Pékin dévoile des techniques de coupage de câbles pour ébranler Taïwan

Ces dernières années, des cargos chinois ont été associés à de nombreux câbles sous-marins endommagés dans le monde entier

Par Haizhong Ning, Luo Ya et Cindy Li
28 mars 2025 23:15 Mis à jour: 29 mars 2025 07:48

Une récente révélation publique d’une technologie chinoise de coupure de câbles capable de perturber les communications mondiales a suscité l’inquiétude des experts militaires taïwanais.

Le Centre chinois de recherche scientifique sur les navires (CSSRC : China Ship Science Research Center) et son laboratoire affilié de véhicules habités en haute mer (State Key Laboratory of Deep-Sea Manned Vehicles) ont mis au point un dispositif de coupe de câbles en haute mer, qui cible les câbles blindés assurant 95 % de la transmission mondiale de données, selon un rapport publié le 22 mars par le South China Morning Post (SCMP), un journal en langue anglaise basé à Hong-Kong.

D’après un article publié le 24 février dans la revue Mechanical Engineer en langue chinoise, cité par le SCMP, cet équipement de coupe de câbles en eau profonde peut fonctionner à des profondeurs allant jusqu’à 4000 mètres, soit deux fois la portée opérationnelle de l’infrastructure de communication sous-marine existante.

Selon le SCMP, « c’est la première fois qu’un pays révèle officiellement qu’il dispose d’un tel atout, capable de perturber des réseaux sous-marins critiques ».

Le développement par le régime chinois d’une technologie de coupure des câbles a suscité des inquiétudes quant à la menace qu’elle représente pour les réseaux de communication mondiaux et la sécurité maritime. Ces dernières années, plusieurs incidents de câbles sous-marins endommagés à travers le monde ont été imputés à Pékin, et des cargos chinois ont été impliqués à plusieurs reprises.

En octobre 2023, le NewnewPolar Bear, un porte-conteneurs chinois battant pavillon de Hong Kong, a endommagé un gazoduc entre la Finlande et l’Estonie. Les autorités finlandaises et estoniennes n’ont pas encore précisé si elles considéraient l’incident comme intentionnel ou accidentel.

En novembre 2024, deux câbles de télécommunications reliant la Suède et le Danemark dans la mer Baltique ont été sectionnés. Un vraquier chinois, le Yi Peng 3, qui a traversé la zone où les câbles ont été coupés, est recherché par les autorités suédoises, mais Pékin refuse d’accorder un accès complet au navire.

En janvier, le Shunxin-39, un cargo appartenant à une société basée à Hong Kong mais immatriculé au Cameroun et en Tanzanie, aurait endommagé l’un des 14 câbles reliant Taïwan à l’Asie continentale.

Le 25 février, Taïwan a arrêté le Hong Tai 58, un cargo soutenu financièrement par la Chine, soupçonné d’avoir sectionné le câble sous-marin de l’île autonome.

Cartes indiquant les endroits où des câbles ont été endommagés en mer Baltique et près de Taïwan par des navires liés au régime communiste chinois. (Illustration par The Epoch Times, Shutterstock)

Maximiser la pression sur Taïwan

Le régime chinois dispose depuis longtemps de ce type de technologie, a déclaré à Epoch Times Wang Hsiu-Wen, chercheuse adjointe à l’Institut taïwanais de recherche pour la défense et la sécurité nationales.

Selon l’analyse de Mme Wang, dans les cas précédents de détérioration de câbles, il n’est pas exclu que le Parti communiste chinois (PCC) ait délibérément sectionné les câbles pour permettre aux câblo-opérateurs chinois d’obtenir des contrats, voire pour exercer des représailles contre les pays démocratiques qui n’ont pas adopté les équipements de communication de Huawei.

Cette fois-ci, le PCC montre sa capacité à couper les câbles sous-marins, mettant en exergue ses avancées dans la technologie des fonds marins et influençant le sentiment et le moral de l’opinion publique taïwanaise, a-t-elle ajouté.

Pour Mme Wang, il s’agit d’une menace importante pour la sécurité des communications mondiales, en particulier pour les infrastructures critiques de Taïwan.

Alors que les technologies de pointe sont principalement développées pour améliorer le bien-être de l’homme et perturbent rarement le confort de vie, le PCC s’engage en fait dans une « application malveillante » des technologies avancées, a souligné Mme Wang.

Au lieu d’utiliser cette technologie pour des opérations de sauvetage ou de développement sous-marin, le régime chinois s’en sert pour cibler les câbles d’autres pays, a poursuivi Mme Wang. Elle note que la Chine a également équipé des satellites de bras robotisés, non pas pour collecter des débris spatiaux, mais pour s’emparer de satellites en orbite appartenant à d’autres pays.

En ce qui concerne Taïwan, le PCC utilise des navires civils pour mener des « opérations en zone grise » en coupant les infrastructures de communication de Taïwan. S’ils sont pris sur le fait, ils prétendent qu’il s’agit d’un accident, ou ils peuvent intentionnellement provoquer un conflit entre les deux rives du détroit avec des navires civils, sachant que Taïwan hésiterait à répondre par la force aux navires civils chinois, a-t-elle ajouté.

Chih-Tung Chung, un autre chercheur assistant à l’Institut national de recherche sur la défense et la sécurité, a convenu qu’il s’agissait d’une application du conflit de la zone grise visant à exercer une pression maximale sur Taïwan.

Il a fait observer à Epoch Times que la récente révélation de la technologie chinoise de coupure de câbles montre clairement que le régime chinois, connu pour sa censure stricte, souhaite faire connaître les dommages potentiels qu’il pourrait causer à Taïwan.

Le PCC pourrait être considéré comme un ennemi public

Selon Mme Wang, si des incidents similaires continuent à se produire, la communauté internationale proposera probablement des réglementations, exigeant que le PCC s’y conforme ou fournisse des compensations.

Le Yi Peng 3, cargo chinois soupçonné d’avoir endommagé deux câbles de télécommunications en mer Baltique, a mouillé dans les eaux internationales entre le Danemark et la Suède pendant plus d’un mois à la fin de l’année 2024. Le PCC a rejeté la demande du procureur suédois d’enquêter sur le navire.

« C’est une chose que le gouvernement prend très au sérieux. Il est remarquable que le navire parte sans que le procureur ait la possibilité de l’inspecter et d’interroger l’équipage en vertu d’une enquête criminelle suédoise », a déclaré la ministre suédoise des Affaires étrangères, Maria Malmer Stenergard, dans des commentaires transmis au Financial Times.

Le vraquier chinois Yi Peng 3 est ancré dans la mer de Kattegat, près de la ville de Granaa dans le Jutland, au Danemark, le 20 novembre 2024. (MIKKEL BERG PEDERSEN/Ritzau Scanpix/AFP via Getty Images)

M. Chung estime que ces coupe-câbles sous-marins sont non seulement installés sur des navires de surface déguisés en cargos ou en bateaux de pêche, mais qu’ils peuvent également être montés sur des véhicules sous-marins, ce qui les rend pratiquement impossibles à contrer.

« Fondamentalement, il s’agit d’une violation des règles internationales, tout comme la piraterie », a-t-il souligné.

Néanmoins, M. Chung estime que les actions du PCC se retourneront contre lui et feront de lui un ennemi public au niveau international.

« En effet, aujourd’hui, les câbles sous-marins ne font pas seulement l’objet d’investissements par Taïwan, mais impliquent également une coopération avec la Corée du Sud, le Japon et les États-Unis », a-t-il fait valoir. « Si la Chine coupe les câbles de Taïwan, Taïwan ne sera pas le seul à en pâtir, les États-Unis, le Japon et la Corée du Sud seront également touchés. »

« En fin de compte, l’évaluation négative du régime du PCC par la communauté internationale deviendra de plus en plus sévère. »

Soutenez Epoch Times à partir de 1€

Comment pouvez-vous nous aider à vous tenir informés ?

Epoch Times est un média libre et indépendant, ne recevant aucune aide publique et n’appartenant à aucun parti politique ou groupe financier. Depuis notre création, nous faisons face à des attaques déloyales pour faire taire nos informations portant notamment sur les questions de droits de l'homme en Chine. C'est pourquoi, nous comptons sur votre soutien pour défendre notre journalisme indépendant et pour continuer, grâce à vous, à faire connaître la vérité.