Vous avez peut-être accepté comme une fatalité l’inflation des prix alimentaires, +7% fin 2022, +15,9% en avril 2023, selon l’Insee. Qu’y faire puisque « c’est la faute de la guerre en Ukraine ». Le prix de la tonne de blé était monté l’année dernière à près de 450 euros, soit près de 80% d’augmentation, car tout le monde anticipait que la Russie et l’Ukraine, qui représentent un tiers de la production mondiale, ne pourraient exporter leur récolte. Le Moyen-Orient et les pays du Sud allaient se retrouver face à une famine sans précédent. Heureusement, les corridors ont fonctionné, en partie grâce à la Russie qui a accepté que les exportations de blé ukrainien soit sécurisées. Ce qui devait être une année de catastrophe alimentaire a au contraire été une année exceptionnelle pour la récolte de blé. Dès juillet dernier, les greniers à blé étaient pleins et dépassaient de loin la demande mondiale.
Les cours boursiers sont pourtant restés très élevés, et le consommateur a vu les prix monter en flèche. Pourquoi ? Parce que la peur a mis les spéculateurs et les négociants en position de force pour vendre plus cher. Les profiteurs de guerre ont profité, une première fois. Car on peut jouer à tout en bourse y compris pour parier sur la faim et la soif dans le monde.
Vers novembre 2022, la période d’aubaine était passée, une tendance baissière s’est amorcée. Sur la place boursière Euronext, le cours de la tonne de blé est passé fin mars sous la barre des 250 euros. La raison ? Les grands opérateurs financiers dont JP Morgan, Goldman Sachs, Silicon Valley Bank, Crédit Suisse mais aussi bien d’autres ont « vendu » leurs positions, ayant fait le maximum de profit possible en 2022. Les négociants contrôlent beaucoup de stocks de blé grâce aux récoltes 2022, donc dégringolade des cours boursiers. Si les consommateurs ne s’en rendent, eux, pas compte, c’est qu’ils n’en bénéficient pas : entre eux et le blé, il y a les céréaliers — qui vont être forcés de vendre moins cher lors des négociations du printemps – mais surtout les distributeurs, qui n’ont pas l’intention de répercuter la baisse. Deuxième vague de profits de guerre.
Si seulement c’était fini… mais 2023 ne fait que commencer pour les spéculateurs du blé. Samedi 15 avril, la Pologne et la Hongrie ont décidé d’interdire les importations de céréales depuis l’Ukraine. Depuis le début de la guerre, les céréales ukrainiennes destinées à des pays étrangers transitent par l’Union européenne, et les stocks de céréales s’accumulent en Pologne, accélérant la chute des prix. Face aux manifestations d’agriculteurs en colère, le ministre polonais de l’Agriculture a dû démissionner et le gouvernement décréter un embargo.
L’Europe est donc en train de créer volontairement la situation que tous avaient tenté d’éviter en 2022, parce qu’elle était un scénario catastrophe : un blocage sur les céréales, le sucre, la viande, les fruits et légumes, le lait, les œufs, l’huile. Le 13 avril, la Russie a parallèlement annoncé qu’elle pourrait ne pas reconduire le corridor alimentaire à partir du 18 mai, ce qui accentuerait la tension sur l’accès aux matières premières agricoles. La suite, vue par les spéculateurs, est un monde rose bonbon d’ultra-profits. Car le Maghreb fait déjà face à la sécheresse et anticipe une récolte catastrophique en 2023. Quelle meilleure situation pour des spéculateurs ? Ils ont vendu leurs participations à haut prix fin 2022 après avoir fait le maximum de profits, ont attendu patiemment dans l’ombre que les cours baissent le plus possible. Maintenant que les signes de nouvelles tensions alimentaires mondiales émergent, ils vont racheter à très bas prix ce qu’ils avaient vendu très cher, pour profiter une nouvelle fois de l’envolée des cours que provoquera la peur. La logique est la même chez les quatre plus grands négociants, qui maîtrisent plus de 80% des stocks mondiaux : Archer Daniels Midland (ADM), Bunge, Cargill et le groupe Louis Dreyfus entretiennent volontairement le flou sur le niveau de leurs stocks et attendent le bon moment pour vendre… plus cher.
Ce qui broie le blé mondial n’est donc plus la meule de pierre d’un moulin mais les rangées de dents acérées de spéculateurs sans vergogne, pariant sur la faim comme on parie sur un cheval. Leurs experts et analystes savent deux choses : la première est que l’insécurité alimentaire est une situation de plus en plus fréquente. La deuxième est que les crises créent de la peur, et que la peur donne toujours des occasions de faire les poches des plus faibles. Voilà à nu ce capitalisme financier, mondialiste et inhumain, qui permet à l’extrême-gauche de proposer, pour le remplacer, l’inhumanité du communisme. La libre entreprise, le localisme qui créent la valeur et le partage, ceux pour qui le profit suffisant est celui qui permet de vivre dignement, se retrouvent coincés entre ces deux mâchoires de fer – l’avidité sans bornes des banquiers d’un côté, la volonté du communisme de détruire l’humanité de l’autre.
Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.
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