ENTRETIENS EPOCH TIMES

Martin Garagnon : « Michel Barnier a été victime de ceux qui ne pensent qu’à 2027 »

décembre 6, 2024 17:16, Last Updated: décembre 6, 2024 17:36
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ENTRETIEN – Le porte-parole de Renaissance Martin Garagnon répond aux questions d’Epoch Times sur la censure du gouvernement Barnier.

Epoch Times : Le gouvernement de Michel Barnier est tombé mercredi à la suite de l’adoption d’une motion de censure. Quelles vont être, selon vous, les conséquences de la chute du gouvernement pour les Français ?

Martin Garagnon : Contrairement à ce que certains ont voulu nous faire croire, la chute du gouvernement va impacter la vie quotidienne de millions de Français.

L’adoption de cette motion de censure est intervenue dans le cadre du vote de la loi de financement de la Sécurité sociale. La santé et la couverture sociale des Français vont donc être directement touchées.

Puis, nos agriculteurs vont devoir encore attendre, alors que le texte de loi qui devait être voté était censé leur apporter des réponses. Il y a également les questions de l’indexation des retraites et du versement des pensions qui vont se poser.

D’ailleurs, le président a rappelé jeudi lors de son intervention qu’une loi spéciale sera déposée au Parlement, permettant au pays de ne pas être paralysé. Les conséquences de l’adoption de cette motion de censure sont donc bien réelles.

Michel Barnier n’a-t-il pas sous-estimé Marine Le Pen ?

Je ne suis pas sûr que Michel Barnier, qui est un fin négociateur, ait sous-estimé les difficultés. Il était la personne disposant d’un profil en capacité de les surmonter. Malheureusement, il n’a pas pu y parvenir. Mais ce n’est pas nécessairement de sa faute.

J’en ai entendu dans l’opposition affirmer que sa méthode n’était pas la bonne. Pourtant, Michel Barnier était dans une démarche de discussions et d’ouverture. Il a reçu à Matignon les représentants des différents partis et groupes parlementaires. Il n’a pas agité dès le départ, comme certains lui demandaient, la menace de l’article 49.3. Il a également su faire des compromis.

Mais en réalité, les dés étaient pipés depuis le départ, et en votant la motion de censure, Marine Le Pen a finalement révélé son jeu, celui des extrêmes, de l’instabilité, du chaos, et certainement pas celui de l’intérêt des Français.

Pour Michel Barnier, il n’y avait pas d’enjeu personnel depuis sa nomination à Matignon. Sa carrière politique est déjà faite. Il ne pensait pas tous les matins à la prochaine élection présidentielle. Il faisait partie de ces personnalités qui étaient capables de surmonter les ambitions individuelles des uns et des autres, pour proposer un projet au service des Français. Malheureusement, il a été victime de ceux qui ne pensent qu’à 2027 avant de penser au sort des Français.

Jeudi soir, Emmanuel Macron s’est adressé aux Français. Il a annoncé qu’il chargera le nouveau Premier ministre de former un « gouvernement d’intérêt général représentant toutes les forces politiques d’un arc de gouvernement ». Qu’a voulu dire le chef de l’État ?

Un gouvernement d’intérêt général, c’est ce que nous préconisons depuis le début. Autrement dit, le pays avant le parti ! C’est-à-dire que lorsque vous êtes député, vous êtes élu de la nation, pas de votre parti. Vous disposez donc d’un fragment de légitimité et de la souveraineté populaire. C’est cela qui doit guider les choix que vous faites à l’Assemblée.

Évidemment, nous ne sommes pas obligés d’être d’accord sur tout, mais l’intérêt supérieur du peuple français doit toujours primer.

Au lendemain des législatives anticipées, certains nous expliquaient que tout était formidable, qu’on assistait au retour du parlementarisme. On a vu le résultat… Malheureusement, nous sommes tombés dans une situation de blocage à cause de partis qui refusent de dépasser leur ligne idéologique.

Sur France Info ce vendredi, le Premier secrétaire du PS, Olivier Faure, s’est dit prêt à négocier avec les macronistes et les Républicains sur « la base de concessions réciproques » en vue de la formation du nouveau gouvernement. Saluez-vous les propos du leader socialiste ?

Oui, je salue ces propos. Les socialistes répondent enfin à la main tendue par Gabriel Attal au lendemain des législatives anticipées.

Constatant qu’il n’y avait pas de majorité claire à l’Assemblée et que les trois blocs étaient de taille quasi équivalente, nous avions proposé un pacte législatif à l’ensemble des députés pour dépasser les simples programmes des uns et des autres et envisager de travailler sur différents textes et sujets. Notre objectif était que chacun puisse sortir de sa posture politicienne et partisane.

Mais la gauche avait préféré s’enfermer dans la politique politicienne. Dès le soir du second tour des législatives, Jean-Luc Mélenchon déclarait sur tous les plateaux de télévision que le NFP avait gagné et que, par conséquent, il fallait appliquer son programme et rien d’autre. Ce n’est pas ce qu’on appelle une posture de discussion, de dialogue et d’ouverture.

Je ne peux donc que saluer le fait que le PS revienne un peu à la maison et accepte de pouvoir échanger sur la base de leurs propositions, mais aussi de celles d’autres groupes parlementaires qui ont la même légitimité qu’eux et qui, une fois de plus, n’ont pas de majorité à eux seuls.

Si nous voulons sortir de cette situation, nous devons tous être capables de nous entendre à l’Assemblée. LFI et le RN appellent à la démission d’Emmanuel Macron depuis quelque temps, mais le point de blocage n’est pas à l’Élysée. Il est au Palais Bourbon.

Emmanuel Macron a d’ailleurs rappelé très clairement qu’il irait jusqu’au bout du mandat que lui ont confié les Français.

Parmi les noms évoqués pour remplacer Michel Barnier, ceux qui reviennent le plus souvent sont ceux de Sébastien Lecornu et François Bayrou. Ces deux personnalités politiques proches d’Emmanuel Macron seraient-elles en mesure d’être à la tête d’un gouvernement d’intérêt général ?

Ces personnalités ont toutes leurs qualités, mais partagent un même handicap : la composition actuelle de l’Assemblée nationale. Vous pouvez nommer n’importe quel homme ou femme politique demain à Matignon, cela ne changera pas la physionomie de l’Assemblée.

Nous avons besoin d’une personnalité qui soit en mesure de discuter avec les uns et les autres, de rassembler sans être dans l’invective ou le sectarisme.

François Bayrou, Sébastien Lecornu et toutes les autres personnalités évoquées cochent toutes ces cases, mais c’est avant tout à l’Assemblée de prendre ses responsabilités.

Les députés doivent prendre leur destin en main et être à la hauteur du moment historique que la France traverse et doivent permettre à un Premier ministre, quel qu’il soit, de pouvoir proposer un chemin, et notamment, en premier lieu, faire adopter un budget.

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