Emmanuel Macron va s’adresser mercredi aux Français lors d’une interview télévisée très attendue, pour tenter d' »apaiser » la colère contre sa réforme des retraites adoptée au forceps et d’expliquer comment il entend surmonter cette crise sans changer son gouvernement ni s’en remettre aux électeurs.
Le chef de l’État, en retrait depuis janvier sur le dossier des retraites, répondra à 13H00, en direct à l’Élysée, aux journalistes Marie-Sophie Lacarrau de TF1 et Julian Bugier de France 2, à la veille d’une nouvelle journée de mobilisation syndicale jeudi et alors que les manifestations parfois émaillées de tensions se sont poursuivies dans le pays.
À Paris, un face-à-face tendu avec échanges de jets de projectiles et de gaz lacrymogène a opposé mardi soir, quelques centaines de personnes aux forces de l’ordre place de la République. Quarante-six personnes ont été interpellées. D’autres cortèges ont eu lieu à Lille ou à Grenoble, ainsi qu’à Rennes et à Nantes, où des tirs de gaz lacrymogène ont été recensés, ainsi que des dégradations en marge du cortège. Plusieurs dépôts pétroliers restaient par ailleurs bloqués. Des incidents ont éclaté mardi à Fos-sur-Mer, près de Marseille, où les autorités ont procédé à des réquisitions de personnel en grève au moment où 12% des stations-services du pays sont à court d’essence ou de gazole.
Face à ces tensions, Emmanuel Macron a appelé mardi le gouvernement à « apaiser » et « écouter les colères », tout en assumant ses choix, selon des participants à une réunion avec les parlementaires de son camp au terme d’une journée d’intenses consultations. « La foule, quelle qu’elle soit, n’a pas de légitimité face au peuple qui s’exprime souverain à travers ses élus », a-t-il toutefois mis en garde. « Pas de dissolution, pas de remaniement, pas de référendum », a-t-il dit selon un participant.
Un passage en force qui a ravivé la contestation
Malgré l’adoption définitive lundi, par le Parlement de sa réforme phare, l’ensemble des syndicats et la quasi-totalité des oppositions continuent de réclamer son retrait, vent debout contre le report de l’âge légal de la retraite de 62 à 64 ans. Le recours à l’article 49.3 de la Constitution pour faire passer le texte sans vote a ravivé la contestation, d’autant qu’il a été suivi d’une motion de censure contre le gouvernement rejetée de seulement neuf voix. Privé de majorité absolue depuis les législatives de juin, Emmanuel Macron n’a pas pu compter comme il l’espérait, sur les retraites, sur le soutien total des députés Les Républicains.
Emmanuel Macron « a mis le feu et fermé toutes les issues » en « passant en force », a dénoncé l’insoumis Jean-Luc Mélenchon, tandis que la patronne des députés Rassemblement national Marine Le Pen a prévenu dans un entretien à l’AFP que le président avait seul « les clés d’une crise politique qu’il a créée ».
Temporiser sans faire d’annonces fortes
Dans l’immédiat, le président a demandé à ses troupes de faire « d’ici deux à trois semaines » des « propositions » en vue d’un « changement de méthode et d’agenda des réformes », ce qui pourrait lui permettre de temporiser sans faire d’annonces fortes ce mercredi. Il avait déjà annoncé une « méthode nouvelle » au début de son nouveau mandat, sans résultat probant à date.
Mardi soir, il a aussi promis d’ « avancer » sur « la santé, l’école et l’écologie » tout en organisant « la société du plein-emploi ».
« Où va-t-on, comment on fait, qu’est-ce qu’on change ? « , veut savoir une députée de l’aile gauche du parti présidentiel Renaissance, qui prévient : « seul contre tous, c’est une erreur ». Plusieurs voix l’incitent à « parler aux Français qui bossent », « du pouvoir d’achat », mais aussi de promettre de meilleures conditions de travail et rémunérations. Mais d’autres mettent en garde contre de nouvelles dépenses.
« L’immobilisme n’est pas une option, c’est la garantie du déclassement », prévient Édouard Philippe.
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