« Je suis révoltée » : la fille d’une professeure ouïghoure réputée qui aurait été condamnée à la prison à vie en Chine affirme être sans nouvelle de sa mère et espère recueillir le soutien d’universitaires étrangers.
La fondation Dui Hua, organisation américaine de défense des droits qui dialogue avec le gouvernement chinois, a affirmé le mois dernier que la chercheuse Rahile Dawut a été condamnée pour « atteinte à la sécurité de l’État ». Les autorités chinoises n’ont ni confirmé ni infirmé cette information.
Rahile Dawut est une ethnographe spécialiste du folklore et des traditions des Ouïghours, un groupe ethnique musulman qui réside principalement dans le Xinjiang (nord-ouest de la Chine). Elle ferait partie du plus d’un million de Ouïghours et membres d’autres minorités musulmanes qui ont ou auraient été détenus dans cette région, selon des études occidentales.
« Si elle allait bien, pourquoi je ne pourrais pas lui parler ? »
Longtemps frappé par des attentats sanglants attribués par les autorités à des islamistes et des séparatistes, principalement ouïghours, le Xinjiang fait l’objet depuis plusieurs années d’une ferme campagne de sécurité menée au nom de l’antiterrorisme. L’ONU a évoqué l’an passé la forte probabilité de « détention arbitraire ».
Dans ce contexte, Akeda Pulati, la fille de Rahile Dawut, lance désormais un appel aux universitaires du monde entier afin qu’ils mettent la pression sur Pékin. « J’espère qu’ils ne resteront pas silencieux », déclare-t-elle au téléphone à l’AFP depuis les États-Unis, où elle réside. « Je veux que le monde et les organisations humanitaires n’oublient jamais le peuple ouïghour, qui souffre toujours », affirme-t-elle.
« Je suis révoltée (…) Si ma mère devait passer sa vie en prison, ce serait pour moi une douleur inimaginable et insupportable, pour le reste de ma vie. » Interrogé le mois dernier, le ministère chinois des Affaires étrangères a répondu n’avoir aucune information à fournir sur l’universitaire.
Akeda Pulati déclare n’avoir plus de nouvelles de sa mère depuis décembre 2017, juste avant le début supposé de sa détention. « Je suppose que c’est vraiment grave parce que si elle allait bien, pourquoi je ne pourrais pas lui parler ? », affirme-t-elle. Akeda Pulati dit être toujours en contact avec son père et sa grand-mère, qui habitent au Xinjiang et lui disent que sa mère est vivante. « Je dois m’assurer qu’ils sont en sécurité, je ne veux pas leur causer d’ennuis », affirme-t-elle. « Je ne peux pas leur demander trop de détails, sinon ils deviennent stressés. »
« Persécuter les Ouïghours et effacer l’identité culturelle ouïghoure »
Rahile Dawut semblait être une citoyenne chinoise modèle : réputée dans son domaine de recherche, membre du Parti communiste, elle a ouvert la voie aux femmes dans son secteur. « Tout ce qu’elle faisait, c’était d’étudier la culture et la préserver », affirme sa fille.
Selon des organisations de défense des droits de l’homme, des centaines de chercheurs, d’universitaires, de journalistes et d’autres personnes ont été placés en détention au Xinjiang. « Le gouvernement chinois veut persécuter les Ouïghours et effacer l’identité culturelle ouïghoure en persécutant et en emprisonnant les intellectuels », affirme Akeda Pulati.
Les autorités du Xinjiang démentent fermement avoir emprisonné des Ouïghours dans des « camps de rééducation », comme l’affirment des organisations occidentales. La Chine présente ces infrastructures comme des « centres de formation professionnelle » ayant permis, selon elle, d’enseigner un métier aux habitants, de les éloigner de l’extrémisme et de leur assurer une vie meilleure. Tous ont « achevé leur formation », assure Pékin, mais des chercheurs occidentaux affirment que des détentions se poursuivent à l’abri des regards.
En juillet au Xinjiang, l’AFP a eu un aperçu de la manière dont les autorités cherchent à remodeler la culture ancienne de la région, populaire en Chine, afin d’attirer encore davantage de touristes. « Ils persécutent les personnes qui, comme ma mère, préservent la culture ouïghoure », affirme Akeda Pulati. « De l’autre côté, ils essaient de tirer profit de la culture ouïghoure en la commercialisant », accuse-t-elle.
Les États-Unis ont appelé la Chine à libérer Rahile Dawut « immédiatement ». Mais sa fille juge que la situation au Xinjiang n’intéresse plus vraiment grand monde. « Chaque fois qu’un événement important se produit, le peuple ouïghour est généralement oublié par la communauté internationale », déplore-t-elle.
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