Le président français Emmanuel Macron a pour la première fois ordonné une opération militaire d’envergure en décidant de mener des frappes, avec Washington et Londres, contre le régime syrien de Bachar al-Assad dans la nuit de vendredi à samedi.
« Nous ne pouvons tolérer la banalisation de l’emploi d’armes chimiques », a annoncé le chef de l’État, peu après l’annonce que de fortes explosions avaient été entendues samedi avant l’aube dans la capitale syrienne Damas survolée par des avions.
Cette décision fait suite à une intense activité diplomatique déployée ces derniers jours par Emmanuel Macron, qui a multiplié les entretiens téléphoniques, notamment avec ses homologues américain Donald Trump et russe Vladimir Poutine.
Pour le chef de l’État, « les faits et la responsabilité du régime syrien ne font aucun doute » concernant la mort « de dizaines d’hommes, de femmes et d’enfants » dans une attaque « à l’arme chimique » le 7 avril à Douma.
« La ligne rouge a été franchie »
« La ligne rouge fixée par la France en mai 2017 a été franchie. J’ai donc ordonné aux forces armées françaises d’intervenir cette nuit, dans le cadre d’une opération internationale menée en coalition avec les États-Unis d’Amérique et le Royaume-Uni et dirigée contre l’arsenal chimique clandestin du régime syrien », précise-t-il dans un communiqué diffusé dans la nuit.
Le président a ensuite publié sur Twitter des messages en français, anglais et arabe avec une photo le montrant en train de présider une réunion à l’Elysée avec la ministre de la Défense Florence Parly et ses principaux conseillers diplomatiques et militaires.
Le ministère de la Défense et l’Elysée ont également diffusé une vidéo montrant des Rafale décoller dans la nuit pour aller mener les frappes.
Ils n’ont pas précisé quels moyens militaires avaient été mobilisés pour cette opération qui est « circonscrite aux capacités du régime syrien permettant la production et l’emploi d’armes chimiques », selon l’Elysée.
Le chef de la diplomatie Jean-Yves Le Drian et Mme Parly devaient faire une déclaration à 07H00 depuis l’Elysée.
La France dispose de bases aériennes en Jordanie et des Émirats Arabes unis, et peut aussi faire décoller ses Rafale de son territoire national. Ces appareils peuvent être armés de missiles de croisière Scalp, d’une portée supérieure à 250 km.
Le Parlement informé
Près d’un an après son élection, Emmanuel Macron endosse ainsi pour la première fois ses habits de chef de guerre pour ordonner une opération, après avoir hérité de celles contre les jihadistes au Levant ( intervention militaire de la France dans la guerre civile irakienne contre l’État islamique, Chammal) et au Sahel ( opération militaire française dans la région du Sahel en Afrique, Barkhane).
Il n’avait guère laisser planer de doutes sur ses intentions de réagir militairement après l’attaque du 7 avril qui correspondait, selon lui, aux « lignes rouges » qu’il avait fixées, à savoir une attaque chimique présentant un caractère « létal » et pour laquelle la responsabilité du régime était « avérée ».
Il avait fixé ces lignes rouges fin mai 2017 lors d’une conférence de presse à Versailles avec son homologue russe Vladimir Poutine, allié du régime d’Assad.
Le communiqué publié samedi par l’Elysée précise que « la France et ses partenaires reprendront, dès aujourd’hui, leurs efforts aux Nations unies pour permettre la mise en place d’un mécanisme international d’établissement des responsabilités, prévenir l’impunité et empêcher toute velléité de récidive du régime syrien ».
« Depuis mai 2017, les priorités de la France en Syrie sont constantes : terminer la lutte contre Daech, permettre l’accès de l’aide humanitaire aux populations civiles, enclencher une dynamique collective pour parvenir à un règlement politique du conflit, afin que la Syrie retrouve enfin la paix, et veiller à la stabilité de la région », insiste-t-il avant d’ajouter: « je poursuivrai ces priorités avec détermination dans les jours et les semaines à venir ».
Le chef de l’État annonce aussi que, conformément à la Constitution, « le Parlement sera informé et un débat parlementaire sera organisé, suite à cette décision d’intervention de nos forces armées à l’étranger ».
Plusieurs responsables de l’opposition avaient exprimé leur inquiétude ces derniers jours
Le vice-président des Républicains, Guillaume Peltier, avait indiqué jeudi « faire confiance » à Emmanuel Macron à propos des preuves de l’utilisation d’armes chimiques, tout en l’exhortant à être « prudent » et à « ne pas placer la France dans la roue des États-Unis ».
Marine Le Pen du Front National (FN) a dit craindre jeudi qu’Emmanuel Macron ne veuille, en décidant de frappes contre le régime de Bachar al-Assad, « sa petite guerre ».
Pour Jean-Luc Mélenchon de La France Insoumise (LFI), la France n’a « aucune raison de participer à des actions de représailles qui, en définitive, n’ont aucun sens dans le contexte actuel ».
D.S avec AFP
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