Alors qu’un nombre croissant de diocèses catholiques romains à travers les États-Unis enquêtent sur les plaintes pour actes pédophiles contre le clergé et publient les noms des prêtres accusés de tels crimes, un autre problème caché a commencé à faire surface : les religieuses qui abusent sexuellement des enfants.
Au moins 20 enquêtes locales, étatiques ou fédérales, criminelles ou civiles, sur le clergé de l’église ont commencé depuis la publication, en 2018, d’un rapport du grand jury de Pennsylvanie sur les abus détaillés commis par des prêtres. Mais alors que ces enquêtes pourraient potentiellement mener à la publication d’encore plus de noms et d’accusations, les défenseurs des victimes ont déclaré à Epoch Times que les ordres religieux devraient également commencer à inscrire les noms des religieuses qui abusent des enfants, un problème beaucoup moins rapporté, avec moins de statistiques concrètes.
BishopAccountability.org, une entreprise à but non lucratif du Massachusetts qui suit les cas d’abus sexuels commis par des membres du clergé, a identifié au fil des ans « un peu plus de 100 religieuses notoires accusées », a déclaré Terry McKiernan, le fondateur du site, à Epoch Times. Sa base de données, quant à elle, a retracé plus de 6 000 prêtres accusés à travers les États-Unis.
« Les chiffres sont assez faibles, mais c’est ce que l’on sait », a indiqué M. McKiernan, en parlant du nombre de religieuses accusées publiquement de violence. « C’est une question de débat sur l’ampleur du problème. »
Certains des noms des moniales sont incomplets parce que les victimes présumées ne s’en souvenaient pas, d’après une liste des noms publiée au mois d’août. Depuis, d’autres noms ont été ajoutés à la base de données et n’apparaissent pas sur la liste. Les victimes présumées viennent de partout au pays et proviennent d’un large éventail d’ordres religieux différents.
M. McKiernan a déclaré que la plupart des religieuses identifiées par son organisation ont été accusées d’abus « entre les années 1960 et 1990 ». Un groupe de religieuses accusées qui se sont distinguées venait d’un orphelinat de Louisville, Kentucky, où Terry McKiernan a dit avoir vu la « plus forte concentration » d’agresseuses dans la base de données.
Epoch Times a contacté la Ligue catholique, la plus grande organisation catholique de défense des droits civiques du pays, pour obtenir des commentaires, mais n’a pas reçu de réponse au moment de la publication de cet article.
Mary Dispenza, directrice du Survivors Network of those Abused by Priests (SNAP) (Le réseau des survivants abusés par des prêtres) et personne-ressource pour les personnes maltraitées par des religieuses, a déclaré à Epoch Times que, dans le cadre de cette fonction, elle avait été approchée par 85 survivantes présumées d’inconduite par des religieuses au cours des deux dernières années.
« Ce n’est qu’un minuscule, un tout petit chiffre du nombre que nous pensons être possible », a dit Mme Dispenza, ajoutant qu’un groupe de soutien s’est formé et qu’elle rencontre les survivants (nom donné aux personnes agressées – NDT) tous les mois sur Internet.
Une seule des affaires dont Mme Dispenza a entendu parler a fait l’objet d’une poursuite et est parvenue à une entente satisfaisante. Dans d’autres cas, des survivantes qui étaient elles-mêmes religieuses ont raconté les abus à leur communauté religieuse et la supérieure a déplacé la religieuse accusée dans ce que Mary Dispenza a appelé une « maison-mère », une section éloignée des enfants. Mais Mme Dispenza a dit qu’on ne demandait pas aux nonnes de partir à moins que l’affaire ne soit portée au niveau criminel.
« Jusqu’à présent, aucun ordre religieux n’a dressé de liste ou publié de noms sur les religieuses agresseuses », a-t-elle déclaré, ajoutant qu’une liste placée dans une paroisse ou une école pourrait encourager les gens qui connaissent les nonnes coupables d’abus sexuels à se manifester, ce qui pourrait aider les survivants à confirmer leur histoire.
Mme Dispenza, auteure et ancienne nonne qui a elle-même été pendant 15 ans dans les ordres, a dit avoir été abusée sexuellement par une nonne et un prêtre lorsqu’elle était enfant. Elle a dit que dans de nombreux cas de survivantes qui lui ont parlé, les autres religieuses savaient ce qui se passait mais protégeaient ou toléraient le comportement de l’accusée, soulignant ainsi les décennies d’histoire de l’Église à couvrir ces crimes.
Elle se souvient d’avoir été abusée par une nonne alors qu’elle était jeune postulante – une jeune fille qui étudiait pour devenir nonne. Elle avait 13 ans à l’époque et était en train de quitter la chapelle principale en ligne avec les autres postulantes, lorsque la mère supérieure de l’ordre l’a soudain rappelée. Les postulantes faisaient toujours la queue, donc le fait d’avoir été appelée était déjà étrange pour elle.
Elle se souvient que la mère supérieure l’a amenée dans sa chambre. À cette époque, les gens s’agenouillaient aux côtés de la chef de la communauté quand ils voulaient discuter avec elle ou lui demander quoi que ce soit.
« J’ai fait ce qu’il fallait et je me suis agenouillée près d’elle en touchant presque ses genoux. Je ne me souviens pas de ce qu’elle a dit avant ou après, mais je me souviens juste qu’elle a pris mon visage entre ses deux mains et m’a embrassée partout, et je me souviens être partie en me sentant totalement confuse et désorientée. »
Plus tôt cette année, un cabinet d’avocats du Minnesota a publié un rapport sur les abus pédophiles dans l’archidiocèse de Chicago et d’autres diocèses de l’Illinois, dans lequel six religieuses ont été identifiées parmi les 390 agresseurs présumés.
L’année dernière, le procureur général de Pennsylvanie, Josh Shapiro, a déclaré en décrivant les conclusions du rapport du grand jury de l’État de Pennsylvanie : « Par-dessus tout, ils ont protégé leur institution à n’importe quel prix. »
Selon Mme Dispenza, les victimes présumées qui l’ont contactée étaient âgées de 7 à 18 ans lorsqu’elles ont été victimes d’abus. Elle a indiqué que plus de la moitié des survivants qui l’ont contactée étaient des filles. Dans la plupart des cas, il s’agissait d’abus sexuels et d’attouchements inappropriés, mais dans certains cas, il s’agissait de violence physique ou psychologique, y compris de honte et d’embarras.
Epoch Times refuse d’inclure des descriptions et des récits plus spécifiques des cas présumés d’abus sexuels, en raison de la nature explicite des crimes présumés et de l’âge des victimes présumées.
Mary Dispenza veut que les ordres religieux commencent à publier les noms des religieuses accusées et à les remettre au système judiciaire, et demande la suspension ou le retrait de l’accusée de tout contact avec des enfants. Elle a dit que le SNAP, grâce à la recherche, estime qu’il y a un total d’environ 45 000 à 55 000 religieuses à travers les États-Unis, parmi environ 200 ordres religieux.
Le rapport du grand jury de Pennsylvanie, qui est en préparation depuis deux ans, accuse plus de 300 « prêtres prédateurs » d’abus sexuels et l’Église catholique romaine d’avoir dissimulé pendant des décennies l’activité présumée. Il explique en détail comment les administrateurs ecclésiastiques ont souvent dissuadé les victimes de signaler les abus à la police, ont exercé des pressions sur les responsables de l’application des lois pour qu’ils mettent fin à leur enquête ou l’évitent, ou ont mené leurs propres enquêtes déficientes et biaisées sans rapporter les crimes contre les enfants aux autorités compétentes.
La grande majorité des nonnes ne commettent aucun crime, a souligné Mme Dispenza, affirmant que son but n’est pas de raconter des histoires horribles. Au lieu de cela, explique-t-elle, il s’agit de mettre la vérité en lumière.
« En vérité, la plupart des moniales ont et vivent leur vie dans le cadre de leurs vœux. Mais nous ne pouvons pas ignorer le fait que certaines d’entre elles sont sortis de ces vœux et ont abusé des enfants », a-t-elle déclaré. « Dans l’intérêt des victimes, nous devons nous attaquer à ce problème et le mettre au grand jour. Les abus commis par des nonnes font aussi partie de notre histoire. »
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