New Delhi : les détectives au cœur des noces indiennes

Par Epoch Times avec AFP
20 décembre 2024 15:00 Mis à jour: 20 décembre 2024 15:07

Depuis son échoppe anonyme à New Delhi, la détective matrimoniale Bhavna Paliwal fait la pluie et le beau temps sur les noces, un métier en plein essor en Inde où beaucoup préfèrent désormais les unions d’amour aux mariages arrangés.

La tradition – des partenaires soigneusement sélectionnés par les deux familles – reste très présente, mais dans un pays où les mœurs évoluent rapidement, de plus en plus de couples préfèrent faire leurs propres rencontres.

Pour certaines familles, la première étape pour préparer un mariage n’est donc pas de contacter un organisateur, mais un détective comme Paliwal, à même d’enquêter sur un futur partenaire avec des outils high-tech.

Sur cette photo prise le 10 décembre 2024, Bhavna Paliwal, fondatrice de l’agence de détectives Tejas, ajuste le rétroviseur de sa voiture alors qu’elle circule dans une rue de New Delhi. (ARUN SANKAR/AFP via Getty Images)

« Faire les vérifications nécessaires »

Sheela, une employée de bureau à New Delhi, raconte avoir immédiatement engagé Paliwal lorsque sa fille lui a annoncé qu’elle voulait épouser son petit ami.

« Mon mariage était un échec », explique Sheela, dont le nom a été modifié car sa fille ignore que son fiancé a été espionné. Alors, « lorsque ma fille m’a dit qu’elle était amoureuse, j’ai voulu la soutenir, mais pas sans faire les vérifications nécessaires. »

Un marché florissant

Bhavna Paliwal, 48 ans, a fondé son agence de détectives il y a plus de 20 ans, et affirme que les affaires n’ont jamais été aussi florissantes, avec environ huit affaires par mois : elle a récemment, par exemple, découvert que le futur époux d’une cliente avait menti en ajoutant un zéro à son salaire.

Sur cette photo prise le 10 décembre 2024, Bhavna Paliwal, fondatrice de l’agence de détectives Tejas, quitte son bureau à New Delhi. (ARUN SANKAR/AFP via Getty Images)

La détective doit se montrer discrète: un panneau devant son bureau, niché dans un centre commercial, indique qu’elle fournit des services d’astrologie – fréquemment utilisés par les familles pour trouver une date de mariage « chanceuse ».

« Certains clients ne veulent pas qu’on sache qu’ils rencontrent un détective », dit-elle en riant, expliquant recevoir aussi des demandes de futurs mariés pour vérifier les antécédents de leur partenaire, ou soupçonnant un adultère.

de 100 à 2.000 dollars

Engager un détective peut coûter de 100 à 2.000 dollars, selon l’ampleur de l’enquête – une petite somme pour des familles qui dépensent beaucoup plus pour le mariage lui-même.

Les parents inquiets ne sont pas les seuls à vouloir en apprendre davantage sur le passé de leurs futurs beaux-fils ou belles-filles. Certains veulent vérifier les antécédents de leur futur conjoint ou, après le mariage, confirmer une liaison présumée. « C’est un service rendu à la société », pense Sanjay Singh, un détective de 51 ans disant avoir traité des centaines d’enquêtes pré-matrimoniales rien que cette année.

Une autre enquêteuse, Akriti Khatri, estime qu’un quart des affaires traitées par son agence Venus Detective Agency sont des vérifications pré-matrimoniales, comme « des gens qui veulent savoir si le marié est homosexuel ».

Dans cette photographie prise le 7 décembre 2024, Akriti Khatri, fondatrice de Venus Detective Agency, montre un traceur GPS et un mouchard audio lors d’une interview avec l’AFP à New Delhi. (ARUN SANKAR/AFP via Getty Images)

De nombreuses vérifications pour les mariages arrangés

Les mariages arrangés par les familles nécessitent quant à eux de nombreuses vérifications avant même que le couple ne se rencontre, comme des enquêtes sur les finances ou le statut dans la hiérarchie millénaire des castes indiennes.

Les épousailles enfreignant les règles rigides des castes ou des religions peuvent avoir des répercussions mortelles, entraînant parfois des crimes dits « d’honneur ».

Dans le passé, ces vérifications étaient souvent effectuées par les familles, des prêtres ou des entremetteurs. Mais l’urbanisation galopante a ébranlé le tissu social et remis en cause ces méthodes traditionnelles.

Sur cette photo prise le 4 décembre 2024, Sanjay Singh, qui dirige l’agence de détectives indienne Pvt. Ltd. (IDAPL), parle lors d’une interview avec l’AFP dans son bureau à New Delhi. (ARUN SANKAR/AFP via Getty Images)

Les mariages arrangés se font désormais aussi par le biais de sites internet ou d’applications de rencontres. « Les demandes en mariage arrivent aussi sur Tinder », dit M. Singh.

Ne rien faire qui soit contraire à l’éthique

Pour déjouer la sécurité des immeubles modernes, ses agents doivent parfois « raconter une ‘histoire à dormir debout’  » pour qu’on les laisse entrer, évoluant dans une « zone grise » légale.

M. Singh estime cependant être du bon côté de la loi et ne rien faire qui soit contraire à l’éthique, notant que la raison d’être de ces enquêtes est que la vie de quelqu’un peut potentiellement être « détruite ».

Le recours aux technologies

Les limiers ont abondamment recours aux technologies : Mme Khatri a ainsi fait développer par des professionnels une application permettant à ses agents d’envoyer des dossiers directement sans laisser de traces sur leurs téléphones, au cas où ils seraient découverts.

« C’est plus sûr pour nos équipes », et les aide à « obtenir des résultats précis en moins de temps et à moindre coût », beaucoup d’outils de surveillance étant vendus pour quelques dollars.

Il s’agit notamment de dispositifs d’enregistrement dissimulés dans des objets du quotidien comme des bombes anti-moustiques, des traceurs GPS magnétiques pour les voitures ou de minuscules caméras à porter sur soi.

Sur cette photo prise le 9 décembre 2024, un détective de terrain porte une caméra espionne avant de partir en mission, à New Delhi. (MONEY SHARMA/AFP via Getty Images)

Selon M. Paliwal, les avancées technologiques ont mis les relations sous pression : « Plus nous devenons high-tech, plus nous avons de problèmes dans nos vies », glisse-t-elle.

Mais pour elle, ni la technologie ni les détectives ne doivent être tenus pour responsables si un adultère est découvert. « De telles relations n’auraient de toute façon pas duré » car « aucune union ne peut fonctionner sur la base de mensonges ».

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