« Nous ne pouvons pas vivre dans un monde sans Amazonie », dit une scientifique

Par Epoch Times avec AFP
9 novembre 2021 15:00 Mis à jour: 9 novembre 2021 15:59

« Nous ne pouvons pas vivre dans un monde sans Amazonie », prévient Erika Berenguer, spécialiste brésilienne de l’écologie de la plus grande forêt tropicale au monde aux Universités d’Oxford et de Lancaster.

L’AFP a demandé à cette scientifique de 38 ans, spécialisée dans les perturbations apportées par l’action de l’homme à la vie de l’Amazonie, de faire le point sur les dernières recherches concernant la forêt tropicale et de lui dire ce qu’elles signifient pour l’humanité.

Question: La déforestation et la destruction de l’Amazonie ont fait les gros titres ces derniers temps. Que nous dit la science à ce sujet?

Réponse: « C’est réellement terrifiant. Les constatations rejoignent les discussions sur les ‘points de basculement’ (seuil climatique au-delà duquel le changement d’un écosystème est irréversible et qui verra une partie de l’Amazonie se transformer en savane, ndlr).

Une étude a montré que dans le sud-est de l’Amazonie, pendant la saison sèche, la température avait augmenté de 2,5 degrés (en 40 ans). C’est franchement apocalyptique. Je pense que même les experts n’étaient pas préparés à cela. Les Accords de Paris (sur le climat) tentent de limiter la hausse de la température dans le monde à 1,5 degré et 2,5 degrés pour l’Amazonie c’est énorme.

Et dans le nord-est (de l’Amazonie), nous avons vu une chute de 34% des précipitations lors de la saison sèche (d’août à octobre). 

L’implication de tout cela est que si on a un climat plus chaud et plus sec, les feux vont se multiplier dans la forêt. Après, ça fonctionne en boucle et c’est le cercle vicieux de l’horreur. »

Q: Avons-nous encore le temps de sauver l’Amazonie? Et que se passe-t-il si la réponse est non?

R: « C’est la question à un million d’euros. Ce n’est qu’une fois qu’on aura dépassé le point de basculement qu’on saura qu’on l’a franchi. C’est ça la définition du point de basculement, vers lequel différentes régions de l’Amazonie se dirigent, chacune à son rythme.

« Si on dépasse le point de basculement, c’est la fin. Et je ne dis pas cela à la légère. Nous parlons ici de l’effondrement de l’endroit à la plus riche biodiversité de la planète. De millions et de millions d’humains devenant des réfugiés climatiques. De cycles de pluies perturbés dans toute l’Amérique du Sud. 

Sans les précipitations, nous n’avons plus d’hydroélectricité, ce qui veut dire l’effondrement de l’industrie du Brésil, et donc l’effondrement de l’une des plus grandes économies mondiales, de l’un des plus grands fournisseurs d’aliments à la planète. Nous ne pouvons pas vivre dans un monde sans Amazonie. »

Q: Sur votre profil WhatsApp, le mot « espoir » est écrit en majuscules. Qu’est-ce qui vous permet de rester optimiste pour l’Amazonie?

R: « Le chocolat! (rire). Non, sérieusement il y a réellement des raisons d’espérer des changements. Au cours de ma vie, j’ai assisté à une baisse de plus de 80% de la déforestation, entre 2004 et 2012. Ce n’était pas facile. Il faut une coordination entre plusieurs agences (de protection de l’environnement, ndlr). Mais on l’a fait. Pourquoi ne le referait-on pas?

Dans le monde, il y a plusieurs niveaux de solutions pour chacun. Tout le monde doit réduire son empreinte carbone. Personne ne va retourner vivre dans une cave, mais nous devons mener une réflexion sur ce que nous pouvons faire.

Nous devons aussi insister sur une transparence sur les matières premières qui viennent d’Amazonie. Savoir d’où provient notre or, savoir d’où provient notre viande de bœuf.

Mais avant cela, nous devons insister pour voir des changements structuraux. Nous devons mettre la pression sur nos gouvernements et nos entreprises pour qu’elles réduisent leurs émissions. »


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