Nouveau Front populaire : les ennemis d’hier sont les amis d’aujourd’hui

Par Germain de Lupiac
14 juin 2024 14:18 Mis à jour: 24 juin 2024 19:18

Le PS, les Écologistes, La France Insoumise, Le Parti communiste français et Place publique se sont entendus sur « un programme de gouvernement » commun, et des candidatures uniques dans les 577 circonscriptions, qu’ils ont présenté en conférence de presse le 14 juin à la maison de la Chimie à Paris.

En 2022, les négociations pour former la Nupes avaient duré 13 jours. En 2024, les partis de gauche auront réussi à s’entendre autour d’un « Nouveau Front populaire » en quatre jours – un record, même si l’expérience de la Nupes a donné un schéma directeur dans les négociations.

Cette coalition des gauches et des écologistes est un pari des plus risqués alors que depuis plusieurs mois, les relations étaient au plus bas, voire exécrables, entre les communistes, les Insoumis, les socialistes et les Écologistes.

Une nouveauté pour ce front, les demandes de Raphaël Glucksmann de Place Publique et de Fabien Roussel du PCF d’avoir une gauche apaisée reconnaissant les actes terroristes du Hamas du 7 octobre et les condamnant.

Refaire la Nupes en 2024 pour battre le RN

Si Place Publique de Raphaël Glucksmann est sorti grand vainqueur, à gauche, des élections européennes, les tractations politiques pour accoucher du Nouveau Front populaire ont été favorables à LFI qui a obtenu 229 candidatures (131 de moins qu’en 2022), contre 175 sièges pour le Parti socialiste, 92 pour les Écologistes et 50 pour les communistes.

Pendant les semaines de campagne pour les Européennes, les Insoumis avaient régulièrement attaqué Raphaël Glucksmann, tête de liste PS-Place publique, et tenté de siphonner le vote écologiste.

Raphaël Glucksmann, qui avait été injurié et menacé par les militants de LFI dans une campagne cristallisée à l’extrême gauche par le conflit entre la Palestine et Israël, a finalement accepté de réformer l’ancienne Nupes, avec comme premier objectif de battre le RN.

Le camp socialiste a donc mis de côté les positions de LFI franchissant la « ligne jaune » sur l’antisémitisme – comme l’avait concédé Olivier Faure au Figaro, et les déclarations du NPA de Philippe Poutou, saluant l’attaque terroriste du Hamas du 7 octobre.

Des conditions ont, pour cela, été posées sur la table par Raphaël Glucksmann pour sceller cet accord, représenté par Aurore Lalucq.

La fin de la « brutalisation » de la vie politique, à gauche

Sur le site, Nouveaufrontpopulaire.fr, on peut lire que l’objectif du Nouveau Front populaire est de « gouverner pour répondre aux urgences démocratiques, écologiques, sociales et pour la paix ».

Cette question de la paix voulue à l’international est d’autant plus importante à l’intérieur du pays, lorsque l’on connaît les méthodes violentes utilisées par les black blocs et les antifa, appelant ouvertement à la mort de policiers ou organisant des expéditions punitives contre des opposants politiques, ou encore les manifestations pro-Palestine soutenues par LFI, appelant à la mort des Juifs et d’Israël.

C’est pourquoi Raphaël Glucksmann a tenu à diminuer l’emprise de Jean-Luc Mélenchon sur la gauche au lendemain de la dissolution, en informant Olivier Faure du PS des lignes rouges à ne pas dépasser dans les négociations de ce nouveau rassemblement. Parmi ces lignes rouges, le refus de tout antisémitisme, la définition du Hamas comme « terroriste » et la condamnation de toute « brutalisation » de la vie politique, selon Le Point.

L’idée pour Place Publique est de permettre à la gauche de redevenir une gauche humaniste et démocratique, évitant l’utilisation de la violence et de l’intimidation comme stratégie politique. Cela durera, si tout se passe bien, le temps de la campagne, la Nupes ayant montré les premiers désaccords quelques jours après son élection en 2022.

Le programme du Nouveau Front populaire

Le Nouveau Front populaire a annoncé plusieurs engagements pour répondre aux préoccupations des Français lors de la conférence de presse commune du 14 juin.

Tout d’abord, ils abrogeront les réformes des retraites, de l’assurance-chômage et sur l’immigration voté par Renaissance et LR. Ils promettent de redonner du « pouvoir de vivre » aux Français avec une revalorisation des minimas sociaux, du SMIC – qui passerait à 1600 euros net, des salaires, avec le gel des tarifs énergétiques, une allocation d’autonomie pour les jeunes, une indexation des salaires et de retraites sur l’inflation, et un encadrement des prix des loyers. Des mesures fiscales seront également mises en place comme la taxation des superprofits et la taxation des plus riches.

Le Nouveau Front populaire veut aussi donner des moyens à un « service public accessible et de qualité, pour l’école en recrutant des enseignants en nombre suffisant, dignement valorisés, et en ayant moins d’enfants par classe ; pour nos universités, pour l’hôpital public et en combattant les déserts médicaux ».

Le texte affirme par ailleurs « un soutien indéfectible à la résistance ukrainienne, a-t-elle assuré. Avec cependant « des lignes rouges, notamment sur l’intervention militaire de troupes françaises au sol », a précisé Manuel Bompard sur RTL. Sur le sujet, les différents partis du Nouveau Front populaire n’ont pas tous les mêmes positions, des points qui pourront être discutés en Assemblée, a répondu la député Insoumis.

Sur le sujet sensible du conflit entre Israël et le Hamas, « nous nous sommes accordés pour défendre ensemble la reconnaissance de l’État de Palestine, des sanctions contre le gouvernement de (Benjamin) Netanyahu », ainsi qu’un « embargo sur les armes » vendues à Israël, a déclaré Manuel Bompard, parlant d’arrêter le « massacre en Palestine ». Le texte commun condamne les « massacres terroristes » commis par le Hamas le 7 octobre, et réclame « la libération de tous les otages », a indiqué la députée LFI sortante Clémentine Autain sur Sud Radio.

Pas d’accord par contre dans le programme sur le nucléaire, les Écologistes s’y opposant fortement, la gauche vantant plutôt une accélération du développement des énergies renouvelables et la fin des voitures thermiques.

La photo d’une gauche unie

Olivier Faure, Marine Tondelier, Fabien Roussel, Manuel Bompard et Aurore Lalucq visiblement fatigués mais souriants, ont posé pour la photo, sous les applaudissements des militants.

Jean-Luc Mélenchon a salué l’accord et François Hollande s’est dit « favorable » pour faire barrage au RN. Raphaël Glucksmann, absent de la conférence de presse, a annoncé le matin le valider, malgré ses désaccords avec LFI.

Reste à savoir qui pourrait être désigné Premier ministre en cas de majorité à l’Assemblée. Si LFI sort vainqueur de cette nouvelle coalition à gauche, les déclarations de Jean-Luc Mélenchon pendant la campagne des Européennes semblent le disqualifier. Un avis que ne partage pas Olivier Faure qui ne le disqualifie pas pour autant, déclarant que « ce choix sera un choix collectif ».

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

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