Après son film de 1967 Cathy come home, Ken Loach porte un nouveau regard sur la valeur sociale, face à la réalité humaine de 2016…dans un pays industrialisé. Un pays aux belles valeurs ! Moi, Daniel Blake, palme d’or, humaine et sociale, renvoie à la vie économique qui programme l’élimination de l’individu. Histoire vécue en…Europe.
« Moi, Daniel Blake, je suis devenu un travailleur pauvre, malade, gravement : interdit de travailler. Pourtant, Pôle Emploi me met la pression pour continuer à rechercher un autre travail. Une pression délibérée. Une pression pour stopper mes allocations chômages. Je suis malade. Toutes les manœuvres sont employées par Pôle Emploi pour vous étouffer. Pôle Emploi vous embarque dans des méandres administratifs pour vous suspendre vos allocations chômages. Pôle Emploi s’est converti en chasseur d’allocation. Se retrouver sans rien. Je (ne) vous dis pas la pression. La tête prête à exploser, le cœur aussi. Puis, je rencontre Katie. Une jeune femme avec ses deux merveilleux enfants. Elle est aussi étouffée par Pôle Emploi, même étranglée délibérément. Elle est perdue dans sa vie. Plus de travail, plus d’argent, plus rien dans les assiettes. Elle a déménagé, moi, Daniel Blake, je l’aide dans son nouveau logement. Je bricole pour elle et les enfants. Avant, j’étais menuisier.
Katie, elle est à bout. Elle continue pour ses deux enfants. Elle empreinte des chemins de traverse et prend n’importe quel travail. Pour ses enfants, elle est prête à tout prendre. Pour moi, avec Pôle Emploi cela ne s’arrange pas. Que va décider le médecin du travail pour mon arrêt de maladie. Le travail face à la maladie. J’en tremble. Mon cœur en tremble. Moi, Daniel Blake, je suis devenu un travailleur pauvre. Je crie que je ne suis pas un os à ronger. Je suis un homme. »
Moi, Daniel Blake rappelle qu’il est (encore) un homme. Cela ramène à une autre époque, une autre situation, avec un autre film comme Eléphant Man. A un moment, il est poursuivi comme un animal. Alors, il hurle, je ne suis pas une bête, je suis un homme. De temps en temps, il faut hurler. Moi, Daniel Blake, peut redire : « je suis un homme ».
Ken Loach, cinéaste engagé dans la protestation sociale
Avec l’âge, un homme se rapproche de la réalité. Ken Loach avec les années se rapproche de l’authenticité sociale. Ses films avec ses histoires concrètes montrent des situations de terrain qui lui collent comme une ombre en forme de caméra.
Le cinéma de Ken Loach tranche dans le vif. Ses histoires ressemblent à une réalité vécue sur la scène du quotidien par un proche, ou, bientôt par nous. Personne n’est exclu de la possibilité un jour de basculer dans un enchaînement destructeur. Les coulisses sont juste remplies de cobaye à taille humaine. A qui le tour ?
Les évincés du système sont de plus en plus légion. Grâce au mécanisme qui autoproduit ce genre de personnes écartées. Seulement en Grande-Bretagne, nulle part ailleurs ? L’économie de marché a produit une réalité étouffante qui met face à face l’erreur du système ou la faute des gens. Personne ne veut plus changer le système. Il roule sans pilote. Le délibéré est simple, les gens sont responsables de leurs dégringolades. À eux d’en payer les pots cassés. Tout le monde accepte ce feed-back. Les pauvres doivent assumer d’être pauvre. Ken Loach nous re-dit comme en 1967 : « c’est inacceptable ! » Alors, qui va réagir ? Qui va se lever pour dire stop ? Le même cri dans chacun de ses films ou presque.
Ken Loach, cinéaste anglais, est engagé dans un cinéma social depuis le début de sa carrière. Ses films donnent à assister à une rencontre où souvent l’humanité est ballotée. Balloté par le système. Il a précisé pendant son discours, lors de la remise de sa deuxième Palme d’or : « Mon film est inspiré par des pauvres de la cinquième puissance mondiale qu’est l’Angleterre. Mon histoire inspirée de fait réel montre que nous sommes au bord d’un projet d’austérité qui est conduit par des idées que nous appelons néo-libérales qui risquent de nous mener à la catastrophe. Mon cinéma est de présenter un cinéma de protestation, un cinéma qui met en avant le peuple contre les puissants. »
Moi, Daniel Blake, une histoire…une réalité :
Paul Laverty, le scénariste, est allé à la rencontre des personnes en difficulté dans des lieux comme les banques alimentaires. Moi, Daniel Blake montre une réalité des travailleurs pauvres. Les rencontres sur le terrain ont permis d’écrire l’histoire du film. Il précise : « C’est inspiré de faits réels. La situation relationnelle du tissu social en Angleterre est totalement fissurée, elle vole en éclat. Une certaine presse, de droite, présente une campagne de dénigrement contre les bénéficiaires de l’aide sociale. Ces médias se délectent de la détresse des gens d’une manière obscène. Plusieurs d’entre eux ont eu à subir des insultes, humiliations et même des agressions physiques après cette campagne. Dans ces rencontres, dans les banques alimentaires, les gens doivent choisir entre manger ou se chauffer. Toute l’atmosphère sociale tourne au rouge. Les aides sociales ne vont plus aux chômeurs mais vers les travailleurs pauvres qui n’arrivent plus à joindre les deux bouts. Nous ne sommes plus comme dans les années 60. En 2016, des contrats comme le ‘zéro heure’ sans garantie de travail effectif rendent la situation sociale insupportable. »
En plus, nous découvrons le rôle joué par les administrations qui s’assimile à des sables mouvants. Le Pôle Emploi vous aspire vers un fond qui vous ballotte entre être soutenu ou être mis sur la touche…finale.
Ken Loach insiste : « La seule question à se poser est celle de savoir ce qu’on est prêt à mettre en place pour s’atteler aux problèmes…Un autre monde est possible et nécessaire. » Combien de temps nous reste-t-il ? Ce yoyo social fait perdre la tête à tout moment. Tout le monde peut être pris dans cette spirale.
Moi, Daniel Blake est une Palme d’or qui programme le cinéma version sociale. La grande question en sortant de la projection : Moi, suis-je un prochain Daniel Blake ? Face aux administrations…devenues inhumaines. Où un proche face aux vicissitudes de la vie ? Suis-je un simple intérimaire de la vie pour supporter toutes les tuiles qui tombent ? Suis-je un simple futur…enfoiré de pauvre ?
Pour en savoir plus :
Moi, Daniel Blake réalisé par Ken Loach. Scénariste Paul Laverty. Avec Dave Johns (Daniel Blake), Hayley Squires (Katie).
Voir un Face à Face de films de Ken Loach comme Looking for Eric Face à Moi, Daniel Blake : deux films pour regarder notre monde…autrement.
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