Le gouvernement a annoncé jeudi plusieurs mesures pour tenter d’endiguer la plus grave crise de l’eau qu’ait connue Mayotte, due à la sécheresse et aggravée par un manque de longue date d’infrastructures et d’investissements.
L’État va prendre en charge de septembre à décembre les factures d’eau des 310.000 habitants de ce petit archipel français de l’océan Indien, privés d’eau deux jours sur trois depuis un mois, a annoncé Élisabeth Borne à l’issue d’une réunion interministérielle sur le sujet.
Cette décision, prise compte tenu « de la dégradation très importante du service rendu au public », a été saluée par plusieurs acteurs, même si certains en soulignaient les limites, étant donné l’ampleur des difficultés auxquelles Mayotte est confrontée.
Avec @Elisabeth_Borne et @GDarmanin, le Gouvernement a décidé de payer les factures d’eau des Mahorais pendant 4 mois.
Nous élargissons progressivement les bénéficiaires de la distribution d’eau potable.
L’Etat est présent, pour que ce service public indispensable soit rendu. pic.twitter.com/fTgZXF3wdQ
— Philippe Vigier (@VigierPhilippe) October 5, 2023
La mesure coûtera 12 millions d’euros à l’État, a précisé dans la soirée sur franceinfo le ministre délégué chargé des Outre-mer, Philippe Vigier, qui a promis qu’elle serait reconduite « en janvier si l’eau n’est pas revenue de façon courante au robinet ».
Quelque « 110.000, 120.000 personnes » concernées
Le gouvernement prévoit également « d’élargir progressivement » jusqu’à la mi-novembre la distribution de bouteilles d’eau gratuites, limitée à ce jour à 50.000 personnes parmi les plus vulnérables, grâce à davantage d’acheminements de bouteilles depuis La Réunion et l’Hexagone. Quelque « 110.000, 120.000 personnes » seront concernées, a indiqué Philippe Vigier. Quelque 300 militaires et civils seront déployés à Mayotte pour assurer la logistique de cette distribution, dont 50 assistants d’éducation dans les écoles.
En outre, 30 personnels soignants renforceront les effectifs du centre hospitalier de Mamoudzou « dans les prochains jours », et un « dispositif d’aides » aux entreprises touchées par ces pénuries sera mis en place « courant novembre ».
Pour faire face à la crise, l’État a intensifié les coupures d’eau et envisage encore de les étendre, anticipant « six à huit semaines » difficiles. Le département le plus pauvre de France est confronté à sa plus importante sécheresse depuis 1997, alors que son approvisionnement dépend largement des eaux pluviales. Les déficits pluviométriques sont aggravés par un manque d’infrastructures et d’investissements dans un territoire qui, sous pression de l’immigration clandestine venue notamment des Comores voisines, connaît une croissance démographique de 4% par an.
« Il y a eu une sous-estimation de la gravité de la situation »
La prise en charge des factures d’eau est « une bonne nouvelle », a déclaré à l’AFP Sylviane Amavi, membre du collectif Mayotte 2018, groupe de défense des intérêts des Mahorais. « Ça va faire du bien à notre porte-monnaie, les familles vont pouvoir avoir plus de pouvoir d’achat, vu le coup mirobolant des factures. Surtout qu’il faut acheter des bouteilles d’eau, maintenant », explique-t-elle. Les packs d’eau sont actuellement vendus entre 5 et 10 euros à Mayotte.
La députée mahoraise Estelle Youssouffa (Liot) aimerait, elle, que la mesure sur les factures soit « rétroactive ». « Il y a quand même un passif important et la rupture de service, pour laquelle le gouvernement décide de geler ces factures, ne date pas du mois de septembre », a-t-elle réagi auprès de l’AFP.
Tout en estimant sur X (ex-Twitter) que la prise en charge des factures était « une décision de bon sens », le député LR de Mayotte Mansour Kamardine a jugé globalement « insuffisantes » les mesures annoncées. « Il faut une mobilisation beaucoup plus conséquente. Pendant longtemps, les autorités ont levé les mains au ciel pour prier pour la pluie. Et puis il y a eu une sous-estimation de la gravité de la situation », a-t-il accusé auprès de l’AFP.
Deux retenues collinaires quasiment à sec
Les deux retenues collinaires (ouvrages de stockage de l’eau), qui assurent en temps normal 80% de l’approvisionnement, avec les rivières, sont quasiment à sec. Lorsque leur vidange sera complète, courant octobre, le territoire mahorais ne pourra compter que sur ses rivières, ses eaux souterraines et sur la production de son usine de dessalement, en attendant que la saison des pluies permette de recharger les réserves à partir de novembre. Et « il faudra du temps pour réalimenter les retenues collinaires », prévenait récemment le préfet chargé de l’eau à Mayotte, Gilles Cantal.
Des travaux d’urgence ont été engagés (forages, recherche de fuites, interconnexion des réseaux…) mais ne devraient porter leurs fruits qu’à plus long terme. Sont également envisagés la mise en chantier d’une deuxième usine de dessalement et un projet de troisième retenue collinaire.
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