Les premières frappes de Kiev sur le sol russe avec des missiles américains constituent une « nouvelle phase », menace la Russie

Par Epoch Times avec AFP
19 novembre 2024 15:30 Mis à jour: 19 novembre 2024 16:39

La Russie a affirmé mardi que l’Ukraine avait attaqué dans la nuit son territoire avec des missiles de longue portée américains, une première en 1000 jours d’invasion russe. Le chef de la diplomatie russe a promis mardi une réponse « appropriée » dénonçant l’implication des États-Unis dans ces frappes et y voyant une « nouvelle phase » dans le conflit.

Cette affirmation intervient quelques jours après le feu vert de Washington à Kiev pour frapper le sol russe avec ces missiles ATACMS, ce que Moscou avait présenté comme une ligne rouge.

« A 03h25, l’ennemi a frappé un site de la région de Briansk », non loin de la frontière ukrainienne, avec des « missiles tactiques ATACMS », selon le ministère russe de la Défense qui précise que des installations militaires étaient visées et qui assure que cinq missiles ont été détruits et un autre endommagé par la défense antiaérienne russe.

Interrogées par l’AFP, les autorités ukrainiennes n’ont pour le moment pas réagi. L’Ukraine réclamait depuis de longs mois de pouvoir frapper « en profondeur » des cibles militaires en territoire russe pour dérégler la logistique de l’armée russe qui bombarde quotidiennement ses infrastructures et ses villes, causant la mort de de nombreux civils.

« Une nouvelle phase de la guerre occidentale contre la Russie »

« Si des missiles de longue portée sont utilisés depuis l’Ukraine vers le territoire russe, cela signifie qu’ils sont opérés par des experts militaires américains. Nous considérerons cela comme une nouvelle phase de la guerre occidentale contre la Russie et nous réagirons en conséquence », a déclaré Sergueï Lavrov devant la presse à Rio de Janeiro, après le G20.

Il a affirmé que les ATACMS ne pouvaient pas être tirés par les Ukrainiens « sans l’aide d’experts et d’instructeurs américains » qui fournissent notamment « des données satellitaires, la programmation et le ciblage ».

M. Lavrov a estimé que l’utilisation d’ATACMS pour frapper le sol russe était « un signal » selon lequel l’Ukraine et les Occidentaux « veulent l’escalade ».

« Il est impossible d’utiliser ces missiles de haute technologie sans les Américains », a-t-il martelé. M. Lavrov a aussi recommandé aux Occidentaux de « lire la totalité » de la nouvelle doctrine nucléaire russe.

La possibilité du recours à l’arme atomique russe élargie

Vladimir Poutine a réagi mardi en signant le décret officialisant sa nouvelle doctrine nucléaire qui élargit la possibilité du recours à l’arme atomique en cas d’assaut aérien « massif » par un pays non nucléaire mais soutenu par une puissance nucléaire. Des références claires à l’Ukraine et aux États-Unis.

« Il était nécessaire d’adapter nos fondements (de la doctrine nucléaire) à la situation actuelle », a froidement relevé Dmitri Peskov, le porte-parole du Kremlin.

En septembre, Vladimir Poutine, qui réclame la reddition de l’Ukraine, avait prévenu que si ce pays frappait le territoire russe avec des missiles de plus longue portée occidentaux, cela signifierait que « les pays de l’Otan sont en guerre contre la Russie ».

Après 1000 jours d’un conflit qui a fait des dizaines voire des centaines de milliers de morts au total, Kiev ne compte pas céder même si les militaires russes sont désormais appuyés par des milliers de soldats nord-coréens et malgré l’incertitude sur la pérennité du soutien américain avec le retour prochain de Donald Trump à la Maison Blanche.

Face au Parlement ukrainien, Volodymyr Zelensky a estimé que l’issue se déciderait en 2025. « Dans les moments décisifs, qui arriveront l’année prochaine, nous ne devons permettre à personne dans le monde de douter de la résilience de notre État tout entier. Et cette étape déterminera qui l’emportera », a-t-il dit. « l’Ukraine peut vaincre la Russie », même si « c’est très difficile », a-t-il souligné.

M. Zelensky prêt à accepter temporairement la perte de zones occupées

Mais le M. Zelensky a reconnu que l’Ukraine pourrait devoir attendre l’après-Poutine pour « rétablir » son intégrité territoriale, les Russes occupant près de 20% de sa superficie. C’est la première fois qu’il admet ainsi que son pays devra « peut-être » accepter, pendant un temps, la perte de zones occupées par la Russie.

Plus tôt, la diplomatie ukrainienne avait affirmé que l’Ukraine ne se soumettrait « jamais » à la Russie, tandis que le Kremlin répétait qu’il vaincrait sur le front.

« L’opération militaire se poursuivra » jusqu’à la réalisation « des objectifs fixés », a martelé Dmitri Peskov, au moment où l’armée russe avance sur plusieurs secteurs du front, notamment près de Kourakhové (est), où elle a revendiqué mardi la conquête d’un nouveau village.

En outre, la Russie multiplie ses frappes de missiles et de drones sur les villes et les infrastructures ukrainiennes, tuant de nombreux civils et plongeant régulièrement la population dans le noir et le froid. Une frappe russe a provoqué la mort dans la nuit de lundi à mardi de dix personnes, dont un enfant, dans la région de Soumy (nord-est), selon un dernier bilan.

Parallèlement, le retour de Donald Trump laisse craindre à l’Ukraine et aux Européens que celui-ci ne force Kiev à des concessions, offrant une victoire militaire et géopolitique à Vladimir Poutine.

La Pologne et d’autres États européens ont donc dit vouloir assurer la défense européenne et celle de l’Ukraine en cas de retrait américain.

« Les principaux pays de l’UE sont prêts à assumer la charge du soutien militaire et financier à l’Ukraine dans le contexte d’une éventuelle réduction de l’engagement des États-Unis », a affirmé le chef de la diplomatie polonais Radoslaw Sikorski, après une réunion à Varsovie avec ses homologues français, allemand, italien, espagnol et britannique.

Il leur faudra toutefois trouver un terrain d’entente durable, alors que le chancelier allemand Olaf Scholz a appelé il y a quelques jours Vladimir Poutine pour la première fois en deux ans, provoquant la colère de Volodymyr Zelensky.

Le président ukrainien a dit vouloir la fin de la guerre en 2025 par « des moyens diplomatiques » mais considère que Kiev a besoin de plus de moyens militaires pour infliger des défaites au Kremlin et aborder des négociations en position de force.

M. Poutine ne doit « parvenir à ses fins », a insisté mardi le secrétaire général de l’Otan, Mark Rutte.

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