L’impossible union des droites en France ?

Par Ludovic Genin
12 juin 2024 17:47 Mis à jour: 21 octobre 2024 08:53

Alors que la gauche était unie au lendemain de l’annonce de la dissolution, quand la veille le PS et le PCF refusaient la main sur le cœur toute alliance avec LFI pour avoir mordu les lignes rouges de l’antisémitisme, la droite, elle, se déchire autour du RN, grand gagnant des élections, Reconquête ! et les LR.

Selon un sondage Harris Interactive-Toluna, si les élections législatives avaient lieu demain, le RN récolterait 34 % des voix, contre 18,7 % en 2022. Cela lui permettrait d’obtenir une majorité relative à l’Assemblée nationale, avec 235 à 265 députés, ce qui rendrait difficile au RN de gagner seul et d’obtenir une majorité absolue à 289 sièges sur 577.

Le « Front populaire », coalition des quatre partis de gauche anciennement Nupes (LFI, PS, écologistes, PCF), arriverait ensuite avec 22 % (contre 25,7 % en 2022) des intentions de vote (115 à 145 sièges), puis le parti du gouvernement, en troisième position, avec 19 % des intentions de vote (contre 25,8 % en 2022), pour 125 à 155 sièges, contre 249 avant la dissolution. En quatrième position, Les Républicains obtiendraient 9 % des intentions de vote, soit 40 à 55 sièges (contre 11,3 % en 2022 et 74 sièges), ce qui aurait permis en cas d’accord avec le RN d’avoir une majorité absolue au parlement.

Il s’agit bien sûr d’une projection avant le début de la campagne, les tractations à droite – fructueuses ou infructueuses – pouvant changer les choix des électeurs, voyant notamment un parti LR éclaté et divisé.

Eric Ciotti tente à ses risques et périls un rassemblement des droites

Le patron de LR Eric Ciotti a provoqué un séisme le 11 juin au sein de son parti en appelant à rejoindre le Rassemblement national, sans parvenir à entraîner avec lui d’autres dirigeants du parti. Le député des Alpes-Maritimes est ainsi devenu le premier dirigeant des LR à proposer un accord qui aurait été le premier de ce genre en France avec le RN.

Le président de LR, qui juge son parti « trop faible » pour s’opposer à la Macronie et au RN, a estimé que la droite avait besoin de cet accord pour préserver sa représentation à l’Assemblée nationale qui compte aujourd’hui 61 députés. Il a assuré être suivi par le président des jeunes LR Guilhem Carayon, candidat dans le Tarn, la n° 2 de la liste aux européennes Céline Imart et des « dizaines de parlementaires ».

Jordan Bardella a confirmé le 11 juin au soir un accord entre le Rassemblement national et Les Républicains pour les législatives, avec plusieurs dizaines de candidats LR qui seront investis ou soutenus, dont des députés sortants. Mais une consultation menée au sein du groupe LR n’a enregistré que deux votes favorables, celui de M. Ciotti et celui de sa collègue des Alpes-Maritimes Christelle D’Intorni, a précisé à l’AFP une source du parti.

Les Républicains, qui se sont effondrés sous la barre des 5 % à la présidentielle en 2022, ont été pris en étau entre la majorité macroniste, qui a multiplié les débauchages dans ses rangs, et le RN et Reconquête qui ont séduit nombre de leurs militants.

En réponse de son annonce d’un accord avec le RN, Eric Ciotti a été exclu des Républicains lors du bureau politique décisif qui s’est ouvert le 12 juin dans l’après-midi, où la quasi-totalité des dirigeants de LR ont plaidé pour la destitution du député des Alpes-Maritimes.

« Je suis et reste le président de notre formation politique, élu par les adhérents », a réagi Eric Ciotti après son exclusion des Républicains par un bureau politique de son parti, auquel il ne participait pas et dont il conteste la validité de sa tenue.

« La réunion organisée cet après-midi a été mise en œuvre en violation flagrante de nos statuts. Aucune des décisions prises à cette réunion n’emporte de conséquence légale. Elle peut avoir des conséquences pénales », a écrit le député des Alpes-Maritimes sur le réseau social X, alors que les cadres de LR ont de leur côté confié la « gouvernance » de leur mouvement à Annie Genevard et François-Xavier Bellamy.

Pas d’accord avec Reconquête ! 

Avant cette crise politique au sein de LR, le RN avait mis de côté un accord avec le parti Reconquête! d’Eric Zemmour. Les « discussions » entre Reconquête et le Rassemblement national « n’ont pas abouti », avait reconnu le 11 juin Jordan Bardella, au lendemain d’une rencontre avec Marion Maréchal. La tête de liste Reconquête! aux élections europénnes avait déploré dans un communiqué « un changement de position » du RN qui « refuse le principe même d’un accord ».

La veille, l’entretien qu’elle avait réclamé avec M. Bardella et Marine Le Pen avait pourtant été jugé « positif », d’autant que le président du Rassemblement national avait affirmé à son issue que sa concurrente d’hier aux européennes avait « fait preuve durant toute la campagne d’une démarche et d’une attitude constructive à l’égard du Rassemblement national ».

Le 11 juin au matin, Eric Zemmour avait pour sa part appelé sur CNews « à LR de M. Ciotti, au Rassemblement national de Marine Le Pen et de Jordan Bardella », en prônant « un immense, un grand, un magnifique rassemblement de nos trois partis pour que nous puissions gagner ces élections législatives ». « Il faut l’union », a-t-il encore martelé, reconnaissant « des désaccords profonds » avec le RN et LR, « mais la démocratie, c’est assumer ses désaccords », a-t-il fait valoir. En ajoutant se mettre de côté des législatives pour permettre ce rassemblement : « Je ne demande rien pour moi, absolument rien », « ni circonscription, ni même évidemment poste ministériel », a-t-il répété.

Le 12 juin, sur sa page personnelle, le président de Reconquête écrivait que « les instances de Reconquête sont prêtes à reprendre langue avec le Rassemblement national pour avancer. »

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