Ministres démissionnaires à la fois élus députés : leur pouvoir au gouvernement sera limité

Par Epoch Times avec AFP
15 juillet 2024 14:52 Mis à jour: 15 juillet 2024 15:00

Emmanuel Macron devrait prochainement accepter la démission du gouvernement qui restera toutefois un certain temps en place et disposera d’un pouvoir restreint pour gérer les « affaires courantes ». Mais cela permettra aux ministres, élus députés, de voter à l’Assemblée nationale qui, elle-même, ne pourra plus renverser l’équipe démissionnaire.

Un gouvernement démissionnaire « reste en place, tant qu’il n’est pas remplacé par un nouveau gouvernement, pour assurer, au nom de la continuité, le fonctionnement minimal de l’État », explique une note du secrétariat général du gouvernement (SGG) datée du 2 juillet, dont l’AFP a obtenue une copie.

Cette situation permettra aux 18 ministres élus députés de retrouver leur mandat parlementaire et de voter à l’Assemblée nationale, à partir de la session qui s’ouvre jeudi, notamment sur la répartition hautement sensible des postes comme la présidence de la chambre.

Gabriel Attal deviendrait ainsi à la fois Premier ministre démissionnaire et président du groupe ex-Renaissance, ce qui pose la question de la séparation des pouvoirs. « C’est une façon de torturer le droit », explique le constitutionnaliste Benjamin Morel dans Libération. « Parce que la Constitution de la Ve République est vraiment écrite et pensée pour empêcher le cumul de la fonction de ministre et du mandat parlementaire ».

« Juridiquement ça peut tenir, mais ça pose de gros problèmes démocratiques et d’équilibre du régime », ajoute ce maître de conférences en droit public à l’université Paris II, parce qu’un gouvernement démissionnaire ne peut justement plus être renversé par une motion de censure.

« Bâtir des compromis »

La nomination d’un nouveau gouvernement pourrait prendre du temps, étant donné qu’aucune force politique à l’Assemblée n’a obtenu une majorité absolue et dans le contexte des Jeux Olympiques qui démarrent à Paris le 26 juillet. Emmanuel Macron a d’ailleurs indiqué vouloir laisser « un peu de temps » aux forces politiques pour « bâtir des compromis ».

Le secrétariat général du gouvernement explique, lui, que sa note vise à répondre « aux questions juridiques et pratiques » posées par cette période d’affaires courantes, « en particulier dans l’hypothèse, rare sous la Ve République, où elle pourrait se prolonger ».

Par le passé, un gouvernement en « affaires courantes » n’est resté en fonction que quelques jours – neuf jours maximum sous la Ve République, quinze jours en moyenne sous la IVe. Plus les périodes d’affaires courantes ont été longues, plus cette notion a été « appréciée de façon extensive », relève le SGG.

Les affaires courantes recouvrent d’un côté les « affaires ordinaires » qui participent à « la marche normale de l’État » et ne nécessitent « aucune appréciation de nature politique », et de l’autre les « affaires urgentes », dont l’adoption est dictée par « une impérieuse nécessité » (état d’urgence, catastrophe naturelle, trouble à l’ordre public, techniques de renseignement par exemple).

Rien n’interdit au président de la République de réunir un Conseil des ministres, mais souvent avec un ordre du jour « particulièrement léger ». Le chef de l’État peut continuer à procéder à des nominations sauf « les plus politiquement sensibles », comme celles des directeurs d’administration centrale.

« Ne pas multiplier le travail inutile »

Les mesures réglementaires ne sont prises à l’inverse que « par exception », au nom de la continuité de l’État, ou quand elles relèvent de l’urgence. Pour ce qui est des projets de loi, aucun gouvernement en affaires courantes n’en a présentés sous la Ve République parce que, d’une part, toute mesure législative est tenue « pour importante et politiquement sensible » et, d’autre part, « il peut sembler inadéquat de saisir le Parlement alors même qu’il est privé de sa prérogative la plus forte, à savoir la possibilité de renverser le gouvernement », explique le SGG.

Le gouvernement en affaires courantes évite aussi de tenir des réunions interministérielles pour « ne pas multiplier le travail inutile » étant donné que l’équipe suivante pourrait remettre en cause les arbitrages rendus.

Un gouvernement démissionnaire peut néanmoins déposer un projet de loi pour doter le pays d’un budget, selon le SGG. S’il échoue à le faire adopter dans les 70 jours ou ne le dépose pas en temps voulu, il peut ensuite procéder par ordonnances (article 47 de la Constitution).

Il peut aussi déposer un projet de loi pour éviter la caducité d’une ordonnance, pour réparer une inconstitutionnalité ou transposer dans les temps une directive. Il doit également demander l’autorisation au Parlement s’il veut prolonger l’état d’urgence « au-delà de douze jours ».

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