Une heure à peine avant le 1er juillet, date du 23e anniversaire du passage de la Grande-Bretagne coloniale, Hong Kong publiait le texte de la loi de sécurité nationale de Pékin, qui stipule que les délinquants, s’ils sont reconnus coupables, seront passibles de l’emprisonnement à vie.
Avec la promulgation de la nouvelle loi sur la sécurité nationale, Hong-Kong bascule vers le régime juridique de la république populaire chinoise, perdant ainsi son autonomie et ses libertés. On craint une nouvelle ère de régime autoritaire.
La nouvelle loi confère à Pékin un large pouvoir ciblant des individus pour tout acte de sécession, de subversion, de terrorisme et de collusion avec des forces étrangères. Pékin, seul interprète de l’application de la loi, va instaurer un Bureau de sécurité pour instruire et superviser le gouvernement de la ville de Hong Kong, et exercera un contrôle ultime sur les « cas compliqués », tels que ceux impliquant des étrangers.
Exempte de la juridiction du gouvernement de Hong Kong, l’agence définira les quatre principales violations en termes généraux. Les activités terroristes comprennent les menaces à l’encontre du gouvernement central, les autorités de Hong Kong ou les organisations internationales « dans le but d’atteindre des objectifs politiques » ; « les organisations ou la direction de groupes terroristes » et le recours à « d’autres méthodes dangereuses mettant gravement en danger la santé ou la sécurité publiques ».
La collusion avec des forces étrangères implique de 1) collecter des renseignements pour des institutions extérieures ou étrangères, 2) recevoir des fonds ou du soutien extérieur pour interférer avec les politiques chinoises et hongkongaises, 3) saper les élections locales, 4) imposer des sanctions et 5) « provoquer de la haine » envers les autorités. Les personnes qui résident en dehors de Hong Kong et qui violent la loi sur la sécurité seraient également poursuivies, conformément à l’article 38.
Les autorités peuvent saisir les documents de voyage des contrevenants, geler ou confisquer leurs avoirs, demander des informations à des organisations étrangères et mettre sur écoute les personnes suspectes dans le cadre d’une enquête.
Les fournisseurs de services en ligne peuvent être invités à retirer des informations offensantes ou à coopérer avec les autorités dans le cadre d’une enquête pénale, conformément à l’article 43.
LIHKG est l’un des forums en ligne les plus populaires où les manifestants convergent pour discuter de leurs projets d’avenir. Après l’entrée en vigueur de la loi sur la sécurité, LIHKG Picks, un groupe de bénévoles qui gère les contenus liés aux manifestations sur la plateforme et les traduit, a annoncé que ses administrateurs de Hong Kong se sont retirés du compte et que leur travail serait transféré à l’étranger. « Nous continuerons aussi longtemps que nous le pourrons », a-t-il déclaré dans un tweet.
Le régime chinois a la juridiction ultime sur les affaires de sécurité. « Le gouvernement populaire central a la responsabilité suprême des affaires de sécurité nationale relatives à la Région administrative spéciale de Hong Kong », a-t-il déclaré dans l’article 2 de la loi.
Les juges pourraient être empêchés de présider au tribunal si leurs paroles et leurs actes sont considérés comme « mettant en danger la sécurité nationale ». La loi stipule également que le Bureau de sécurité « resserrera la gestion » des agences de presse non gouvernementales et des organisations étrangères à but non lucratif.
Les inquiétudes concernant l’avenir de Hong Kong n’ont pas tardé à se manifester. Quelques heures après la promulgation officielle de la loi par Pékin, de nombreux groupes pro-démocratiques, dont Demosisto, cofondé par l’éminent militant Joshua Wong, ont annoncé leur dissolution.
Bien qu’il n’y ait pas eu de référence directe aux manifestants pro-démocratie de Hong Kong, les mesures prévues par la loi, telles que l’interdiction de saboter les installations de transport et de fournir des moyens de transport ou des fournitures aux terroristes, semblent viser à décourager les manifestants qui ont parfois vandalisé des installations publiques pour protester contre l’ingérence chinoise l’année dernière.
« Le pire scénario n’est plus une possibilité politique abstraite – on frappe à la porte de Hong Kong », a clamé Walter Lohman, directeur du Centre d’études asiatiques de la Fondation Heritage, dans un communiqué. Il a ajouté : « Pékin est en train de détruire sa crédibilité internationale tout en essayant de convaincre le monde qu’il ‘restaure l’ordre’ à Hong Kong. »
Dan Garrett, un universitaire et auteur américain qui a fait la chronique du mouvement de protestation à Hong Kong, a précisé que l’utilisation par la loi de termes ambigus, tels que « santé ou sécurité publique », ne sont que des tentatives pour justifier les poursuites politiques de la dissidence.
Les peines sévères constituent une « menace à plusieurs niveaux », a-t-il fait remarquer. En s’en prenant à une ou deux figures clés comme l’éminent militant Joshua Wong et le magnat des médias locaux Jimmy Lai, le régime peut effectivement dissuader d’autres critiques de s’exprimer.
« C’est la fin de Hong Kong et la phase officielle de l’occupation communiste à Hong Kong », a-t-il soupiré, ajoutant qu’il y aura « beaucoup, beaucoup plus de combats » dès que la loi entrera en vigueur.
« La loi sur la sécurité nationale, en fait et en esprit, traite HK comme une insurrection terroriste et un territoire hostile à pacifier », dit-il. « Il y aura maintenant une nation hongkongaise en exil, une nation qui n’abandonnera pas le combat pour sa patrie. »
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