Invité de TF1, le président du groupe Les Républicains au Sénat a estimé que « la marque LR est morte » et annoncé qu’« il faut reconstruire un grand parti de droite pour la France », auquel pourraient être intégrés des anciens LR passés chez Emmanuel Macron. Opposé à la ligne Ciotti, ce projet, s’il advenait, pourrait se révéler conforme à la vision portée par Nicolas Sarkozy : une droite républicaine reconstituée autour d’acteurs politiques issus des Républicains et du camp présidentiel.
En procédant à la dissolution de l’Assemblée nationale, Emmanuel Macron a provoqué par ricochet une onde de choc au sein des Républicains. Contre la volonté des ténors du parti, son président Éric Ciotti a franchi un tabou jamais encore transgressé sous la Ve République : s’allier avec le Rassemblement national pour l’emporter aux législatives anticipées. Une rupture historique motivée, selon lui, par la volonté d’empêcher le mouvement fondé par Nicolas Sarkozy de finir aux soins palliatifs.
Finalement, malgré la scission, les urnes n’ont pas encore acté le sombre pronostic du député des Alpes-Maritimes. Obtenant avec ses alliés 63 députés à l’Assemblée nationale contre 62 sortants, la droite LR indépendante a échappé au cimetière ; tâche à elle maintenant d’identifier la stratégie pour se remettre en selle et ainsi pouvoir retourner aux affaires.
« Tout refaire »
Invité lundi soir de TF1 au lendemain du second tour des élections législatives, Bruno Retailleau a annoncé la voie que semblent vouloir emprunter les lieutenants LR à la suite du séisme ayant ébranlé leur état-major : « Il faut reconstruire un grand parti de droite pour la France ». Une refonte donc : « Tout refaire ». Mais à quoi ressemblerait « ce grand parti de droite » ?
Sur le fond, a priori, rien de bien novateur, selon l’esquisse partagée par le chef de file des sénateurs républicains : sur le plan de la sécurité, « plus de fermeté » ; « sur le plan économique, plus de liberté ». Pas d’innovation doctrinale en perspective pour cette droite qui tient à marquer sa différence avec le programme économique de l’ancien Front et ses adversaires : « Ils veulent tous à peu près plus de dépenses […] Nous sommes les seuls à proposer une économie qui respire un peu ».
Toutefois, pour la forme, un nouveau nom, qui reste à déterminer. « On le trouvera », a dit, confiant, le parlementaire vendéen, soulignant que « la marque LR est morte ». Reste surtout à connaitre l’identité des parties prenantes pouvant favoriser une mue politique à même de susciter un nouvel élan porteur.
Derrière la nouvelle appellation, ce relooking pourrait n’être qu’un trompe-l’œil. Interrogé par Gilles Boulleau sur l’éventuel retour au bercail de figures du gouvernement macroniste, comme Gérald Darmanin et Édouard Philippe, Bruno Retailleau ne ferme manifestement pas la porte à cette éventualité : « [S’ils reviennent, cela sera] sur notre propre ligne, nos propres convictions ». Un souhait de rapatrier les membres de l’aile droite de la macronie pour 2027 ?
Pas de stratégie du « ni-ni » pour Sarkozy
D’aucuns pourraient voir dans cette orientation politique, risquée et peu rancunière vis-à-vis de ceux qui ont quitté LR pour LREM, l’ombre d’une vision portée par l’ancien chef de l’État, elle-même fortement critiquée en 2022 par Bruno Retailleau.
Nicolas Sarkozy est en effet connu pour ses affinités envers le camp présidentiel. Pour lui, exit le ni-ni. Déjà en 2022, après la défaite historique de Valérie Pécresse à l’élection présidentielle, celui-ci avait apporté son soutien à Emmanuel Macron pour le second tour de l’élection présidentielle, désavouant ainsi son parti, qui s’était refusé de donner une consigne de vote en faveur de l’actuel locataire de l’Élysée. Tout en appelant, en même temps, à faire barrage à Marine Le Pen.
Dans le deuxième tome de ses mémoires, Le Temps des combats, paru en août 2023, Nicolas Sarkozy avait ensuite exprimé son souhait de voir le ministre de l’Intérieur d’Emmanuel Macron, Gérald Darmanin, franchir « l’étape ultime » vers la fonction suprême à la prochaine présidentielle : « Je le lui souhaite, car il a des qualités évidentes », écrit-il. De son côté, Le chef de Beauvau, qui se présente comme un « homme de droite », lorgne clairement sur 2027 et confiait déjà au Figaro, avant le premier tour des législatives, « vouloir préparer la suite ».
Rebelote lors des législatives. Dans un entretien du 15 juin accordé au Journal du Dimanche, l’ancien président de la République désapprouvait la décision d’Éric Ciotti de sceller une alliance avec le RN et plaidait de nouveau pour une alliance avec Renaissance. C’était à ses yeux l’espoir de pouvoir « peser sur les choix » d’Emmanuel Macron, au motif que ce dernier sera dans l’impossibilité de se représenter en 2027. Une analyse qui prend également sa source dans le danger que fait courir un rapprochement avec Jordan Bardella pour la survie du parti : « Cette alliance est d’autant plus inopportune quand la droite républicaine est si faible car il s’agit alors d’une absorption ».
La macronie affaiblie, la reconstruction d’un grand parti de droite réintégrant des ex-LR devenus macronistes, sans pour autant se rallier au camp présidentiel, pourrait-elle favoriser l’émergence d’une force de droite républicaine pour 2027 ?
Un divorce en passe d’être consommé ?
Quoi qu’il en soit, le positionnement de l’ancien homme fort de la droite n’aura aucunement poussé Éric Ciotti à renoncer au sien. Même après le score de l’union RN-LR en-deçà de ses espérances, l’actuel président des Républicains persiste et signe, visiblement décidé à maintenir son alliance avec le parti à la flamme. « Cette alliance constitue le seul espoir pour la France qui travaille, le seul espoir de la France fière, le seul espoir pour la France que nous aimons », a-t-il tonné dans sa conférence de presse à l’issue du second tour des législatives. Sans manquer de tacler au passage Xavier Bertrand, qui a « appelé à voter en faveur » d’un communiste contre le RN.
Par la création d’un nouveau mouvement de droite, sans doute les « putschistes » chez les cadres LR entendent-ils ainsi enterrer définitivement la ligne adoptée par Éric Ciotti en réponse à la crise existentielle du parti. Ancêtre du RPR, ex-UMP, Les Républicains auront, le cas échéant, vécu neuf ans. L’existence la plus éphémère dans l’histoire de la droite sous la Ve République.
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