Auteur de l’ouvrage Le Frérisme et ses réseaux, L’Enquête (Odile Jacob), paru en janvier dernier, Florence Bergeaud-Blackler, chercheuse au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) aujourd’hui menacée de mort et placée sous protection policière, a vu sa conférence prévue le 12 mai à la Sorbonne suspendue par l’université.
Pourtant planifié de longue date, ce rendez-vous devait lui permettre de présenter son livre centré sur les Frères musulmans, un mouvement islamiste fondé en 1928 en Égypte qui ambitionne l’instauration d’une société islamique mondiale. Pour justifier la suspension de cette intervention, le motif invoqué par la doyenne de l’établissement tient à des « raisons de sécurité ». « On m’informe que la doyenne de la Faculté de Lettres de la Sorbonne a demandé la « suspension » de ma conférence sur le frérisme qui devait se tenir le 12 mai pour des raisons de « sécurité ». Elle ne m’a pas contactée. Il n’y a pourtant eu aucune manifestation contre l’événement », a annoncé l’anthropologue le 9 mai sur Twitter.
Soulignant qu’elle est « fonctionnaire du CNRS » et « payée par nos concitoyens pour donner des cours et des conférences dans les facultés », elle a demandé sur ses réseaux sociaux à « être reçue » par Sylvie Retailleau, la ministre de l’Enseignement supérieur afin d’étudier les « solutions » à apporter à cette situation : « Cet empêchement à travailler et à rendre compte de mon travail n’est pas acceptable », a-t-elle martelé.
La faute à la cancel culture ?
Pour l’universitaire, cette décision est en effet incompréhensible, car des dispositions étaient prévues afin de s’assurer que l’intervention se déroulent dans de bonnes conditions. « Les organisateurs avaient choisi de le faire en soirée à 18 heures, pour éviter que la conférence ne soit perturbée par des étudiants. Le public était plus âgé, plus large et plus averti qu’à l’accoutumée », confie-t-elle à Marianne.
Depuis la publication de ses recherches, Florence Bergeaud-Blackler subit des pressions sur les réseaux sociaux de la part des internautes qui crient à « l’islamophobie », mais aussi de la part de certains collègues universitaires qui tiennent des « propos diffamatoires », à l’instar de François Burgat, ancien directeur de recherche au CNRS : ce dernier, dans un texte intitulé « « L’islamisation de la France » : acteurs et ressorts d’une dangereuse rengaine », l’accuse de racisme.
« La réalité, c’est qu’il y a une très forte montée de la cancel culture dans l’ensemble des facultés. Parmi les menaces dont je suis victime, il y a une partie non négligeable qui provient de là. La Sorbonne a renié ses valeurs, son rayonnement, en refusant d’organiser la conférence. C’est une université multicentenaire qui cède face aux menaces et recule alors qu’elle a apporté tant de connaissances par le passé », déplore auprès de Marianne la spécialiste.
« Mes livres ne sont pas des dénonciations, ce sont des démonstrations »
Invitée de la matinale d’Europe 1 ce jeudi 11 mai, l’anthropologue a révélé qu’elle n’a toujours reçu d’appels ni de la ministre de l’Enseignement supérieur, ni du CNRS ni de son laboratoire : « Le ministère et le CNRS ont tweeté en ma défense, mais pas de relation directe […] Le soutien reste assez timide. » « Mais je reste combative, je suis tout à fait consciente des travaux que je mène et que j’assume de A à Z. Mes livres ne sont pas des dénonciations, ce sont des démonstrations », assure-t-elle au micro de Sonia Mabrouk.
L’entourage du ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a fait savoir ce jeudi qu’il la recevrait, rapporte Le Parisien. La veille, le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche a indiqué que la chercheuse y serait reçue « prochainement », jugeant « intolérable que la liberté académique puisse se voir remettre en cause par la moindre menace à son encontre ». Sa conférence a finalement été reprogrammée le 2 juin à la Sorbonne.
Pour autant, selon la spécialiste, pour qui les milieux académiques constituent « l’une des premières cibles de l’entrisme frériste », cette affaire traduit bien plus qu’un renoncement de la Sorbonne : « C’est une façon d’accréditer la thèse de mes contempteurs, des gens qui m’accusent d’islamophobie, de racisme avec des propos extrêmement violents. Suspendre ma conférence c’était quelque part leur donner raison », juge la chercheuse, qui regrette la « lâcheté » du monde universitaire : « Ils me soutiennent mais du bout des lèvres. Donc il y a une certaine lâcheté dans le milieu de la recherche ». Malgré les menaces de mort et la mise sous protection policière, Florence Bergeaud-Blackler se dit néanmoins bien décidée à poursuivre ses recherches.
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