Une semaine décisive s’ouvre sur le front du remaniement gouvernemental, dont le coup d’envoi pourrait être donné dès lundi par Emmanuel Macron qui, toujours en quête de la bonne formule pour Matignon, entend inaugurer une séquence plus large sur le « réarmement » du pays.
Après de vastes consultations et un week-end à phosphorer, le chef de l’État est-il prêt à appuyer sur le bouton ? Ses proches avaient fait savoir sa volonté d’agir rapidement : « Je sais qu’il est très pressé. Il rêverait de faire cela lundi », a ainsi affirmé l’un de ses fidèles, en employant toutes les réserves d’usage liées à la complexité des équations.
Rien n’a filtré pour l’heure des décisions de M. Macron, marmoréen, qui n’aime rien tant que « garder toutes les options ouvertes jusqu’au dernier moment », selon ce même familier du Palais.
Lundi, le président a prévu ses traditionnels vœux au Conseil constitutionnel puis aux autorités religieuses dans l’après-midi. De son côté, le ministre du Logement, Patrice Vergriete, doit effectuer des annonces notamment pour l’hébergement d’urgence.
Suspense sur le destin d’Élisabeth Borne
Mais le suspense plane en particulier sur le destin d’Élisabeth Borne après 20 mois de bail à Matignon. Le président a reçu sa Première ministre dimanche soir, officiellement pour « évoquer un certain nombre de dossiers importants comme les intempéries dans le Pas-de-Calais et l’arrivée de la vague de froid », a fait savoir l’entourage du chef de l’État.
Comme si de rien n’était, donc, après avoir déjà laissé sa Première ministre dans l’expectative lors d’un déjeuner en tête-à-tête mercredi. Déjà donnée partante l’été dernier, Mme Borne a pour atout sa résilience après avoir fait passer deux lois difficiles (retraites, immigration) et surmonté près d’une trentaine de motions de censure à l’Assemblée.
Mais que restera-t-il de ce crédit alors que l’attention s’est concentrée sur le match entre deux candidats potentiels à sa succession : Julien Denormandie, 43 ans, marcheur de la première heure et quasiment ombre portée du chef de l’État depuis dix ans ; et Sébastien Lecornu, 37 ans, actuel ministre des Armées issu de LR, qui s’est au fil des années taillé une place dans le cercle des conseillers politiques du président.
De quoi rejouer les éternels débats au sein de la majorité entre les macronistes historiques, venus plutôt des rangs de la gauche et apôtres du dépassement, et les ralliés de droite, qui avec Édouard Philippe et Jean Castex se sont hissés à deux reprises déjà à Matignon.
« Je pense qu’un changement est nécessaire » dans l’architecture gouvernementale, a en tout cas avancé dimanche le patron du MoDem, François Bayrou, en semblant accorder sa préférence à M. Denormandie, « quelqu’un de très estimable ». Ce pilier de la majorité a aussi rappelé qu’un nouveau « visage, c’est un message ». « Et pour moi, ce qui m’importe, c’est le message », a-t-il lancé.
Car Emmanuel Macron compte inscrire ces mouvements dans une séquence plus large, ouverte depuis ses vœux du 31 décembre, qui doit se prolonger notamment par un énigmatique « rendez-vous avec la nation » programmé en janvier.
« L’accent sur le réarmement »
Avec un fil conducteur, à l’heure où ce deuxième quinquennat Macron se cherche encore un récit : « l’accent sur le réarmement », affirme un proche. À savoir le « réarmement civique », notamment grâce à l’école, « le réarmement industriel », ou encore le « réarmement européen » à l’approche des prochaines élections pour lesquelles la majorité présidentielle est largement distancée dans les sondages par le Rassemblement national.
Au-delà, Emmanuel Macron joue en 2024 une partie de son aura sur la réussite des Jeux olympiques, qui doivent consacrer la « fierté française ». De quoi rendre le président « assez déterminé à un grand mouvement y compris en changeant de Premier ministre », estime-t-on de même source.
Cela devrait se traduire par « beaucoup de sortants » au sein de l’équipe actuelle. Plusieurs membres de la garde rapprochée du chef de l’État, dont M. Bayrou, appellent également à profiter de l’occasion pour resserrer un gouvernement qui compte aujourd’hui 39 membres.
Une gageure alors qu’il faut respecter la parité, veiller à servir les alliés d’Horizons et du MoDem, et ne pas braquer certains secteurs soucieux d’avoir un ministre pour les représenter. « Et c’est comme ça qu’à la fin, ça prend trois semaines et on finit à 48 », ironise un proche du chef de l’État.
Les réactions de Pannier-Runacher, Maillard, Glucksmann, Guedj
Un choix loin d’être neutre pour maintenir l’équilibre précaire du camp présidentiel, mis à mal dernièrement par la loi immigration. Si le patron des députés Renaissance, Sylvain Maillard, a assuré sur LCI que ses troupes « travailleront en toute loyauté » avec le prochain Premier ministre, d’autres redoutent un coup de barre à droite.
Comme la ministre de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher, attachée au « dépassement » du macronisme initial, qui a estimé sur franceinfo que « sortir l’aile gauche de la majorité, ce serait faire le jeu des oppositions ».
? Remaniement ➡️ « Ce n’est pas à l’ailier gauche de dire comment doit être la feuille de match du prochain match ou qui est le capitaine”, juge Agnès Pannier-Runacher. “Ce qu’a fait le président depuis 7 ans, c’est le dépassement.” #8h30franceinfo pic.twitter.com/ngg1yRMxVG
— franceinfo (@franceinfo) January 8, 2024
À quoi bon s’encombrer puisque « le Premier ministre, ce sera Emmanuel Macron », tout comme « son ministre des Affaires étrangères », celui de la Défense ou encore de la Culture, a ironisé sur France 2 le candidat de gauche aux européennes Raphaël Glucksmann, dénonçant la « dérive personnelle du pouvoir » du chef de l’État.
« Tout le monde s’en fout du remaniement », a même affirmé son collègue socialiste Jérôme Guedj sur franceinfo, critiquant le « marketing politique » de l’exécutif qui « feuilletonne une histoire de casting » alors que « le problème de ce gouvernement, c’est que le scenario est nul ».
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