Quinze après les faits, Mamadou Diallo a été condamné jeudi en appel à 16 ans de réclusion pour le meurtre d’une postière dans l’Ain, après avoir été acquitté en première instance, ultime rebondissement dans une affaire qui n’en a pas manqué.
Les jurés de la cour d’assises du Rhône ont estimé que Mamadou Diallo était coupable d’avoir tué volontairement Catherine Burgod, une femme de 41 ans retrouvée poignardée dans la petite agence postale de Montréal-la-Cluse (Ain) en décembre 2008, au cours d’un vol.
À l’annonce du verdict, après plus de trois heures de délibéré, l’accusé s’est longuement plongé la tête dans les mains. Sa famille et ses proches se sont effondrés dans la salle, manifestant leur désespoir. Mamadou Diallo est « victime d’une terrible erreur judiciaire », a dénoncé son avocate Me Sylvie Noachovitch. « On n’a pas appliqué la loi : la loi c’est que le doute doit bénéficier à l’accusé », a-t-elle réagi, annonçant que son client allait se pourvoir en cassation. Avec une peine largement inférieure aux réquisitions, elle estime que la décision a été prise « pour apaiser les victimes » « Il a fallu mettre un nom sur ce crime », selon elle.
Pour les parties civiles, c’est la fin d’un combat de quinze ans, a souligné leur avocat, Me Jean-François Barre. « On ne se satisfait jamais d’un homme qui part en prison. Le combat de la famille, c’était la culpabilité, la peine appartient à la société », a-t-il déclaré à l’issue du verdict.
Il « n’est pas un coupable par substitution qui vient par hasard »
« Je remets ma vie entre vos mains », avait lancé Mamadou Diallo, 34 ans, juste avant que les jurés ne se retirent. Lui, qui a toujours clamé son innocence avait été acquitté en 2022 « au bénéfice du doute » et son avocate avait plaidé pour le même épilogue. L’avocat général avait requis 30 ans de réclusion. « Monsieur Diallo n’est pas un coupable par substitution qui vient par hasard », a assuré Éric Mazaud, réitérant sa réquisition de première instance.
La défense dénonçait un dossier fragile. « Qui aujourd’hui peut dire qu’il n’a pas de doute ? », a-t-elle plaidé. « Il ne faut pas condamner un innocent pour assouvir le chagrin d’une famille », a-t-elle observé, soutenant une autre version des faits : celle de la culpabilité de l’acteur devenu marginal Gérald Thomassin, dont la célébrité avait participé à médiatiser le dossier.
L’avocat général avait consacré la première partie de son réquisitoire à « crucifier » cette hypothèse impliquant l’acteur, toxicomane notoire, qui habitait en face de l’agence postale et a longtemps fait office de « coupable idéal ». Primé pour son rôle dans un film de Jacques Doillon, Le Petit criminel, Gérald Thomassin avait été mis en examen après des déclarations troublantes et deux discussions téléphoniques en forme d’aveu.
Son ADN retrouvé sur la scène de crime
L’enquête avait toutefois pris une nouvelle orientation en 2017, quand de l’ADN retrouvé sur la scène de crime avait été identifié comme celui de Mamadou Diallo, après avoir été relevé dans une affaire de carte bleue volée finalement classée sans suite. Depuis son arrestation, ce dernier soutient avoir découvert le corps et volé une liasse de billets en quittant les lieux, « en état de choc », sans appeler les secours. Quant à Gérald Thomassin, il a disparu en 2019 avant de bénéficier d’un non-lieu.
Pour Me Noachovitch, l’« immaturité », la personnalité et la « honte » de son client rendent impossible le crime, contrairement à Gérald Thomassin qu’elle a décrit comme « déséquilibré » et ayant déjà fait l’objet de condamnations. Elle a fustigé un dossier qui « ne tient pas », pointant notamment que l’arme n’a pas été retrouvée et que l’ADN de M. Diallo n’était pas sur le corps de la victime. Elle a aussi invoqué un comportement cohérent avec un « choc traumatique ».
« La version du vol simple ne peut expliquer la réalité », a à l’inverse estimé l’avocat général. « Mamadou Diallo est le seul à laisser des traces de lui à des endroits incriminants ». Lors des six jours d’audience, la famille et les proches de celui qui avait retrouvé un emploi de brancardier ont dit leur conviction de l’innocence de ce jeune homme « gentil », « empathique », « jovial ». « Le braquage qui a mal tourné, ça arrive », a rétorqué l’avocat général.
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