Le colonel Assimi Goïta doit réunir les acteurs politiques et civils maliens vendredi après-midi à Bamako, occasion de préciser ses intentions après avoir repris toutes les rênes du pouvoir dans un deuxième coup de force en neuf mois.
L’homme fort du pays, déjà peu loquace, est resté silencieux en public sur ses plans de gouvernement après l’arrestation du président et du Premier ministre de transition lundi et l’annonce, par ses soins, de leur destitution autoritaire mardi.
Son conseiller spécial, le commandant Baba Cissé, a confirmé à un correspondant de l’AFP la tenue d’une réunion, un temps mise en doute, avec le monde politique et la société civile. Il n’a pas dit ce qu’il fallait en attendre.
Ramener les civils au pouvoir
Le colonel et son entourage ont préparé les esprits à ce qu’il assume la direction de la transition censée ramener les civils au pouvoir après le putsch du 18 août 2020 qui a fait d’Assimi Goïta l’homme fort d’un pays dans la tourmente depuis des années.
Dans le scénario le plus communément envisagé, le colonel choisirait un Premier ministre issu du Mouvement du 5-Juin, le collectif qui avait mené en 2020 des mois de contestation parachevés par le putsch d’août.
Mais, avec l’ancien président et l’ancien Premier ministre, ce sont les cautions civiles de la transition post-putsch qui ont été écartées. Ce qui s’apparente à un deuxième coup d’Etat en neuf mois a suscité une large réprobation internationale, le doute quant à l’engagement de rendre le pouvoir à des civils élus début 2020 et l’inquiétude quant à l’avenir de ce pays crucial pour la stabilité du Sahel, confronté à la propagation jihadiste parmi mille défis.
S’il confirme qu’il dirigera la transition, le colonel Assimi Goïta s’expose à des récriminations internationales plus vives encore, et des sanctions.
La France et les Etats-Unis, engagés militairement au Sahel, ont brandi la menace de mesures de rétorsion. La Communauté des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao), dont fait partie le Mali, en a aussi évoqué l’éventualité, par l’intermédiaire d’une mission dépêchée cette semaine au Mali.
Libéré les anciens président et Premier ministre
Si les militaires ont libéré les anciens président et Premier ministre, la Cédéao semble être repartie sans rien avoir obtenu quant au retour immédiat à une transition conduite par les civils, que l’organisation ouest-africaine et les principaux partenaires du Mali réclament.
Neuf mois après, les chefs d’Etat et de gouvernement de la Cédéao se pencheront à nouveau sur la situation du Mali dimanche au Ghana. Ce sommet extraordinaire sera consacré exclusivement au Mali, ont indiqué des diplomates ouest-africains sous le couvert de l’anonymat.
La Cédéao avait suspendu le Mali de tous ses organes de décision, fermé les frontières de ses Etats membres et stoppé les échanges financiers et commerciaux avec le Mali, à l’exception des produits de première nécessité, après le coup d’Etat perpétré par les mêmes colonels en août 2020.
Organiser des élections sous 18 mois
Elle avait levé les sanctions après la désignation d’un président et d’un Premier ministre civils et l’engagement d’organiser des élections sous 18 mois.
Ce sont ces mêmes président et Premier ministre qui viennent d’être démis cette semaine.
Cet énième soubresaut de l’histoire contemporaine malienne impose à la CEDEAO et à la communauté internationale des choix délicats.
Dans un pays économiquement exsangue, frappé de surcroît par la pandémie, les sanctions de 2020 avaient été ressenties comme un coup de plus à subir pour une population éprouvée.
Des sanctions ciblées visant les colonels sont largement évoquées, avec des interrogations sur leur efficacité.
La France déploie environ 5.000 soldats au Sahel
Différentes voix s’élèvent pour noter la différence de traitement entre le Mali et un autre pays sahélien, le Tchad, où un Conseil militaire de transition (CMT) de 15 généraux a pris le pouvoir le 20 avril après la mort d’Idriss Déby Itno, avec à sa tête un des fils de l’ancien président.
L’Union africaine s’était gardée de prendre des sanctions. Le président français Emmanuel Macron, dont le pays déploie environ 5.000 soldats au Sahel, s’était rendu aux obsèques du maréchal Deby et avait déclaré que « la France ne laissera jamais personne, ni aujourd’hui, ni demain, remettre en cause la stabilité et l’intégrité du Tchad ».
Comment pouvez-vous nous aider à vous tenir informés ?
Epoch Times est un média libre et indépendant, ne recevant aucune aide publique et n’appartenant à aucun parti politique ou groupe financier. Depuis notre création, nous faisons face à des attaques déloyales pour faire taire nos informations portant notamment sur les questions de droits de l'homme en Chine. C'est pourquoi, nous comptons sur votre soutien pour défendre notre journalisme indépendant et pour continuer, grâce à vous, à faire connaître la vérité.