Mort de Nahel : le directeur du journal Oise Hebdo condamné pour avoir révélé l’identité du policier

Par Vincent Solacroup
23 août 2024 09:34 Mis à jour: 23 août 2024 09:36

Le directeur du journal Oise Hebdo a été condamné jeudi à une amende pour avoir divulgué, peu après les émeutes ayant suivi la mort de Nahel Merzouk en juin 2023, le nom du policier auteur du tir mortel et sa commune de résidence.

Vincent Gérard, directeur de la publication de l’hebdomadaire picard, a été condamné à 4000 euros d’amende dont 2000 avec sursis, ainsi qu’à verser 1000 euros au policier au titre du préjudice moral, a indiqué le parquet de Compiègne. Le journal a lui-même fait part de cette décision de justice sur son site internet, dans un article mentionnant à nouveau le nom du policier.

M. Gérard a indiqué à l’AFP qu’il allait faire appel de cette condamnation, rendue trois jours après l’audience tenue lundi. L’hebdomadaire avait publié, le 6 juillet 2023, un article donnant le nom du policier et sa commune de résidence, ainsi qu’une photo de lui tirée du site Copains d’avant.

Une « arme par destination »

L’article était paru dans un contexte d’émeutes urbaines qui avait embrasé la France. « Le climat était délétère », déclarait à l’audience, la présidente Nadine Duboscq. « Entre le 27 juin et le 7 juillet, plus de 6 000 véhicules ont été incendiés, 1 000 bâtiments dégradés, 3 500 personnes interpellées et 700 membres de forces de l’ordre blessés », précisait-elle.

Le soir-même de sa parution, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, avait saisi la justice contre Oise Hebdo qui avait refusé de retirer son article, dénonçant un « contenu irresponsable » qui « (mettait) en danger la vie de la famille du policier ».

Au cours de l’audience, l’avocat du policier, Me Laurent-Franck Lienard, avait alerté sur les conséquences dramatiques de cette publication. “Il était en détention et chaque demande de remise en liberté a été refusée à cause de cet article”, avait-il déclaré, ajoutant que la famille du policier, y compris sa femme et son enfant de cinq ans, avait dû être placée sous protection.

Guillaume Dupont, le procureur, avait qualifié l’article d’« arme par destination », jugeant qu’il mettait en danger le policier et sa famille. D’après lui, « la liberté de la presse ne peut être une immunité. Ici, la ligne rouge a été franchie ». Le magistrat avait même comparé l’affaire à un nouveau délit numérique, le doxing, consistant à exposer des informations sensibles et privées en ligne. « Des particuliers, des hackers ont déjà été condamnés, mais si ce journal l’est, ce serait inédit », avait-il ajouté.

Un1té, l’un des principaux syndicats de policiers, s’est félicité sur X (ex-Twitter) d’une condamnation qui met fin à « l’impunité de ceux qui se cachaient derrière la loi sur la liberté de la presse pour mettre en danger des policiers ».

« Pas l’intention de nuire »

« J’ai fait mon travail de journaliste en disant où habitait le policier, il importait que les gens qui habitent à côté soient au courant qu’il y avait éventuellement un danger qui pouvait se passer », s’est justifié M. Gérard auprès de l’AFP. Par ailleurs, « il n’y avait pas de raison que son nom ne soit pas divulgué », il « circulait » sur internet et « sa sécurité était totalement assurée puisqu’il était en prison ».

« Il n’y avait pas l’intention de nuire. L’information a été traitée comme tous les faits divers dans ce journal » a indiqué l’avocat du directeur d’Oise Hebdo, Me Fabrice de Korodi.

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