Un adolescent poignardé une cinquantaine de fois puis « brûlé vif », un chauffeur de VTC, père de famille, « froidement abattu » par un gamin de 14 ans : les narchomicides ont atteint « une sauvagerie inédite » cette semaine à Marseille dans le sud de la France.
Le procureur de la République de la ville, Nicolas Bessone, a souligné dimanche « un ultra-rajeunissement » des auteurs de ces homicides et une victime vendredi, le chauffeur de VTC, « totalement extérieure à tout trafic de stupéfiants », estimant qu' »un degré supplémentaire » avait été franchi.
Il y a « une perte totale de repères qui va faire que des jeunes garçons vont répondre à des annonces, pas pour aller faire les vendanges ou même pour vendre de la résine de cannabis sur un point de deal, mais pour aller ôter la vie d’autrui sans aucun remords, sans aucune réflexion », a insisté le magistrat. Et le « rôle des réseaux sociaux commence à nous questionner », a ajouté M. Bessone.
Déjà 17 morts depuis janvier
La police et la justice de la deuxième ville de France pensaient avoir tout vu en 2023 avec un nombre de morts record (49) et un rajeunissement extrême des petites mains des trafics, ces « jobbers » utilisés comme de la chair à canon par les têtes de réseaux comme la DZ Mafia ou Yoda.
Cette année, le conflit s’est cependant déplacé des quartiers nord vers le centre ville de la cité phocéenne, dans le 3e arrondissement, vers la Belle de Mai, un des quartiers les plus pauvres d’Europe. Et la DZ Mafia, qui avait pris l’ascendant sur Yoda, est désormais opposée au « clan dit des blacks de la cité Félix Pyat, notamment pour la prise de contrôle du point de deal de la cité du Moulin de Mai », a expliqué le procureur. La plupart des 17 narchomicides – terme forgé par la justice marseillaise pour qualifier les règlements de comptes sur fond de trafic de drogues – recensés par l’AFP depuis janvier sont liés à cette guerre, a affirmé le magistrat. Et la violence s’est accélérée cette semaine, avec deux nouveaux morts.
Deux jeunes de 14 et 15 ans recrutés pour des « contrats »
Mercredi, un jeune de 15 ans avait été recruté pour 2000 euros, via les réseaux sociaux, par un homme de 23 ans détenu près d’Aix-en-Provence (sud) et se présentant comme appartenant à la DZ Mafia. Supposé intimider un concurrent en mettant le feu à la porte de son appartement, l’adolescent a été repéré par une bande présente au pied de l’immeuble. S’en est alors suivi un acte d’une « sauvagerie inédite » : « il va être lardé de 50 coups de couteau et conduit à la cité Fonscolombes, où, selon les résultats de l’autopsie, il va être brûlé vif », a indiqué Nicolas Bessone.
Le même détenu, au « casier sérieux » mais « pas connu dans les radars pour être au sommet de la pyramide », tente alors de se venger. Il recrute, encore sur les réseaux sociaux, un autre jeune, âgé de 14 ans seulement, pour aller tuer un membre des « Blacks », pour 50.000 euros cette fois.
Un chauffeur de taxi abattu parce qu’il « n’obtempère pas »
Conduit dans une chambre d’hôtel, où il est rejoint par un autre adolescent, toujours en fuite, le candidat tueur commande un VTC pour aller exécuter son contrat. « Ils vont demander au chauffeur de les déposer et de les attendre, mais visiblement celui-ci « n’obtempère pas » et le mineur « lui tire une balle mortelle à l’arrière du crâne ». Nessim Ramdane, « footballeur émérite âgé de 36 ans, qui pour faire vivre sa famille avait également cette activité déclarée de chauffeur », est la première victime collatérale de l’année, souligne le magistrat.
Et le journal Midi Libre de préciser ainsi à propos de Nessim Ramdane : père de quatre enfants, il était très apprécié, notamment dans les clubs de football régionaux où il avait passé une grande partie de sa vie. Passionné de football depuis son enfance, il avait évolué dans divers clubs comme Endoume, l’Athlético de Marseille, Fos-sur-Mer, Carnoux, Saint-Zacharie et Six-Fours-les-Plages. Sa disparition tragique a profondément bouleversé le monde du football amateur. Nessim n’était pas seulement joueur, il s’investissait aussi en tant qu’éducateur, transmettant sa passion aux plus jeunes.
Fabrice Coulomb, le directeur sportif du Carnoux Football Club (CFC), a annoncé sur Facebook le « décès tragique » de cet « ancien joueur et éducateur du club », qu’il a décrit comme étant un homme « droit et respectueux, dont les valeurs ont toujours forcé l’admiration de ceux qui l’ont côtoyé ». « Nous avons une pensée émue et sincère pour toute sa famille, à qui nous présentons nos condoléances, et particulièrement à ses 2 garçons, eux-mêmes ayant porté les couleurs du CFC », a-t-il conclu.
Ce mardi 8 octobre, un hommage lui sera rendu à la mosquée de la Méditerranée, dans le 14e arrondissement de Marseille. « Il s’occupait d’enfants qui ont l’âge de celui qui l’a assassiné… C’est terrible », a déclaré Jean-Jacques Coulomb, le maire de Saint-Zacharie.
Le commanditaire lui même dénonce l’assassin
Autre élément paradoxal de ce dossier : c’est le commanditaire lui-même de ce contrat qui a appelé la police, au 17, pour dénoncer le jeune assassin, qui n’avait donc pas rempli sa mission, permettant son interpellation.
En garde à vue, le mineur âgé de 14 ans, placé en foyer depuis ses neuf ans avec des parents détenus dans des affaires liées aux stupéfiants, a reconnu avoir tiré sur le chauffeur, expliquant que le coup serait « parti accidentellement ». Dimanche soir il a été placé en détention provisoire dans le quartier pour mineurs d’une prison de la région.
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