Syndicats d’enseignants et de personnels municipaux, parents d’élèves, professeurs : tous regrettent le flou financier autour du plan de rénovation des écoles marseillaises du Président Emmanuel Macron, craignant que les enfants ne servent de « cobayes » dans son projet d’écoles laboratoires.
« Le sentiment qui prime, c’est une grosse déception. Les réponses sont trop floues sur la question de la rénovation du bâti », a réagi Hinda Bennour, de l’association « les minots de Saint-Charles », une école située dans un quartier pauvre derrière la gare, au lendemain de la présentation par le Président de la République du plan écoles.
Le 2 septembre, M. Macron a annoncé la mise en place d’une société pilotée par l’État pour financer des travaux sans préciser toutefois le montant que ce dernier est prêt à y consacrer. Dans la deuxième ville de France, 174 écoles sont jugées « indignes de la République » par le maire Benoit Payan. « On a été surpris qu’il n’annonce pas de montant. C’est un peu déroutant car si l’État finance à 20% ou à 80%, ce n’est pas la même chose », relève Séverine Gil du mouvement des parents d’élèves-13.
« On n’a pas envie de devenir des rats de laboratoires »
L’expérimentation dans 50 écoles « laboratoire » de la liberté pour des directeurs de choisir leurs enseignants, dès la rentrée 2022, a elle suscité la colère. « Le Président (Macron) répond en faisant des élèves marseillais des cobayes pour le laboratoire de la déréglementation de l’éducation nationale », a dénoncé la FSU13. Le syndicat pointe du doigt « une drôle de solution » misant sur un recrutement local dans « une ville gangrénée par le clientélisme ».
« On a des rats dans les écoles, on n’a pas envie de devenir des rats de laboratoires », avait indiqué dès jeudi le secrétaire départemental du syndicat d’enseignants Snuipp, Sébastien Fournier.
Même son de cloche du côté des parents d’élèves où l’on dénonce une « vision pathétique de l’école publique »: « L’école n’est pas une entreprise privée », fustige le président de la Fédération des parents d’élèves de l’enseignement public (Peep 13) Frédéric Muradour. « On aura une école à deux, trois, quatre vitesses suivant les arrondissements riches ou pauvres avec une rupture d’égalité », craint le parent d’élève.
L’absentéisme… « un cancer en phase terminale »
Cinglant, le chef de l’État a également condamné « l’absentéisme » et « les grèves perlées » en prévenant que l’État ne « vient pas investir pour en quelque sorte que certains prélèvent leur dîme », suscitant des avis plus nuancés.
« Il y a des recrutements mais ça ne suffit jamais puisque 40% des agents sont arrêtés, c’est un cancer en phase terminale qu’on a à Marseille, il faut le dire », admet Séverine Gil.
Pour assurer la continuité du service public dans les écoles et crèches, la municipalité a tenté en début d’année de conclure un accord avec certains syndicats (FO, CFE-CGC, CFDT et UNSA). Les agents doivent en théorie prévenir 48 heures à l’avance et exercer ce droit de grève dès leur prise de service et pas seulement juste pour une heure au milieu du service.
« Le problème de l’absentéisme du personnel municipal est réel mais c’est un gros problème de ressources humaines. Il faudrait revaloriser ces postes et proposer des perspectives de carrière », partage Frédéric Muradour de la Peep évoquant « l’enfer » des parents face aux grèves à répétition.
1 agent pour 60 enfants
L’année dernière, la grève des agents de cantine pendant un mois dans des écoles du centre-ville a contraint des parents à quitter leur travail en pleine journée.
Le patron du puissant syndicat FO, Patrick Rué, majoritaire à la ville, relève qu’il y a seulement « un agent pour 60 enfants sur le temps de cantine ». L’absentéisme record s’explique, selon lui, par le Covid-19 qui génère « 10 à 15% d’agents en autorisation spéciale d’absence ».
« Beaucoup de gens sont passés en annonçant des choses pour les écoles et presque rien ne change. Ce qu’il se passe dans certaines écoles, c’est juste symptomatique du mépris institutionnel pour nos élèves qui sont les victimes », fustige Marion qui a enseigné dans des écoles en Réseau d’éducation prioritaire.
« Ils s’en foutent, les politiques, que nos élèves se gèlent en hiver », conclut Marion, relevant qu’en parlant du recrutement des enseignants par les directeurs on élude le problème des conditions matérielles dégradées.
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