Après presque trois semaines depuis l’inauguration de Joe Biden en tant que président américain, les analystes chinois cherchent des indices qui pourraient donner une idée sur la manière dont son administration abordera la politique envers la Chine.
Tang Jingyuan, analyste des affaires chinoises basé aux États-Unis, conclut que les récents commentaires des membres de l’administration Biden laissent entendre que le nouveau président ne souhaite probablement pas affronter la Chine sur des questions difficiles.
En même temps, Feng Chongyi, professeur d’études chinoises à l’Université technologique de Sydney, en Australie, pense que la confrontation entre les États-Unis et la Chine pourrait préserver le statu quo pour le moment.
De son côté, le journal hongkongais Hong Kong Economic Times estime que Biden pourrait faire la sourde oreille à Pékin, vu qu’il n’a pas encore répondu officiellement aux différents gestes, à la fois « durs » et « doux », du régime chinois qui cherche à renouer les liens avec l’Amérique.
La quête de la Chine
Le 25 novembre 2020, après que les médias américains ont annoncé que Joe Biden serait le vainqueur des élections présidentielles, le dirigeant chinois Xi Jinping lui a adressé ses félicitations, l’invitant à la coopération sino-américaine.
Le 7 décembre 2020, Wang Yi, ministre des Affaires étrangères chinois, a insisté sur ce point lors de sa rencontre avec la délégation de l’US-China Business Council à Pékin : « La Chine et les États-Unis devraient travailler ensemble pour relancer le dialogue, restaurer les relations et rétablir la confiance mutuelle. »
Par la suite, les dirigeants chinois ont durci le ton.
Le 25 janvier 2021, dans son discours lors de la conférence virtuelle du Forum économique mondial (forum de Davos), le dirigeant chinois Xi Jinping a demandé aux pays de rejeter la mentalité de « guerre froide ».
« La confrontation nous mènera à une impasse », a-t-il martelé, soulignant que les pays « ne doivent pas revenir sur le chemin du passé ».
Puis, le 1er février, dans les remarques faites au National Committee on US-China Relations, le diplomate chinois de haut rang Yang Jiechi a averti les États-Unis de ne pas franchir la « ligne rouge » en abordant les questions de Hong Kong, du Tibet, du Xinjiang et de Taïwan.
En même temps, le régime chinois a autorisé sa garde côtière à recourir à la force face à des conflits provenant d’autres pays et a mené des exercices militaires en mer de Chine méridionale du 27 au 30 janvier. Il a également envoyé des dizaines d’avions de combat à survoler la mer de Chine méridionale et le détroit de Taïwan, y compris la zone d’identification de défense aérienne taïwanaise.
Tang Jingyuan a expliqué qu’une telle forme de pression à la fois douce et dure « est une stratégie typique du régime chinois », précisant que le but de Pékin est « de pousser l’administration Biden à un dialogue avec la Chine ».
Les commentaires des États-Unis
Le 2 février, Jen Psaki, la porte-parole de la Maison-Blanche, et Ned Price, le porte-parole du département d’État, ont répondu aux questions des journalistes concernant la politique sino-américaine.
À la question de savoir si Joe Biden avait l’intention de parler avec Xi Jinping, Mme Psaki a répondu : « Je ne peux pas vous dire qu’un appel téléphonique est prévu en ce moment. »
Elle a expliqué que l’administration Biden aborderait les relations stratégiques entre les États-Unis et la Chine « en position de force, ce qui implique un engagement avec nos alliés et partenaires ».
Interrogé sur la réponse du département d’État aux commentaires de Yang Jiechi, Ned Price a déclaré : « Nous demandons à Pékin d’arrêter sa pression militaire, diplomatique et économique sur Taïwan et d’engager plutôt un dialogue sérieux avec les dirigeants taïwanais démocratiquement élus. »
« Nous sommes en concurrence importante avec la Chine », a-t-il ajouté, précisant que le comportement du régime chinois « nuit aux travailleurs américains, efface notre avantage technologique, menace nos alliances et notre influence dans les organisations internationales, et que la Chine se livre à des violations flagrantes des droits de l’homme qui choquent la conscience ».
Cependant, Ned Price a également noté que la Chine et les États-Unis pourraient coopérer « sur une base limitée » sur des questions d’intérêt commun, comme le changement climatique, en sollicitant l’aide d’alliés en Europe, en Amérique du Nord et dans l’Indo-Pacifique.
L’analyse
En se basant sur les briefings de Psaki et de Price, le Hong Kong Economic Times a conclu que Biden n’aurait pas une attitude aussi favorable envers la Chine que l’ancienne administration Obama.
De son côté, Tang Jingyuan a une opinion différente.
« Nous savons que l’administration Trump a mis en place des politiques très restrictives à l’égard du régime chinois. Il est impossible pour l’administration Biden de renverser cette politique du jour au lendemain », a-t-il expliqué. Cependant, plusieurs démarches de la nouvelle administration américaine indiquent qu’elle relâche la pression sur la Chine.
M. Tang s’est référé à l’ordre exécutif du département du Trésor du 27 janvier, qui révise l’interdiction des investissements américains dans les sociétés chinoises liées à l’armée en accordant une exception jusqu’à la fin mai 2021 aux entreprises chinoises dont les noms sont similaires, mais pas exactement les mêmes que ceux de la liste noire.
Le professeur Feng Chongyi de l’Université technologique de Sydney a indiqué que les États-Unis et la Chine ont des différences fondamentales qui seraient difficiles à résoudre – en particulier les valeurs que chaque pays reconnaît et leurs systèmes politiques.
En même temps, concernant les questions de la « ligne rouge » dont a parlé Yang Jiechi, on constate un consensus bipartite parmi les responsables américains qu’il faut tenir le régime chinois responsable des violations des droits de l’homme à Hong Kong, au Xinjiang et au Tibet, ainsi que sur le fait qu’il faut soutenir Taïwan, a poursuivi le professeur.
L’administration Trump a sanctionné des hauts fonctionnaires de la Chine et de Hong Kong pour avoir bafoué les libertés à Hong Kong, ainsi que des hauts responsables du Parti communiste chinois pour leur rôle dans les violations des droits de l’homme au Xinjiang, où les Ouïghours et d’autres minorités musulmanes sont sévèrement persécutés.
M. Feng a également constaté que l’administration Trump avait mis en place un cadre général permettant à l’Amérique de faire face au régime communiste chinois. À son avis, il était peu probable que Biden le change à l’heure actuelle.
S’il le faisait, « Biden aurait besoin de prétextes pour modifier la politique de Trump envers la Chine. Jusqu’à présent, les discours des responsables chinois n’ont pas offert de prétextes nécessaires à Biden », a-t-il précisé.
On ne sait pas exactement comment la nouvelle administration américaine traitera les menaces de l’État-parti chinois, bien que les responsables de Biden le décrivent comme un « concurrent mondial » et promettent de restreindre son comportement prédateur.
Selon Feng Chongyi, il ne sera probablement pas facile pour l’administration Biden de changer l’opinion des Américains qui considèrent toujours la Chine comme un adversaire.
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