Six mois après la mise en place de 10 sas régionaux destinés à loger des migrants sans-abris de Paris, le bilan est mitigé, tant pour Paris que pour les villes d’accueil de ces sas.
En mars dernier, l’Etat annonçait la création de dix « sas d’accueil temporaires régionaux » pour accueillir pendant trois semaines les migrants sans abris en provenance de Paris dans des régions françaises. Le but était de désengorger « les centres d’hébergement » en Île-de-France et répartir ces migrants sur 10 régions: Auvergne-Rhône-Alpes, Bourgogne-Franche-Comté, Bretagne, Centre-Val de Loire, Grand Est, Normandie, Nouvelle-Aquitaine, Occitanie, Pays de la Loire et Provence-Alpes-Côte d’Azur.
Au total, ce sont 1760 personnes qui sont arrivées dans ces dix sas, reporte Le Monde.
Ces centres d’accueil disposent chacun de cinquante places permettant d’accueillir les personnes pour une durée maximale de trois semaines, après quoi elles sont dirigées vers différentes structures d’accueil en fonction de leur situation.
« Il manque déjà des places en régions donc la prise en charge reste compliquée »
Selon les associations qui prennent en charge ces centres, cette étape permet à ces migrants d’entamer des démarches de demande d’asile ou de régularisation, de répondre à leurs besoins de santé et de leur trouver un logement pérenne.
Dans le Doubs, un premier sas a été installé à Seloncourt, dans le nord Franche-Comté, où 185 demandeurs d’asile ont été pris en charge dans l’ancienne MAS de l’ADAPEI, reporte France 3 Bourgogne-Franche-Comté.
Mais, dès la mi-octobre, la ville de Besançon prendra le relais pour l’accueil de ces migrants. La préfecture du Doubs précise que « Besançon est une ville qui offre plus de pérennité pour ce dispositif, car toutes les administrations se situent à proximité pour les demandeurs d’asile. C’est bien plus pratique. La prise en charge dure en moyenne trois semaines. À terme, les personnes iront dans tous les départements de Bourgogne-Franche-Comté. Ils ont un toit, ils sont nourris. C’est un accueil plus humain que dans des gymnases à Paris. »
Seulement, avec une augmentation continue du nombre de demandes d’asiles, même ces sas régionaux fonctionnent à flux tendus. « On peut mettre en place ce qu’on veut, mais les arrivées sont trop importantes », précise Patrick Boccara, de la Croix Rouge du Doubs. « On arrive à saturation. On occupe le terrain, on répond aux gens qui se présentent. On arrive, avec le CCAS, à gérer tout ça pour l’instant. Maintenant, jusqu’à quand ? Je n’en sais rien… On verra bien », conclut-il.
Selon Noëlle Ledeure, de l’association SOLidarité MIgrants REfugiés Besançon, « l’explication qui consiste à dire qu’on va mieux s’occuper des migrants en province qu’à Paris n’est pas vraiment justifiée. Il manque déjà des places en régions donc la prise en charge reste compliquée, justifie-t-elle sur France 3. Ce n’est clairement pas une politique de création de lits d’hébergement pour les personnes migrantes. C’est plutôt une manière de se décharger des populations qui sont massivement concentrées en région parisienne pour les transférer d’autorité ailleurs, en faisant passer ça pour des migrations volontaires. En réalité, il n’y a pas de politique de développement de centre d’accueil pour demandeurs d’asile en France ». Aussi se demande t-elle: « Pourquoi on ne crée pas des CADA (ndlr, Centre d’accueil de demandeurs d’asile) supplémentaires ? »
« Nettoyer » Paris avant les Jeux Olympiques?
Se pose la question de la sortie de ces sas au terme des trois semaines de prise en charge: où vont ces migrants? Si 53% d’entre eux sont redirigés vers des centres d’hébergement d’urgence, 20% d’entre eux partent sans que l’on sache ce qu’ils deviennent, indique le ministère du Logement à Franceinfo.
En outre, l’objectif de désengorger Paris est loin d’être atteint, de nouveau migrants arrivant dans la capitale. Ainsi, à la mi-septembre 2023, la mairie de Paris recensait 321 tentes installées dans les rues parisiennes, dans des campements de fortune, contre 191 au moment de l’annonce des « sas régionaux » en mars dernier.
Aussi, nombreux sont ceux qui y voient le moyen de « nettoyer » Paris avant les Jeux Olympiques. « Nous, on est convaincus que ce dispositif a été créé pour les Jeux olympiques », déplore ainsi Pierre Alauzy, coordinateur chez Médecins du monde. « Le but, c’est de sortir de Paris un maximum de personnes considérées comme indésirables par l’État, et de les envoyer en région », ajoute-t-il. Pour lui, « ça ne vaut pas beaucoup mieux que détruire des favelas au Brésil avant les Jeux olympiques là-bas », en 2016.
« Un hasard de timing, cela n’a pas de lien », fait savoir la préfecture du Doubs sur France 3.
De son côté, Georges Bos, directeur du pôle migrants et réfugiés à la Délégation interministérielle à l’hébergement et au logement assure sur France Infos que ce dispositif n’est « clairement pas lié aux JO ».
« L’objectif, c’est effectivement qu’ils puissent construire une vie à Bordeaux ou à Marseille, c’est-à-dire là où ils ont été envoyés. C’est d’ailleurs un choix qu’on leur propose. Enfin, ils peuvent déposer un dossier. Enfin, ils sont hébergés, alors qu’ils quittent Paris où ils étaient dans la rue. »
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