Selon un nouveau rapport de l’Australian Strategic Policy Institute (ASPI), Pékin contourne son propre pare-feu pour exploiter YouTube et tirer profit de son service de publicité dans sa bataille pour gagner les cœurs et les esprits en Occident.
Le rapport, intitulé China is using ethnic-minority influencers to spread its Xinjiang narrative on social media [La Chine utilise des influenceurs issus de minorités ethniques pour diffuser son narratif du Xinjiang sur les médias sociaux] et financé par le département des Affaires étrangères des États-Unis, a examiné 1741 vidéos de 18 influenceurs YouTube populaires, apparemment basés au Xinjiang, au Tibet et en Mongolie intérieure.
L’étude a révélé que ces « influenceurs frontaliers », pour la plupart de jeunes femmes issues de minorités ethniques, étaient soigneusement contrôlés et considérés comme politiquement fiables par Pékin.
« Les vidéos montrent une image standardisée, laïque et immaculée de ces régions, avec des femmes modernes, sinisées et faisant preuve de loyauté envers le Parti communiste chinois [PCC] », selon un article des auteurs de l’ASPI.
« Cette propagande subtile montre une vision de la ‘belle Chine’ du président Xi Jinping, une vision épurée de la politique et de la religion, qui montre plutôt un environnement naturel idyllique et des éléments de culture inoffensifs comme la cuisine ou la danse. »
Un exemple notable est celui de Li Ziqi, la plus grande influenceuse internationale de la Chine sur les médias sociaux, dont les vidéos pastorales dans la province du Sichuan ont attiré des centaines de milliers d’abonnés à l’étranger.
Les influenceurs chinois se développent grâce à des agences « extérieures »
Le rapport note que si les vidéos de ces influenceurs semblent être créées par eux‑mêmes, elles ont en réalité été générées avec l’aide d’agences spéciales de gestion des influenceurs, connues sous le nom de réseaux multichaines (MCN).
« Les chaînes sont soigneusement produites pour paraître authentiques, ce qui leur donne plus de crédibilité que les médias traditionnels de l’État‑parti, qui peuvent souvent être rigides et didactiques », ont écrit les auteurs.
« Pourtant, les chaînes sont produites par les MCN, qui, en tant qu’entreprises, sont liées au PCC. Certains des MCN ont des comités internes du PCC en leur sein. Tous les MCN sont tenus par la loi chinoise de s’assurer que leurs talents pratiquent les valeurs du PCC et promeuvent son programme. »
YouTube subventionne la propagande du PCC
Alors que les créateurs de contenu chinois peuvent avoir du mal à monétiser leur contenu sur YouTube en raison du Grand Pare‑feu chinois, les MCN sont libérés de ces contraintes et concluent des accords avec YouTube. De ce fait, le géant du partage vidéo contribue très concrètement aux efforts de propagande et de désinformation du PCC.
Le rapport de l’ASPI a découvert huit entreprises chinoises exploitant des chaînes YouTube basées en Chine, qui ont toutes conclu de tels accords avec YouTube.
Par exemple, Zhu Danjun, PDG de Xiaowu Brothers. Ce dernier a déclaré aux médias chinois que, depuis 2018, son personnel et les influenceurs qu’il représente ont des réunions avec « les stratèges de YouTube » tous les uns à deux mois.
En outre, les comptes de nombreux influenceurs affichent des publicités vidéo pré‑roll pour des marques telles que le créateur de sites Web Squarespace et la compagnie américaine de croisières Norwegian Cruise Line.
« Sur des vidéos portant spécifiquement sur le coton du Xinjiang, nous avons vu des publicités pré‑roll et des pop‑ups pour KFC Australie et Vimeo, entre autres marques », indique le rapport.
Le déni des atrocités commises par le PCC
En plus d’utiliser des moyens subtils pour influencer le public, les influenceurs nient aussi directement les préoccupations internationales établies en matière de violation des droits de l’homme dans certaines vidéos. Comme le dit un des influenceurs, « les gens sont heureux et toutes les ethnies vivent ensemble harmonieusement ».
Ces dernières années, le PCC a procédé à une surveillance, une détention et une « rééducation » massives des Ouïghours et d’autres minorités ethniques du Xinjiang, sous prétexte de lutter contre l’instabilité et le terrorisme.
Alors que le régime communiste a longtemps nié l’accusation de « génocide » au Xinjiang, des dossiers de la police du Xinjiang ont fuité et ont été publiés en mai révélant une persécution brutale des Ouïghours dans des camps de concentration, avec l’exécution de fugitifs.
Selon un rapport publié en août par la Haute‑Commissaire des Nations unies aux droits de l’homme, les accusations d’atrocités commises dans le Xinjiang comprennent des viols, des violences sexuelles, des mises à l’isolement, des tortures psychologiques et des traitements médicamenteux forcés.
Une « bataille difficile » en perspective
« Ce rapport montre clairement à quel point ces réseaux de désinformation sont toxiques et poussés en Chine, et comment ils dépassent les frontières pour atteindre le public international », explique pour Epoch Times Nurgul Sawut, présidente exécutive du Uyghur Freedom Forum.
« Il est certain que nous avons une bataille difficile à mener. »
Mme Sawut exhorte les gouvernements à prendre des mesures pour aider les communautés à combattre la désinformation du PCC.
« Le gouvernement australien aurait dû mettre en place un meilleur système de filtrage à la fois sur Google et YouTube pour le public australien. »
« S’ils ne peuvent pas influencer la façon dont YouTube et Google fonctionnent à l’échelle internationale, ils devraient au moins retirer ces informations trompeuses, travailler sur l’algorithme ou réduire les taux et le pourcentage de [contenu] qui apparaissent. »
« Je suis sûre qu’il y a beaucoup de choses techniques qu’ils peuvent faire pour empêcher la diffusion de la désinformation. »
Elle rappelle que son groupe essaie toujours de communiquer avec les gouvernements, les télécommunications et les cyberautorités.
« Sans cette aide, nos chances de vaincre la désinformation sont très minces », conclut‑elle.
Epoch Times a contacté YouTube pour une demande de commentaires, mais n’a pas reçu de réponse à l’heure de la mise sous presse.
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