est abstenu. Plus tard, lorsqu’il a accueilli l’ambassadeur de Chine à l’Assemblée nationale, M. Tan a décrit cette résolution sur Taïwan, qui portait les signatures de près de 200 députés, comme étant l’œuvre de quelques membres.
En avril 2020, lors des débats portant sur la réponse de Pékin au Covid-19 et le rôle possible du PCC dans l’épidémie, M. Tan et un autre représentant LREM, Pierre Person, ont félicité la Chine pour sa « coopération internationale active et son contrôle de la pandémie », poursuit le rapport.
Transfert de technologies
Le rapport met l’accent sur le rôle de M. Tan en tant que conseiller principal de l’association Développement France-Chine (DFC). Il s’agit, nous dit‑on, d’une entité chargée de promouvoir le transfert des technologies en Chine et de recruter les travailleurs doués à l’étranger.
L’association DFC entretient une « relation étroite » avec les organisateurs de la Conférence sur les Chinois d’outre-mer pionniers et en développement en Chine et participe à cette conférence qui se tient une fois par an. Or, cet événement, nous signale‑t‑on, est un outil par lequel les autorités chinoises identifient et attirent les technologies et les investisseurs étrangers.
« Selon le site officiel de la conférence, près de 20 000 Chinois de souche d’outre‑mer ont participé à la conférence de 2018 et 2 300 contrats pour des projets technologiques ou le recrutement de nouveaux talents ont été signés pendant l’événement. »
Pas plus tard qu’en 2020, l’association DFC a ouvert un bureau dans la ville de Hangzhou, dans l’est de la Chine, et a conclu un accord en vertu duquel elle aiderait les autorités chinoises à attirer des talents venus d’Europe.
« Alors que les gouvernements cherchent souvent à attirer des talents de l’étranger, les efforts de recrutement de talents déployés par le gouvernement chinois sont fortement associés à des comportements répréhensibles et à des transferts de technologie opaques », rappelle le rapport.
Le Front uni
Buon Tan est membre des principaux groupes du Front uni depuis 2008, et son affiliation à ces groupes a continué à se développer après son élection en 2017, selon le rapport. Le Département du travail du Front uni (DTFU) est un organe puissant du PCC qui supervise les efforts du régime pour étendre son influence à l’étranger, à la fois officiellement et officieusement.
« Dans le monde entier, le système du Front uni du Parti, un regroupement d’organismes du Parti et d’autres organismes d’État chinois, établit des réseaux parmi les communautés de souche chinoise et cherche à s’appuyer sur ses associés pour faire avancer les intérêts du Parti à l’étranger », indique le rapport. Tout en prétendant publiquement défendre les intérêts des citoyens qui les ont élus dans des États démocratiques libres, ces associés agissent au nom du PCC.
À titre d’exemple, le cas de Christine Lee, leader communautaire et donatrice travailliste, accusée par les services de contre‑espionnage britanniques au mois de janvier d’avoir agi au nom du DTFU.
Le rapport note également que vers la fin de l’année 2018, les responsables australiens ont annulé le visa du magnat de l’immobilier chinois Huang Xiangmo après que des allégations ont été formulées selon lesquelles il aurait agi dans le domaine politique australien au nom des intérêts du PCC.
Selon le rapport, Buon Tan, Christine Lee et Huang Xiangmo sortent tous du même moule. Tous sont membres de plusieurs organisations du Front uni, dont l’Association chinoise de l’amitié outre‑mer (COFA). M. Tan est membre de la COFA depuis 2008 fait actuellement partie de son conseil exécutif.
En 2019, M. Tan s’est rendu à Pékin pour assister à une réunion de la COFA et à une autre réunion des représentants de nombreuses communautés chinoises d’outre‑mer, note le rapport. Lors de cette dernière réunion, M. Tan occupait « une position d’honneur » au premier rang des représentants rassemblés pour rencontrer le dirigeant chinois Xi Jinping. Les images des deux hommes se serrant la main ont été diffusées en prime time sur la chaine nationale CCTV, indique le rapport.
En septembre 2018, après son élection à l’Assemblée nationale , un autre groupe du Front uni, la All-China Federation of Returned Overseas Chinese (ACFROC ou 中国侨联) a nommé M. Tan parmi ses vingt membres français du comité d’outre‑mer. Selon le rapport, l’ACFROC est en majorité composée de cadres du PCC très actifs dans des organisations du Front uni et « fonctionne comme un organe du Parti ».
« Ces liens avec le Front uni signalent le degré d’implication d’une personne dans les activités du PCC, mais les mécanismes de contrôle du Parti sur ces individus peuvent aussi être dissimulés et à chercher en dehors du système du Front uni », indique le rapport.
Malgré tous ses liens avec le PCC, le rapport décrit Buon Tan comme un personnage dont les activités politiques n’éveillent pas vraiment les soupçons, un personnage que nul ne suit d’assez prêt. Par exemple, l’IRSEM, un groupe de réflexion affilié au ministère français de la Défense, a publié en septembre 2021 son propre rapport sur les activités du Front uni du PCC en France, mais n’a fait aucune mention de M. Tan sur ses 600 pages.
Epoch Times a contacté le bureau de M. Tan pour une demande de commentaires.
Sous les projecteurs
Si les liens de M. Tan avec le réseau d’influence du régime chinois à l’étranger ne font globalement pas l’objet d’un examen trop approfondi, ses activités en tant que député ne passent pas totalement inaperçues. Certains sont sceptiques quant à son sérieux en tant que représentant LREM et notent son goût pour se mettre en avant.
« L’opinion générale est qu’il ne travaille pas beaucoup, mais qu’il se présente toujours pour ‘la photo’. Les preuves de son travail dans sa circonscription ne sont pas nombreuses, et il ne semble pas bénéficier d’un grand soutien au sein de la ‘communauté’ ou de la circonscription », explique Paul Smith, professeur à l’université de Nottingham et auteur d’un blog sur la politique française.
La question de savoir si M. Tan pourra toujours promouvoir des politiques favorables à Pékin au sein du Parlement dépendra, dans une certaine mesure, de l’issue de l’élection présidentielle le mois prochain, où le président sortant Emmanuel Macron sera opposé à des challengers comme Éric Zemmour, nationaliste convaincu dont la campagne met l’accent sur la sécurité nationale et la limitation de l’influence étrangère.
« Pour Macron, ce n’est pas une question centrale, mais elle l’est pour M. Zemmour, dont le message politique le plus important est qu’il se présente comme le candidat qui combattra ‘le grand remplacement’. En substance, il joue la carte du nativisme, bien plus encore que Marine Le Pen, qui aurait pu revendiquer ce rôle », poursuit M. Smith.
Le message de M. Zemmour trouve un écho auprès de nombreux électeurs français préoccupés par l’influence étrangère. Mais il s’agit d’une arme à double tranchant, car certaines figures politiques nationalistes, dont Zemmour et Le Pen, ont eu par le passé des liens avec le régime du président russe Vladimir Poutine. Par exemple, Mme Le Pen s’est tournée vers une banque russe pour financer sa campagne en 2017, note M. Smith.
« Le réflexe des électeurs français depuis le début de la guerre [en Ukraine] est de se rallier au drapeau autour du président sortant, ce qui a fait passer sa cote de popularité dans les sondages d’opinion pour le premier tour au-dessus de 30 % et sa cote de popularité en général à des niveaux qu’il n’a pratiquement jamais atteints au cours de son mandat », estime M. Smith.
Par conséquent, le moment n’est peut‑être pas encore propice pour un nationaliste tel que Zemmour, qui pourrait mener une action coordonnée pour limiter l’influence de personnalités liées au Front uni comme Buon Tan dans la politique française.
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