Le corps de Lina, adolescente de 15 ans qui avait disparu en septembre 2023 en Alsace, a été retrouvé mercredi précisément à Sermoise-sur-Loire, dans la Nièvre, a indiqué jeudi à l’AFP une source proche du dossier.
Après des mois de recherches minutieuses, les enquêteurs étaient parvenus à identifier un véhicule, une Ford Puma, conduite par le principal suspect dans l’enquête, Samuel Gonin qui s’est suicidé le 10 juillet chez lui à Besançon et n’a jamais été entendu par les enquêteurs dans ce dossier.
ADN et effets personnels de Lina trouvés dans sa voiture
Ce principal suspect menait « une vie d’errance » dans un véhicule volé au moment de la disparition de l’adolescente il y a un an dans le Bas-Rhin, selon le parquet, qui a dépeint un toxicomane « en rupture de ban totale ».
L’ADN du quadragénaire et celui de l’adolescente ont été retrouvés sur des cordes dans le coffre de la voiture « ce qui tend à démontrer qu’à un moment ou à un autre, Lina a été ligotée », a déclaré, le 19 septembre, le procureur de la République par intérim de Strasbourg, Alexandre Chevrier.
Dans la boîte à gants, les enquêteurs ont trouvé le sac à main de la jeune fille, qui avait disparu le 23 septembre 2023 sur une départementale près de chez elle.
Principal suspect, Samuel Gonin était père de deux enfants et avait exercé plusieurs métiers, dont enseignant en menuiserie en lycée. Mais quelques mois avant les faits, il avait quitté son emploi et s’était éloigné de sa famille. Il « vivait probablement dans cette voiture, vu le désordre qui a été constaté à l’intérieur », a indiqué le procureur.
« C’était vraiment quelqu’un qui était en rupture de ban totale, qui s’est lancé dans une vie totale d’errance », a-t-il décrit, mentionnant son addiction aux drogues.
Un chemin d’errance inexpliqué
Le 23 septembre, la Ford part d’Audincourt, dans l’agglomération de Montbéliard, à 4h49, avant de prendre la direction du nord et de franchir la frontière allemande. Des images de vidéosurveillance montrent Samuel Gonin voler de l’essence près de Fribourg.
Puis il revient en France et son véhicule est filmé à 11h13 à Plaine, le village où vivait Lina. Des données de géolocalisation du véhicule le situent ensuite à proximité du lieu de disparition, à 11h20 et 11h26. Le portable de la jeune fille avait cessé de borner très exactement à 11h22, entre son domicile au pied du massif des Vosges et la gare de Saint-Blaise-la-Roche, à environ trois kilomètres.
Identifiée comme véhicule suspect par les enquêteurs, la Ford avait été localisée à Narbonne, où elle avait été saisie par les douanes en janvier 2024 suite à un refus d’obtempérer de Samuel Gonin.
Le 26 juin, cette voiture est transférée à l’Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale (IRCGN) pour y être analysée. Le 24 juillet, les enquêteurs découvrent qu’elle se trouvait précisément sur le lieu de la disparition de Lina, lorsque celle-ci a disparu. Mais il est trop tard pour entendre Samuel Gonin, qui s’est suicidé, laissant de multiples questions en suspens.
« Il a tout fait pour se rendre indétectable »
Il « se déplaçait beaucoup et parfois avec une certaine incohérence au moins apparente », selon M. Chevrier. En outre, il « a tout fait pour se rendre indétectable », a noté le procureur : il n’utilisait pas de téléphone portable et avait pris soin de désactiver le GPS du véhicule.
La jour de la disparition de Lina, la Ford a été localisée dans la forêt d’Anould, dans les Vosges, puis à Saulx, en Haute-Saône, et à Corancy dans la Nièvre. Des recherches y ont été menées, infructueuses. Les enquêteurs veulent aussi déterminer si Samuel Gonin « a pu commettre d’autres faits délictuels ou criminels ».
Le patron d’un restaurant a affirmé à l’Est Républicain qu’il avait « harcelé des femmes » dans son établissement. Des habitants du quartier des Près de Vaux à Besançon, où vivait Samuel Gonin, ont évoqué dans ce journal « une personne tourmentée », un père de famille « très gentil », mais souffrant de problèmes « liés à sa consommation de stupéfiants ».
Selon un expert psychiatre qui l’avait entendu le 25 juin, Samuel Gonin présentait un trouble de personnalité de type « borderline », c’est-à-dire à la limite d’une maladie psychiatrique vraiment installée, avec des symptômes dépressifs importants. Il consommait beaucoup de produits toxiques : alcool, cannabis et cocaïne et avait été hospitalisé au moins trois fois en psychiatrie.
Dans des écrits retrouvés après son suicide, Samuel Gonin s’était confié, sans toutefois faire mention de Lina. « J’ai perdu mon honneur, ma dignité, mon humanité, je dois partir », écrivait-il. « Je ne sais pas me contrôler, ça va trop vite. »
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