« On est les Champions ! » Dans une clameur dantesque et des larmes de joie, Paris résonnait dimanche soir du bonheur intense de centaines de milliers de supporteurs tricolores, qui prenaient d’assaut le pavé en direction des Champs-Elysées pour fêter la Coupe du monde de football des Bleus, vingt ans après celle de 1998.
Au coup de sifflet final consacrant la victoire tricolore (4-2) sur les Croates, devant les bars, dans les rues, dans les appartements, Parisiens et touristes par milliers chantent, dansent, klaxonnent, arrêtent les voitures, pavoisent enrobés dans le drapeau…
« On a gagné, on a gagné ! », « Champions, Champions du monde ! », scande la foule survoltée de 90.000 supporteurs réunis dans la « fan zone » parisienne du Champ-de-Mars, au pied de la Tour Eiffel, qui ne forme plus qu’une marée bleu-blanc-rouge.
« C’est le plus bel été de ma vie ! », s’exclame Myriam, 17 ans, en pleurs. « J’ai eu mon bac cette année et là on est champions du monde, c’est complètement fou », lance-t-elle, voix cassée à force d’avoir crié et chanté durant cinq heures. « Nous aussi on peut le dire maintenant. On est Champions du monde ».
Des inconnus s’enlacent, une jeune fille embrasse un agent de sécurité sur la bouche. « C’est merveilleux, merveilleux ! », s’exclame, émue, Martine, 58 ans, venue avec sa fille. Plusieurs centaines de personnes évacuent le périmètre dans le calme. Un haut parleur hurle à la foule de ne pas aller sur les Champs-Élysées, ces derniers étant « saturés ».
Sur la plus célèbre avenue du monde rendue aux seuls piétons, une foule immense, de toutes origines, déferle, accourue des bars des rues adjacentes. « Champions du monde ! On est les Champions ! », hurlent les heureux, en chantant « Poooo, po po po po pooooo poooo » sur l’air de la célèbre chanson « Seven nation army » ou en soufflant dans des vuvuzelas.
Sous les fumées rouges et bleues, les tirs de feux d’artifice et de pétards gros calibre, un jeune de 24 ans se filme avec son portable: « Cousin, on est sur le toit du monde ! », dit-il à sa caméra. Il va envoyer la séquence sur Snapchat: « C’est magnifique, ce soir je vais faire trois jumeaux à ma copine ».
« Je me rends pas compte encore, mais c’est bien vrai on est Champions du monde ! La fête ne fait que commencer », s’enthousiasme Xavier Pal, 25 ans. « J’avais cinq ans en 98, donc cette Coupe du monde c’est vraiment celle de ma génération ».
« 1998, c’était magique. Ce soir mon fils a la chance de vivre cette même joie », raconte Eric Rodenas, 42 ans, venu de Cannes avec Raphaël, 14 ans.
Au Carillon aussi, c’est l’explosion: les cornes de brume, les sifflets et les hurlements emplissent l’air. Devant ce bar du Xème arrondissement, visé par les attentas jihadistes du 13 novembre 2015, une foule bigarrée agite ses drapeaux tricolores et fait tournoyer les maillots.
Trois ans après les attentats, « faire la fête, être Champions du monde ici, c’est symbolique », lâchait Benoît Bardet, contemplatif devant la joie ambiante quand la victoire semble acquise. « Venir ici avec mes potes, c’était un choix, une façon de se souvenir et de montrer que Paris ne meurt pas, même après ce qu’il s’est passé ».
« Voir tout le monde réuni dans la rue comme ça, c’est fou », s’émeut Ludovic Guaignant, technicien en électronique, maillot de Griezmann sur le dos. « Y a plus de problèmes, de racisme, tout le monde se rassemble. Y’a qu’avec le foot que tu vis ça. »
« On l’a fait ! », crie sur la place de l’Etoile Eric, ingénieur de 38 ans, bleu blanc rouge des pieds au crâne teinté: « C’est que du bonheur, c’est que de l’amour, dans neuf mois il y aura une génération de bébés Champions du monde ! Je pourrai dire que j’ai connu deux titres de champion du monde ! Ce soir c’est 1998 x 2 ! »
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