Le recteur de Paris Christophe Kerrero a annoncé vendredi quitter ses fonctions dans une lettre aux personnels de l’académie, sur fond d’échec de son projet de réforme des classes préparatoires dans la capitale destiné à introduire davantage de mixité sociale.
Cette décision rarissime pour un recteur, celui de Paris est considéré comme l’un des plus hauts cadres de l’Éducation nationale, survient après la suspension mercredi par le ministère de l’Éducation d’un projet du rectorat visant à fermer plusieurs classes préparatoires à la rentrée 2024 et en ouvrir trois autres à vocation « plus sociale » dont l’une au lycée Henri-IV pour des futurs professeurs des écoles et deux pour des lycéens professionnels.
Selon une source proche du rectorat, « M. Kerrero ne pouvait pas continuer à porter la carte scolaire après que la ministre Oudéa-Castéra l’a désavoué sans l’en prévenir dans une instance qui est le Conseil supérieur de l’éducation ».
« Je quitte aujourd’hui mes fonctions de recteur de l’académie de Paris, quand notre École est en proie au doute et que la situation exige pourtant une mobilisation de chacun de ses acteurs », écrit M. Kerrero dans sa lettre aux personnels de l’académie.
Je prends acte de la démission de @ckerrero, qui a tant fait pour l’école et la réussite de tous les élèves. Je souhaite saluer son parcours exemplaire et son engagement en faveur de la mixité sociale, tout particulièrement à Paris, où nous poursuivrons, comme je m’y suis… https://t.co/MrEBYpVqK2
— Amélie Oudéa-Castéra (@AOC1978) February 2, 2024
Interrogée vendredi matin sur TF1, avant l’annonce de Christophe Kerrero, la ministre a assuré ne pas « songer à démissionner ». Elle a ensuite « pris acte » de la « démission » du recteur dans un message sur X (ex-Twitter) où elle salue « son parcours exemplaire et son engagement en faveur de la mixité sociale ». « Nous poursuivrons, comme je m’y suis engagée, l’ensemble des chantiers qu’il a impulsés en faveur de l’égalité des chances », écrit la ministre.
« Toutes les mesures de soutien des élèves en termes de promotion et de mixité sociale prises par le recteur de Paris sont soutenues et financées. Elles seront toutes réalisées », a-t-on continué de même source.
« Le rectorat de Paris avait envisagé trois fermetures de classes pour financer ces initiatives. La ministre assume son choix de lancer un moratoire sur ces fermetures, et de soutenir ainsi plus fortement encore le projet social du rectorat et l’offre existante », a-t-on complété.
M. Kerrero, ancien directeur de Jean-Michel Blanquer était recteur de l’académie de Paris depuis juillet 2020. Le rectorat avait décidé de fermer trois classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE) : une prépa aux écoles de commerce (prépa ECG) au lycée Jacques Decour, dans le 9e arrondissement, une classe de première année littéraire (hypokâgne) au lycée Lamartine (9e) et une de deuxième année littéraire (khâgne) au lycée Chaptal (8e). L’annonce de ces fermetures avait mobilisé ces dernières semaines enseignants et élèves, avec notamment une pétition « contre la fragilisation des parcours littéraires ».
« Un désaccord de fond »
« Que la ministre tranche dans le sujet de la carte nationale des classes prépas, cela fait partie de ses prérogatives, mais cela aurait pu être amené autrement », a réagi auprès de l’AFP Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Snes-FSU pour les collèges et lycées.
Jean-Rémi Girard, du Snalc, confirme : « Nous souhaitions qu’il n’y ait pas de fermeture de ces classes prépas, mais je suis certain que des marges budgétaires étaient possibles à trouver pour ouvrir celles que proposaient M. Kerrero, qui en plus se tournaient vers les lycéens professionnels. » « La démission est un acte très rare à ce poste. On comprend que s’il s’est senti désavoué, il s’en aille. Ça nous paraît même sain pour un haut fonctionnaire de faire ça », a lancé M. Girard.
Nouveau coup dur pour Mme Oudéa-Castéra ? « C’est certainement une pierre de plus dans le jardin pour la ministre. Une démission de recteur, c’est très fort », a ajouté Sophie Vénétitay. « Si on lit en creux le message du recteur, on note aussi un désaccord de fond sur les questions de mixité sociale et réussite des élèves. Les classes prépas ont été la goutte d’eau », selon elle.
Comment pouvez-vous nous aider à vous tenir informés ?
Epoch Times est un média libre et indépendant, ne recevant aucune aide publique et n’appartenant à aucun parti politique ou groupe financier. Depuis notre création, nous faisons face à des attaques déloyales pour faire taire nos informations portant notamment sur les questions de droits de l'homme en Chine. C'est pourquoi, nous comptons sur votre soutien pour défendre notre journalisme indépendant et pour continuer, grâce à vous, à faire connaître la vérité.