Les mauvaises herbes collaborent pour lutter contre le cancer 

Les propriétés antitumorales potentielles de diverses plantes médicinales peuvent être utilisées dans la lutte contre la « majorité des types courants de cancer »

Par Alexandra Roach
28 mai 2024 02:42 Mis à jour: 30 mai 2024 00:49

Récemment, j’ai fait une présentation sur les plantes comestibles à la bibliothèque de mon quartier. Il s’agit en fait d’herbes pour la cuisine qui sont aussi des plantes médicinales, que les gens peuvent facilement cultiver dans leur jardin ou sur le rebord de leur fenêtre. En préparant ma présentation, je me suis rendu compte que ce sujet est immense par son ampleur et sa profondeur. Un chiffre m’a particulièrement frappée et m’a même arrêtée dans mon élan.

Selon le Center for Biological Diversity, entre 50.000 et 80.000 plantes sont utilisées à des fins médicinales dans le monde entier. Quel chiffre ! Je me sens un peu démunie avec ma connaissance limitée de quelques centaines d’entre elles.

Les connaissances millénaires de la phytothérapie sont pratiquées dans toutes les régions du monde et étayées par de nombreuses recherches internationales : au Proche-Orient, en Russie, en Afrique de l’Est, dans le nord-est de l’Inde et même en Transylvanie. La liste est loin d’être exhaustive.

Une nouvelle étude confirme les propriétés anticancéreuses des plantes

Ces dernières années, les scientifiques ont retrouvé l’envie d’en savoir plus sur nos compagnons floraux. Cette renaissance de la sagesse ancestrale est peut-être motivée par la nécessité de trouver des remèdes à des maladies que la médecine moderne semble incapable de vaincre.

Une étude de 2024, publiée dans la revue Pharmaceuticals, semble aller dans ce sens. La nouvelle publication met en évidence 15 plantes médicinales ayant des qualités anti-tumorigènes potentielles, ce qui signifie que ces plantes ont des composés actifs qui combattent la croissance cellulaire anormale.

J’ai trouvé intéressante la sélection des plantes présentées dans la revue. Certaines d’entre elles nous sont familières – elles ont fait l’objet de nombreux écrits – comme le pissenlit, l’ortie ou le Curcuma longa, mieux connu sous le nom de curcuma.

D’autres, comme la pervenche de Madagascar (Catharanthus roseus), le corossol tropical et même une plante d’intérieur appelée Kalanchoe blossfeldiana ou Kalanchoé de Blossfeld nous sont moins familières.

Cependant, toutes ces plantes ont une caractéristique commune : elles agissent « contre la majorité des types courants de cancer », lit-on dans le titre de la revue.

Un traitement efficace pour un développement immédiat

Le Centre international de recherche sur le cancer décrit la situation mondiale du cancer comme désastreuse. Son rapport de 2022 indique que la plupart des personnes sont décédées d’un cancer du poumon (18,7 %), d’un cancer colorectal (9,3 %) et d’un cancer du foie (7,8 %). Au total, pas moins de 3 480 213 personnes.

C’est pourquoi les chercheurs de la présente étude appellent au développement immédiat de « plans de traitement plus ciblés et plus efficaces ». À leurs yeux, « les plantes et les produits qui en sont dérivés ont un potentiel prometteur en tant que source de médicaments anticancéreux moins toxiques ».

Un mélange de sagesse traditionnelle et de nouvelles nanotechnologies

Pour atteindre cet objectif, les plantes sont utilisées pour renforcer le système immunitaire, éliminer les substances cancérigènes et améliorer les niveaux d’antioxydants dans notre corps. Les scientifiques considèrent les nouvelles nanomédecines et les techniques de bio-ingénierie pour les thérapies cellulaires immunitaires comme des approches innovantes pour traiter la maladie.

En tant qu’herboriste communautaire, je vois les choses avec les yeux de la longévité. Quelle sagesse traditionnelle concernant ces herbes a été transmise pendant des siècles ? Comment combiner les deux mondes de la recherche novatrice et des connaissances ancestrales pour le bien du patient ?

Plantes anticancéreuses : recherche et application

L’étude récemment publiée mentionne plusieurs plantes qui peuvent pousser en abondance dans nos jardins – souvent, nous les considérons même comme des mauvaises herbes gênantes dont il faut se débarrasser. C’est souvent le cas des pissenlits.

Au fond de moi, j’entends mon professeur d’herboristerie répéter sans cesse : « Souvent, les herbes apparaissent là où nous en avons besoin ». C’est vrai pour l’une des plantes vivaces herbacées les plus robustes, originaire d’Europe, mais qui pousse partout dans le monde, dans les jardins et les pelouses, le long des routes et des champs, et même dans les zones d’épandage.

Pissenlit commun

(Shutterstock)

Taraxacum officinale, communément appelé pissenlit, n’est pas seulement une plante médicinale, mais aussi un légume comestible. Les jeunes feuilles, particulièrement tendres, complètent le goût de toute salade en lui conférant une légère amertume, signe d’une meilleure digestion.

Le genre Taraxacum comprend plus de trois cents espèces. Celles-ci ont été découvertes et utilisées dans les médecines traditionnelles et populaires depuis des siècles. Le botaniste allemand Leonhart Fuchs, par exemple, a présenté les propriétés salutaires de la plante au XVIe siècle dans son recueil de plantes médicinales, De historia stirpium commentarii insignes (Commentaires remarquables à propos de l’histoire des plantes).

Le pissenlit était également connu comme médicament dans la médecine arabe. Les médecins y ont consigné son utilisation dès le Xe siècle. Les médecines indienne et chinoise traitent les maladies du foie et de l’appareil digestif avec le pissenlit commun, indique un article sur la plante publié dans la National Library of Medicine.

Le pissenlit est une véritable plante à tout faire. Il contient entre autres des vitamines A, C, B et D, des minéraux (potassium et calcium) et des traces de fer, de magnésium, de manganèse et de zinc.

Une revue de 2023 a examiné attentivement le pissenlit et a remarqué ses composés bioactifs. « Les sesquiterpénoïdes, les composés phénoliques, les huiles essentielles, les saccharides, les flavonoïdes, les sphingolipides, les triterpénoïdes, les stérols et les coumarines » sont des sources de « potentiel thérapeutique, notamment d’activités antibactériennes, antioxydantes, anticancéreuses et antirhumatismales ».

Des recherches coréennes ont montré que la quantité de phénols et de flavonoïdes dans la plante détermine ses activités anticancéreuses et antioxydantes. Ce phénomène varie d’une espèce de taraxacum à l’autre, mais existe chez le pissenlit commun.

Des chercheurs ont étudié une combinaison d’extraits de pissenlit dans une étude réalisée en 2023. Les résultats, publiés dans la revue Scientific Reports, soulignent l’importance d’inhiber la « prolifération rapide des cellules cancéreuses et leur invasion dans les tissus sains » propres au cancer du sein. C’est exactement ce que fait l’extrait de pissenlit : il inhibe leur propagation et « induit leur mort ».

La thérapie photodynamique est une autre méthode pour cibler les tissus cancéreux. Un agent photosensibilisant est stimulé par la lumière, par exemple par un laser. Dans un article paru en 2023 dans Nanomedicine, ce processus a été testé avec le pissenlit pour une « chimiothérapie synergique et une thérapie photodynamique du cancer ». Cette méthode de transport a permis d’acheminer le composé actif vers les cellules cancéreuses et de perturber leur homéostasie, produisant ainsi des effets anticancéreux et antitumoraux.

L’ortie piquante

(Alfonso de Tomas/Shutterstock)

La grande ortie, ou ortie dioïque (Urtica dioica), vient en deuxième position dans la liste des mauvaises herbes hautement médicinales. Dans de nombreuses régions tempérées, les orties poussent comme des parasites et sont des fleurs sauvages indésirables pour beaucoup.

Contrairement à ce que l’on pense, j’ai récemment transplanté quelques orties dans mon jardin et j’ai même répandu des graines d’orties pour tenter de les y implanter. Les orties sont des plantes nutritives délicieuses et constituent un excellent complément aux soupes et aux sauces de salade, car les aiguillons poilus perdent leur pouvoir lorsqu’ils sont transformés.

Pleine de provitamine bêta-carotène, de vitamines A, B et C, de minéraux comme le fer, le magnésium, le potassium et le calcium, cette herbe vivace riche en protéines regorge de bienfaits pour la santé. Mais l’extrait d’ortie peut faire plus.

Un article de recherche publié en 2020 présente les propriétés potentiellement anticancéreuses de l’ortie. Évalué, l’extrait d’Urtica dioica a montré des effets prometteurs sur le taux de prolifération des « lignées cellulaires d’hépatocarcinome et de cancer du côlon à des doses spécifiques. »

Dans une étude de 2022 publiée dans l’Asian Pacific Journal of Cancer Prevention, la plante médicinale a prouvé ses qualités anticancéreuses contre trois types différents de lignées cellulaires cancéreuses. La cytotoxicité de l’urtica dioica a été testée in vitro (via des tests sur les mycoplasmes) et in vivo (sur un organisme vivant, en l’occurrence des rats). Les résultats sont positifs et montrent que l’ortie peut agir contre le cancer du sein grâce à ses propriétés anti-tumorales.

Selon une autre étude, visant à rechercher les qualités curatives potentielles de l’ortie en ce qui concerne le cancer du côlon et de l’estomac, l’ortie a également induit l’apoptose et « inhibé la prolifération des cellules cancéreuses gastriques et colorectales », tout en n’ayant pas d’effet secondaire toxique sur les cellules normales.

Grande bardane

(Shutterstock)

La bardane est une fleur sauvage qui pousse dans les champs abandonnés, les pâturages, le long des clôtures et des routes de nos régions.

Comme le pissenlit, la bardane fait partie de la famille des astéracées (la famille des asters) et pousse apparemment partout. De même, les parties médicinales de la bardane comprennent les racines et les feuilles, auxquelles s’ajoutent les graines.

L’Arcticum lappa est également riche en minéraux et en vitamines, notamment en vitamines B (thiamine, riboflavine et niacine). Mais elle contient également des lignanes dans les racines et les graines, des acides aminés dans les racines, des phénols, des stérols et des acides gras dans les graines, ainsi qu’une « pléthore d’activités biologiques et de fonctions pharmacologiques ».

L’un des composés de la bardane, le lappaol F (un lignane naturel), est un agent anticancéreux qui « inhibe la croissance des cellules tumorales en induisant l’arrêt du cycle cellulaire », indique une étude de 2021, tout en notant que les processus sous-jacents des qualités anticancéreuses de la bardane ne sont pas encore élucidés.

Néanmoins, la plante est efficace et les chercheurs suggèrent qu’un médicament anticancéreux potentiel pourrait être développé à partir de cette plante médicinale.

Une revue publiée dans Inflammopharmacology souligne les usages médicinaux traditionnels centenaires de la bardane en Europe, en Amérique du Nord et en Asie. Elle souligne les qualités anti-inflammatoires et les effets détoxifiants de la plante, ainsi que ses propriétés antitumorales, en particulier ses « puissants effets inhibiteurs sur la croissance de tumeurs telles que le carcinome pancréatique ».

La bardane s’est même révélée efficace contre les « cellules cancéreuses multirésistantes ». Une étude a examiné six lignanes présents dans les graines de bardane et les a combinés en tant qu’agents chimiothérapeutiques non toxiques. Les résultats ont montré qu’ils « possèdent des activités prometteuses d’inversion de la résistance aux médicaments ». L’étude a également testé et vérifié cet effet en combinaison avec un médicament chimiothérapeutique appelé doxorubicine.

Les 12 autres plantes anticancéreuses

Les 12 autres plantes examinées dans la récente étude sont le corossol (Annona muricata), la calla noire ou arum noir (Arum palaestinum), le chanvre (Cannabis sativa), la pervenche de Madagascar (Catharanthus roseus), le curcuma (Curcuma longa), la réglisse (Glycyrrhiza glabra), le moringa (Moringa oleifera), l’hibiscus rose de chine ou Ketmie (Hibiscus rosa-sinensis), le chardon-marie (Silybum marianum), le laurier-rose (Nerium oleander), le kalanchoe, ou Kalanchoé de Blossfeld  (Kalanchoe blossfeldiana ), et l’ashwagandha (Withania somnifera).

Le curcuma, la réglisse, l’hibiscus, le chanvre, l’ashwagandha et le chardon-marie sont connus de tous, et pas seulement des herboristes. Le corossol pourrait également entrer dans cette catégorie d’anticancéreux pour certains, en particulier pour ceux qui vivent dans des régions tropicales.

D’autres nous font réfléchir, car nous considérons ces plantes plutôt comme des fleurs décoratives dans le jardin ou des plantes d’intérieur, comme le laurier-rose, l’arum noir, la pervenche de Madagascar ou le kalanchoe. Originaire du sous-continent indien et utilisé principalement en Asie du Sud, le moringa est peut-être la plante la plus étrangère de toutes.

Pourtant, au final, ce sont des plantes médicinales renommées.

Recherche phytopharmaceutique en cours

Une revue de 2022, par exemple, salue les qualités curatives du corossol. Ses « effets pharmacologiques anticancéreux, antimicrobiens, antioxydants, antiulcéreux, antidiabétiques, antihypertenseurs et cicatrisants » sont impressionnants.

Une autre revue présente une étude dans laquelle des patients ont reçu 300 mg d’extrait de corossol (eau de feuilles) en gélules après le petit-déjeuner. Cela a permis de freiner la croissance des cellules cancéreuses colorectales.

L’ashwagandha est un phytothérapeutique qui cible également le cancer colorectal. Une étude réalisée en 2023 a montré que cette plante et ses composés bioactifs « tuent les cellules cancéreuses par au moins cinq voies distinctes ».

Elle a même été qualifiée de « médicament miracle » dans le domaine alternatif et a montré des composés bioactifs remarquables qui fonctionnent comme « agents anticancéreux, anti-inflammatoires, apoptotiques, immunomodulateurs, antimicrobiens, antidiabétiques, hépatoprotecteurs, hypoglycémiques, hypolipidémiques, cardio-protecteurs et spermatogènes », comme l’indique une revue complète.

De nombreuses études et revues soulignent toutefois qu’il est malheureusement nécessaire de poursuivre les recherches en raison de « l’absence de quantités et de mesures de concentrations établies » ou, tout simplement, de l’absence de recherches médicales de grande envergure sur notre environnement floral.

Contre-indications et effets secondaires

En général, les produits phytopharmaceutiques sont des médicaments puissants.

Bien que de nombreuses plantes n’aient pas d’effets secondaires et ciblent souvent naturellement les cellules cancéreuses sans affecter les cellules saines, c’est un mécanisme qui n’est pas encore tout à fait compris par la science (comme mentionné ci-dessus). En même temps, l’ingestion d’une mauvaise plante ou d’un mauvais dosage peut être nocif, voire mortel.

En ce qui concerne le pissenlit, l’ortie et la bardane, il existe quelques principes directeurs :

Les orties ne doivent pas être consommées crues. Les feuilles fraîches piquent.

• Le pissenlit peut provoquer des maux d’estomac en cas d’ingestion d’une trop grande quantité de feuilles ou après un usage prolongé, car il peut augmenter la production d’acide chlorhydrique (HCl) dans l’estomac et entraîner des selles molles.

• La racine de pissenlit doit être prise avec précaution si la personne souffre d’un excès d’HCl, de gastrite, d’ulcères ou de brûlures d’estomac.

• Pendant le premier trimestre de la grossesse, la bardane ne doit être prescrite qu’à des doses légères. De même, il convient d’être prudent en cas d’hypoglycémie.

Conseils :

En cas de cueillette d’herbes ou de plantes dans la nature ou dans des espaces publics, veiller à ce que les spécimens soient récoltés avec discernement. Cela signifie que l’on ne doit cueillir les plantes qu’à l’écart des zones sales ou polluées et qu’il faut les laver avant de les manger ou de les transformer. De plus, ne jamais prendre la plante entière (on veut qu’elle continue à vivre et la retrouver l’année suivante).

Remarque :

Pour toutes les recommandations et les dosages personnalisés de plantes médicinales, consulter un herboriste local. Si on prend des médicaments, il faut consulter un médecin avant de prendre des suppléments à base de plantes. L’auteur écrit à des fins d’information uniquement et n’agit pas en qualité de médecin ou de diététicien-nutritionniste agréé.

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