Pékin et Washington semblent être entrés dans une compétition de rendre coup pour coup en matière de commerce. À la fin de l’année dernière, l’administration Biden a imposé des restrictions à l’exportation vers la Chine d’équipements destinés à la fabrication de semi-conducteurs avancés, tout en annonçant des subventions pour la fabrication de semi-conducteurs aux États-Unis. Washington a même obtenu que le Japon et les Pays-Bas se joignent à l’interdiction d’exportation. Aujourd’hui, juste avant le début des négociations commerciales de haut niveau entre la Chine et les États-Unis, Pékin a riposté en imposant des restrictions à l’exportation de deux métaux – le gallium et le germanium – qui sont tous deux essentiels à de nombreuses applications commerciales et militaires. Jusqu’à présent, Washington n’a pas réagi à l’initiative de Pékin.
Sans doute dans la perspective de ces négociations commerciales, Pékin a reporté le début de cette interdiction au 1er août. Cela constitue peut-être une invitation pour Washington à assouplir sa position en tempérant ce qui, ces derniers mois, est devenu une approche de plus en plus hostile à l’égard de la Chine. Néanmoins, Pékin se prépare clairement à utiliser cette arme commerciale. Rappelant la victoire américaine de 2014 à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) lorsque la Chine a interdit l’exportation d’éléments de terres rares, cette dernière interdiction a une structure administrative très différente. Pour qu’il soit plus difficile d’intenter une action devant l’OMC et encore plus de la gagner, Pékin ne se contenterait pas d’interdire les exportations, mais insisterait plutôt pour que les producteurs obtiennent une licence spéciale pour exporter les métaux. Les responsables pourraient alors accorder les licences au cas par cas, en fonction de ce que Pékin qualifierait de protection de la « sécurité et des intérêts nationaux ».
Pour la période à venir, ce n’est pas une mince affaire pour les États-Unis. La Chine est actuellement le premier fournisseur mondial de ces métaux critiques. Les volumes de production et d’échanges sont faibles, mais les métaux sont néanmoins essentiels à la production et à la maintenance des semi-conducteurs, des chargeurs de téléphone, des technologies de missiles, des véhicules électriques, des systèmes de fibre optique, des cellules solaires, etc. À l’heure actuelle, quelque 94 % du gallium et une part comparable de l’approvisionnement mondial en germanium proviennent de Chine. Certes, aucun de ces deux métaux n’est particulièrement rare. En effet, les États-Unis abritent la plus grande mine de germanium au monde. D’importants gisements existent également en Russie, en Belgique et au Canada. Les gisements de gallium se trouvent en Russie, en Ukraine, au Japon et en Corée du Sud. Mais au fil des ans, la Chine a cassé les prix au cours du processus d’extraction et de raffinage, parfois coûteux, si bien que nombre de ces sources sont tombées en désuétude, y compris l’énorme mine de gallium aux États-Unis.
La secrétaire au Trésor, Janet Yellen, s’est récemment rendue en Chine pour des discussions sur le commerce. Elle a critiqué les contrôles à l’exportation et a fait des déclarations conciliantes selon lesquelles les relations devraient prendre la forme d’un « combat où tout le monde gagne ». Bien que Pékin ait donné un mois avant que sa contre-attaque n’entre en vigueur, Janet Yellen a peu de marge de manœuvre pour offrir à Pékin des concessions en échange d’une modification de l’accord proposé sur le gallium et le germanium. Compte tenu de la rhétorique anti-chinoise de Washington et d’autres actions de l’administration Biden, tout assouplissement pourrait être considéré comme une faiblesse à la Maison Blanche.
Même si la secrétaire d’État au Trésor trouve un moyen de sortir de l’impasse actuelle, la menace chinoise sur le gallium et le germanium, ainsi que les menaces antérieures d’interruption de l’approvisionnement en éléments de terres rares, devraient servir de signal d’alarme pour les États-Unis et le reste des pays développés. L’Amérique, tout comme l’Europe et le Japon, doit impérativement diversifier ses sources d’approvisionnement en matières premières et en produits manufacturés en s’éloignant de la Chine, afin de « réduire les risques », selon l’expression préférée par l’Union européenne à celle de « découplage ». Lors des récentes réunions du G-7, le Japon avait déjà mis en garde le monde contre les dangers d’une trop grande dépendance à l’égard des sources d’approvisionnement chinoises. Tokyo a proposé un plan visant à trouver des solutions de remplacement ailleurs dans le monde, en Afrique par exemple, pour les éléments de terre rare, et si nécessaire, à fournir des fonds pour le développement. Jusqu’à présent, aucun autre pays, y compris les États-Unis, n’a montré beaucoup d’enthousiasme pour le plan japonais, mais cette nouvelle menace concernant le gallium et le germanium pourrait bien changer les attitudes à la fois de Washington et des capitales européennes.
Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.
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