Après les fuites du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) et les révélations récentes dans les médias canadiens, le Canada semble se diriger rapidement vers un point de non-retour. Il semble essentiel de saisir comment les opérations d’influence chinoises fonctionnent et de s’assurer du maintien de l’ordre par des politiques solides, autrement, il ne sera plus facile de s’y opposer.
Tout récemment, les nouvelles ont présenté l’ingérence de la Chine dans les élections canadiennes. Ce n’est pas nouveau. Une commission parlementaire s’était penchée sur les élections fédérales de 2019, puis, lorsqu’il a été noté que l’ingérence s’était élargie, les travaux ont été étendues aux élections de 2021. Depuis, des informations détaillées sur les activités, apparemment longtemps cachées au public, ont créer une opportunité vitale de s’intéresser à la question.
Un peu plus tôt, la présence de « stations-service » de police chinoise à l’étranger, dont au Canada, avait aussi fait la une des journaux et, à mesure que d’autres stations ont été découvertes, les unes après les autres, cela suscité l’indignation publique.
En vrai, cela ne fait qu’effleurer la surface. La cooptation systématique de médias de langue chinoise, autrefois indépendants, est un développement qui n’a reçu que peu ou pas d’attention. Ce phénomène mondial, étudié en détail pour la première fois par le Financial Times en 2020, représente une autre opération d’influence au Canada.
On peut constater que les communautés actives de la diaspora chinoise à travers le monde disposent d’une myriade de médias locaux (télévision, radio et presse écrite), et même s’ils ne sont pas de nature politique, on peut penser qu’ils étaient certainement très indépendants. Cette époque est révolue, depuis longtemps, en Australie, une cible privilégiée, on estime que 95 % des médias locaux ont été cooptés depuis 2020 et qu’ils diffusent déjà la propagande officielle chinoise. Le Canada, les États-Unis et l’Europe ont aussi été visés par des campagnes similaires.
De même, le rôle des instituts Confucius ou les liens entre les ambassades et les consulats et les groupes d’étudiants chinois locaux dans les universités canadiennes font la une des journaux, mais ils ne sont que rarement étudiés en détail. Il est bien connu que les groupes d’étudiants sont contrôlés par les mêmes entités. Un étudiant chinois, fatigué de la propagande constante provenant du principal groupe d’étudiants en Amérique du Nord, la Chinese Students and Scholars Association, avait décidé de créer sa propre association qui soit entièrement sociale et non politique. En peu de temps, le consulat avait été informé de ses projets, et d’un coup de fil toute l’initiative est tombée à l’eau.
En Suède, des révélations récentes ont montré que les étudiants originaires de Chine, qui faisaient un doctorat, devaient signer un accord avec le Conseil des bourses d’études chinoises, géré par l’État, avant d’entreprendre leurs fonctions. Les étudiants devaient jurer de rester fidèles au Parti communiste chinois et de servir les intérêts de l’État, faute de quoi les parents et les membres de leur famille en Chine pouvaient être pénalisés. Par ailleurs, le directeur d’un institut Confucius en Belgique a récemment été expulsé après avoir tenté de recruter des espions pour la Chine.
Tous ces exemples ont une influence directe sur les élections, les opérations de maintien de l’ordre, jusqu’au contrôle des associations d’étudiantes, des entreprises et de la ligne éditoriale de médias locaux, le tout se complète par l’espionnage des réfugiés, comme l’ont montré des événements récents en Suède et au Royaume-Uni. À cela, s’ajoutent les opérations soutenues par les ambassades chinoises pour traquer les prétendus fugitifs par la police chinoise via l’opération Fox Hunt, dont une récente accusation du gouvernement américain a démontré que cela avait été mené de manière flagrante en sol canadien.
L’ampleur des opérations, le nombre d’entités variées affiliées à l’État et au Parti responsables et la forme de ses opérations sont autant d’éléments rendant leur recensement laborieux.
La police du gouvernement central, les juridictions policières locales, les instituts Confucius, les associations commerciales et culturelles, les associations étudiantes, le ministère chinois de la Sécurité d’État, les ambassades et les consulats ne sont que quelques-unes des entités impliquées. Les entités du PCC placées sous l’égide du Département du Front uni du travail, dont l’objectif est de surveiller, d’orienter l’opinion et de contrôler les groupes de la diaspora chinoise dans le monde entier, sont peut-être bien plus importants et d’une portée bien plus vaste qu’on puisse l’imaginer.
Prenons la question récente des « stations » de police chinoise à l’étranger. Ces postes sont établis grâce à la police locale chinoise, mais c’est leur établissement qui est important, auquel on n’a pas prêté beaucoup d’attention. La police locale identifie premièrement une association commerciale ou culturelle en sol canadien, dans un secteur avec une importante diaspora chinoise. Elle convainc ensuite l’association d’établir un « poste de service » étranger en son nom, puis de travailler sous le commandement d’une section de police chinoise. Qu’ils établissent un bureau physique avec des panneaux et des plaques (rare, mais cela s’est produit dans certains pays) ou qu’ils se contentent d’établir un numéro de téléphone lié par l’intermédiaire d’un magasin, ou d’un restaurant chinois du coin, cela n’a pas vraiment d’importance.
Ces associations sont censées être enregistrées et déclarer leur but et leur mission, mais bien sûr, aucune ne le fait. Elles sont enregistrées oui, mais pas pour ce rôle, ni pour maintenir une relation directe avec une entité policière chinoise outremer.
En substance, presque toutes les entités liées à l’État chinois ou le Parti communiste chinois, que leurs liens soient officiels ou non, agissent en tant qu’agents étrangers, et ce, sans aucune restriction ni risque de sanction. Si l’on ne comprend pas le fonctionnement de l’État chinois, il pourra poursuivre, s’étendre, et ce, sans être démasqué ou puni. Et la réponse canadienne n’aura pas seulement un impact sur le Canada, mais des conséquences importantes pour d’opérations similaires dans d’autres démocraties.
À mesure que le public canadien prendra conscience de l’ampleur et de la complexité des opérations d’influence chinoises, il sera idéal d’éviter une chasse aux sorcières, ce qui s’avérerait contraire aux traditions démocratiques canadiennes. Bien sûr, la police et le SCRS doivent disposer de plus de ressources et d’un champ d’action plus large pour enquêter sur les cas spécifiques et leurs implications ; toutefois, le gros du travail à accomplir se situe ailleurs.
Pour éviter une politisation de la question, et de créer une chasse aux sorcières, le gouvernement Trudeau doit établir des règles administratives claires s’appliquant à tous les acteurs d’États (et des partis) étrangers, et doter les organismes de réglementation pertinents du pouvoir – et d’une épine dorsale – pour appliquer ces règles, et ce, de manière cohérente. Une application cohérente est essentielle au maintien de l’engagement ferme du Canada envers la primauté du droit.
L’obligation de tenir un registre d’agents étrangers serait un bon début, si on peut l’assortir de sanctions claires et sévères. Une autre bonne mesure serait de donner plus de pouvoirs à l’organisme de réglementation chargé de maintenir l’enregistrement des associations et des fondations, afin de pénaliser celles qui opèrent en dehors de leur mission déclarée, voire de les fermer. Exiger une enquête sur le développement des activités des médias chinois au Canada en est une autre, alors que l’organisme de réglementation de la radiodiffusion et des télécommunications, le CRTC, celui qui traite avec les principaux réseaux chinois CCTV et CGTN, doit recevoir un soutien politique adéquat pour appliquer réellement les règles existantes.
Une étude détaillée commandée par le Parlement trouvera de nombreux détails sur la façon dont ces opérations chinoises fonctionnent, et la clé pour le gouvernement sera de trouver des moyens de les contrer dans des cadres réglementaires et des organes de surveillance établis, fonctionnant selon des règles claires, avec le pouvoir de combattre réellement l’interférence.
Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.
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