Selon des experts en affaires étrangères, en atteignant la parité nucléaire avec les États-Unis, le régime chinois pourrait être plus enclin à s’engager dans la coercition internationale et les conflits armés en Asie de l’Est.
De fait, les États-Unis et la Chine entrent dans un équilibre de « vulnérabilité nucléaire mutuelle », selon Caitlyn Talmadge, chargée de recherche pour la Brookings Institution, un think tank basé à Washington.
« Si aucun des deux camps n’a l’intention d’utiliser ses armes nucléaires en raison de l’état de vulnérabilité mutuelle, il ne reste que l’équilibre conventionnel des forces », a expliqué Mme Talmadge.
« Et je pense que beaucoup diraient que, dans la région, l’équilibre conventionnel des forces ne semble pas très favorable aux États-Unis et à leurs alliés. »
Mme Talmadge a fait ces remarques lors d’un webinaire de la Brookings Institution sur la stabilité stratégique, le 17 novembre. Le webinaire s’est déroulé deux jours après l’annonce de la Maison Blanche sur la poursuite de pourparlers entre le président Joe Biden et le secrétaire général du Parti Xi Jinping sur la stabilité stratégique.
Les commentaires de Mme Talmadge reflètent les préoccupations croissantes des départements liés à la défense et la sécurité. Les efforts déployés par le PCC pour moderniser son armée et développer 1 000 ogives nucléaires d’ici 2030 soulèvent les inquiétudes. Avec un arsenal nucléaire renforcé, l’armée chinoise, selon le Pentagone, pourrait contraindre les États-Unis et leurs alliés à ne plus pouvoir intervenir dans les conflits qu’elle déclenche.
Un paradoxe fatal
Un récent rapport de la Commission d’examen de l’économie et de la sécurité des États-Unis et de la Chine, un organe consultatif du Congrès, a clairement exposé ce problème, communément appelé « le paradoxe de la stabilité/instabilité » en théorie des relations internationales.
Le paradoxe soutient que deux nations dotées de capacités nucléaires similaires se dissuaderont efficacement l’une l’autre, écartant une guerre nucléaire par crainte d’une destruction mutuelle assurée, ce qui crée la stabilité.
Mais, si aucune des deux parties ne peut réellement mettre à profit ses armes nucléaires, la probabilité que ses nations se livrent à une guerre conventionnelle ou à des conflits indirects augmente, ce qui génère de l’instabilité.
« L’arsenal nucléaire croissant de la Chine pourrait l’encourager à poursuivre la coercition ou l’agression conventionnelle contre les alliés et partenaires des États-Unis si les dirigeants chinois pensent que leur arsenal nucléaire peut dissuader les Américains d’intervenir au nom de ces pays », indique le rapport.
Ainsi, selon Mme Talmadge, le fait qu’« aucun des deux camps ne puisse protéger sa population d’une attaque nucléaire venant [du camp adverse], peu importe qui attaque en premier », pourrait permettre à la Chine de s’engager dans de nouvelles agressions et coercitions en Asie. Sa crainte de la pression nucléaire américaine s’estompe toujours davantage.
Pour Patricia Kim, chargée de recherche à Brookings, la diplomatie va devenir indispensable désormais. À ce titre, elle a salué le premier sommet Biden-Xi au début du mois. Il s’agit, selon elle, d’un pas en avant significatif bien qu’il n’y ait eu aucun progrès immédiat.
« Il a été noté que les deux chefs d’État ont parlé de la nécessité de mettre la stabilité stratégique à l’ordre du jour des deux côtés », a déclaré Mme Kim. « Je vois cela comme un bon signe, et j’espère que nous verrons plus de progrès à ce sujet. »
« La bonne nouvelle est qu’il y a une reconnaissance à la fois à Washington et à Pékin que ce n’est pas une voie à suivre pour les relations entre les États-Unis et la Chine d’être en chute libre, et que nous avons besoin de plus de dialogue au niveau dirigeant-dirigeant, à un niveau [où le dialogue] fonctionne, pour prévenir les conflits », a déclaré Mme Kim.
Mme Kim a également noté qu’il serait judicieux que les deux nations collaborent au-delà d’une simple prévention de conflits entre elles. Si elles s’avèrent capables d’y arriver, elles pourraient joindre leurs efforts, par exemple, pour dénucléariser la Corée du Nord.
D’autres participants se sont montrés moins optimistes quant aux résultats de cette rencontre.
« Il n’y a aucun mal à avoir ces conversations et à s’engager », a déclaré Tom Wright, chercheur principal de Brookings. « Je ne serais simplement pas trop optimiste quant à la possibilité que cela mène où que ce soit. Je pense que ce sur quoi nous devons concentrer nos efforts, même si nous nous engageons dans cette voie, c’est d’essayer d’assurer un équilibre stabilisé des forces, à la fois au niveau nucléaire et au niveau conventionnel. »
Le soutien américain envers Taiwan menacé par l’expansion nucléaire
M. Wright a déclaré que l’expansion nucléaire du régime visait, du moins en partie, à faire pression sur les États-Unis pour les écarter en cas de conflit potentiel avec Taïwan, que la Chine considère comme une province sécessionniste.
« Ce développement nucléaire s’inscrit dans le cadre d’un effort plus vaste de la Chine, que nous verrons probablement se déployer dans les années à venir, pour accroître la vulnérabilité des États-Unis d’une manière plus générale », a indiqué M. Wright.
« Il est conçu, du moins en partie, pour qu’en cas de conflit à propos de Taïwan, ce ne soit pas seulement quelque chose qui se passe là-bas », a ajouté M. Wright. « C’est quelque chose qui pourrait potentiellement se produire ici, aux États-Unis aussi. »
L’une des préoccupations qui a suscité des discussions au sein du groupe est la possibilité d’un blocus de Taïwan par le PCC, dont la menace a été récemment décrite dans un rapport du ministère taïwanais de la Défense nationale. Le manque apparent d’options à disposition des Etats-Unis pour contrer une telle action a suscité une certaine frustration.
« J’aimerais que les États-Unis disposent d’autres options que de devoir briser ce blocus par la force militaire brute dès le début comme seule réponse possible », a déclaré Michael O’Halon, le chercheur principal de Brookings.
Une telle réponse, selon M. O’Hanlon entraînerait divers scénarios redoutables. Soit les États-Unis devraient s’engager dans une guerre, qu’ils pourraient éventuellement perdre, soit ils seraient contraints d’intensifier le conflit direct contre la Chine continentale.
Ses conclusions sont similaires à celles du Center for a New American Security, un autre think tank basé à Washington. Le think tank avait essayé d’élaborer une stratégie américaine face à une hypothétique invasion chinoise de Taïwan sans que le conflit ne dégénère en guerre totale.
« Je n’apprécie aucun de ces scénarios », a déclaré M. O’Hanlon.
Selon M. O’Hanlon, les États-Unis devraient accélérer leurs efforts pour se préparer à une possible guerre économique, voire à une action militaire limitée dans l’océan Indien et le golfe Persique destinée à perturber les chaînes d’approvisionnement de la Chine.
Ces deux options exigent des États-Unis qu’ils diversifient rapidement leurs propres chaînes d’approvisionnement et qu’ils stockent des minéraux précieux et d’autres ressources qui seraient épuisées en temps de guerre.
M. Wright a convenu que les États-Unis doivent tout mettre en œuvre pour que Taïwan puisse survivre sous blocus et repousser efficacement une invasion.
« Il ne s’agit pas tant de punir la Chine que de s’assurer que ce blocus échoue », a-t-il conclu.
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