La police pakistanaise garde jeudi le quartier chrétien pris d’assaut la veille par des musulmans dans l’Est du pays, les autorités locales ayant annoncé plus de cent arrestations après les violences déclenchées par des accusations de profanation du Coran.
Des centaines de personnes de confession musulmane ont déferlé mercredi dans les rues du quartier chrétien de Jaranwala, en banlieue de la ville industrielle de Faisalabad, dans l’État du Pendjab. Plusieurs églises ont été incendiées et un cimetière chrétien vandalisé. L’assaut a été déclenché lorsqu’un groupe de fanatiques religieux a accusé une famille d’avoir blasphémé contre le texte sacré de l’islam.
Churches ransacked, Bibles burned and Christians tortured in Pakistan.
The world is silent.
Pray for Pakistani Christians. pic.twitter.com/dDcZjU1dca— Paul Golding (@GoldingBF) August 16, 2023
Un porte-parole du gouvernement du Pendjab a indiqué dans un communiqué que plus d’une centaine de personnes ont été arrêtées et que la police était aussi à la recherche de la famille visée. « Le Coran a été profané et les sentiments des musulmans blessés. L’ordre a été donné d’arrêter les accusés », précise le document.
« De sérieux dommages »
Yasir Bhatti, un Pakistanais chrétien âgé de 31 ans, a raconté avoir fui sa maison, située à proximité d’une des églises incendiées. « Ils ont cassé les fenêtres, les portes et sorti les réfrigérateurs, les canapés, les chaises et d’autres meubles pour les empiler en face de l’église et les brûler. Ils ont aussi brûlé et profané des Bibles », a-t-il affirmé, interrogé au téléphone par l’AFP.
Une vidéo montre la foule exigeant que les blasphémateurs présumés soient punis alors qu’une croix est arrachée du haut d’un bâtiment. « La foule a infligé de sérieux dommages, y compris à des maisons de chrétiens et à plusieurs églises », a affirmé à l’AFP un responsable du gouvernement local, Ahad Noor.
Dans d’autres vidéos publiées sur les réseaux sociaux, on peut voir des responsables musulmans utiliser des hauts-parleurs pour appeler leurs fidèles à agir. « Les chrétiens ont profané le Coran. Tous les religieux, tous les musulmans doivent s’unir et se rassembler devant la mosquée. Mieux vaut mourir si vous ne vous souciez pas de l’islam », clame un religieux.
« Nous appelons à la justice et à l’action de la part des forces de l’ordre et de ceux qui rendent la justice (…) afin qu’ils interviennent immédiatement et nous assurent que nos vies ont de la valeur dans notre propre patrie », a posté sur le réseau social X l’évêque de la ville voisine de Lahore, Azad Marshall.
#PAKWatch: In Pakistan, armed mobs attacked two churches in Punjab’s Jaranwala town over alleged blasphemy by Christian residents. Just further confirmation of Hanke’s School Boys Theory of History: It’s just one damn thing after another.pic.twitter.com/9gyGIw4DTH
— Steve Hanke (@steve_hanke) August 16, 2023
Les lois sur le blasphème, des armes pour cibler les minorités religieuses
La question du blasphème est particulièrement sensible au Pakistan, où même des allégations non-prouvées d’offense à l’islam peuvent entraîner assassinats et lynchages. La Commission indépendante des droits de l’homme au Pakistan a plusieurs fois souligné que les lois sur le blasphème étaient utilisées comme des armes pour cibler les minorités religieuses et régler des vendettas personnelles, et que ces incidents violents étaient en augmentation constante depuis plusieurs années.
Les chrétiens, qui représentent environ 2% de la population, occupent l’un des échelons les plus bas de la société pakistanaise et sont fréquemment la cible d’allégations de blasphème fallacieuses et infondées. Des politiciens ont été assassinés, des avocats tués et des étudiants lynchés après de telles accusations.
Les États-Unis ont exhorté le gouvernement pakistanais à enquêter sur les attaques. « Nous sommes profondément choqués que des églises et des maisons aient été ciblées en réponse à une prétendue profanation du Coran au Pakistan », a déclaré mercredi le porte-parole du département d’État, Vedant Patel. « La violence ou la menace de violence n’est en aucun cas une forme acceptable d’expression », a-t-il rappelé. « Nous exhortons les autorités pakistanaises à mener une enquête complète sur ces allégations et à appeler au calme ».
Le nouveau Premier ministre par intérim du Pakistan, Anwaar-ul-Haq Kakar, s’est dit sur X « dégoûté » par ces événements, annonçant des « mesures sévères contre ceux qui violent la loi et ciblent les minorités ».
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