Malgré les déclarations de Pékin, la milice maritime chinoise est bien réelle. Elle est composée de navires semblables à des bateaux de pêche civils qui ont pour mission de surveiller les mers.
Les marins sont communément appelés les « petits hommes bleus », assimilés par là à des Martiens, des « petits hommes verts ». Lorsqu’on exhorte le Parti communiste chinois (PCC) de s’expliquer, il nie les faits, évoque une « prétendue » milice maritime.
Les produits de la mer sont essentiels au bon fonctionnement du secteur alimentaire chinois. En effet, la Chine consomme 65 millions de tonnes de poisson par an, soit 45 % du volume mondial. Selon les données officielles du PCC, la Chine possède la plus grande flotte de pêche au monde, avec 2 701 bateaux et navires. L’Overseas Development Institute, basé à Londres, estime toutefois que la Chine déploie en réalité non moins de 187 000 bateaux de pêche, dont 17 000 navires opérant en eaux lointaines.
Au moins 100 de ces navires et 1 800 marins sont sous le commandement de la milice maritime des forces armées populaires (PAFMM). Cette sous-composante des forces armées du PCC est formée et équipée pour soutenir l’Armée populaire de libération (APL) lorsqu’elle revendique des îles, des installations et des eaux dans les zones contestées.
Carl Schuster, ancien directeur des opérations au Centre de renseignement interarmées du Commandement du Pacifique des États-Unis, a déclaré à CNN que les bateaux sont équipés d’armes automatiques et de coques renforcées, et qu’ils peuvent atteindre une vitesse de 18 à 22 nœuds (33 à 37 km/h), ce qui les rend plus rapides que 90 % des bateaux de pêche dans le monde.
En outre, ces bateaux sont munis du système de navigation par satellite Beidou, qui les rend indépendants du GPS. Une enquête menée par Radio Free Asia (RFA) a révélé que de nombreux bateaux appartiennent à l’entreprise d’État Sansha City Fisheries Development Co. Ltd, en charge de projets gouvernementaux impliquant des données confidentielles de sécurité nationale.
Les bateaux sont dotés d’une technologie avancée, qui les transforment en plateformes mobiles de communication et de surveillance capables de recueillir et de transmettre des renseignements aux autorités dans un lieu éloigné. Le PAFMM peut être utilisé pour suivre les navires étrangers et les avions américains, ainsi que pour surveiller les côtes des pays qui font partie de l’Initiative ceinture et route (ICR).
Jay Batongbacal, directeur de l’Institut des affaires maritimes de l’Université des Philippines, affirme que la PAFMM joue un rôle important dans le plan du PCC visant à établir un contrôle sur l’ensemble de la mer de Chine méridionale.
En avril, les garde-côtes philippins ont eu des soupçons lorsqu’ils ont observé pendant plusieurs semaines 200 bateaux de pêche chinois immobilisés au même endroit, près du récif Whitsun des Spratlys, une possession philippine. Selon l’Institut international d’études stratégiques (IISS), l’incident du récif de Whitsun représente le plus grand rassemblement de bateaux de pêche chinois jamais réalisé.
Il est peu vraisemblable que de réels bateaux de pêche restent immobiles pendant une période prolongée. En conséquence, les garde-côtes philippins ont fait part de leurs soupçons, à savoir que ces bateaux participaient probablement à une opération militaire confidentielle.
Confrontés au gouvernement philippin, le ministère des Affaires étrangères et l’ambassade de Chine à Manille ont démenti l’accusation selon laquelle les bateaux suspects étaient en mission pour la milice maritime chinoise. L’ambassade de la République populaire de Chine (RPC) à Manille a ensuite publié une déclaration officielle : « Il n’existe pas de milice maritime chinoise comme on le prétend. »
Bien que certains diplomates chinois nient l’existence de la PAFMM, ses responsabilités se sont énormément étendues. En 2013, Xi Jinping a rendu visite à la milice maritime Tanmen de Hainan, eu égard au rôle qu’elle avait joué dans la saisie du haut-fond de Scarborough. Le major-général Gai Longyun, commandant du district militaire du Guangdong, s’est adressé aux marins de la PAFMM en déclarant que « la lutte maritime devenait de plus en plus urgente » et que l’État étudiait les moyens de renforcer la milice maritime. En outre, les autorités militaires ont appelé les « forces de mobilisation », telles que la milice, à participer au « combat » en mer.
En 2016, lors de la réorganisation de l’APL, le système de la Commission de mobilisation de la défense nationale (NDMC) a été placé sous la tutelle du Conseil d’État chinois et de la Commission militaire centrale de l’APL, avec une double structure de commandement civilo-militaire chargée de superviser et de mobiliser la milice.
Les PAFMM, soutenues par les garde-côtes chinois, sont utilisées pour faire valoir les revendications territoriales de la Chine sur 90 % de la mer de Chine méridionale, en particulier autour des îles Paracels et Spratly. La Chine a également construit 1300 ha de nouvelles terres, afin d’étendre davantage ses revendications territoriales.
Les opérations militaires du PCC dans le haut-fond de Scarborough en 2012 constituent un excellent exemple de la stratégie militaire maritime du régime, qui utilise la PAFMM en première ligne, tout en réservant les garde-côtes et la marine en deuxième et troisième lignes.
La PAFMM est particulièrement problématique pour les États-Unis. Premièrement, elle est composée de navires civils, de sorte que toute action contre la milice venant des États-Unis ou de leurs alliés serait considérée comme une attaque contre des civils. D’autre part, pour ceux qui revendiquent la mer de Chine méridionale et d’autres eaux contestées, la PAFMM représente une force militaire qu’ils pourraient ne pas être en mesure de vaincre. Enfin, initier un conflit avec la PAFMM, c’est se risquer à des représailles de la part de l’APL.
D’un point de vue purement militaire et stratégique, une flottille de la marine américaine pourrait détruire tous les bateaux qu’elle rencontre quel qu’en soit le nombre. Cependant, le nombre même de ces navires de petite dimension les rend insaisissables. Pendant que les États-Unis s’engagent à un endroit, la PAFMM peut être bien plus active ailleurs. Une des plus grandes craintes également est que les Philippines, le pays le plus menacé par les PAFMM, attaque l’un de ces bateaux, entraînant ainsi les États-Unis dans une guerre avec la Chine.
Antonio Graceffo, docteur en philosophie, a passé plus de 20 ans en Asie. Il est diplômé de l’Université des sports de Shanghai et titulaire d’un MBA chinois de l’Université Jiaotong de Shanghai. Il travaille comme professeur d’économie et analyste économique de la Chine, rédigeant des articles pour divers médias internationaux.
Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.
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