L’entrepreneur chinois Guo Xueming partage son expérience de partenariat avec des investisseurs japonais en Chine. Il s’agit de la traduction du post du 7 mars sur son compte Wechat par l’Équipe de traduction Epoch Times.
En octobre 2012, Matsumoto Moria, le consul général japonais à Shenyang, m’a invité au restaurant japonais de la galerie marchande Isetan à Shenyang. Il souhaitait connaître mon opinion sur les manifestations antijaponaises, y compris les actes de vandalisme sur des voitures japonaises qui se sont produites dans diverses régions chinoises.
M.Matsumoto prône l’amitié entre le Japon et la Chine. En tant que diplomate, il a activement aidé la Chine à attirer des investissements japonais. Je l’avais rencontré à la cérémonie d’inauguration du parc industriel d’architecture moderne au printemps 2010. Peu de temps après, il a rendu visite à mon entreprise.
Lors de notre première visite, M. Matsumoto voulait savoir comment j’avais réussi en quelques mois, à amener en Chine les groupes Kashima et Lixil, deux des plus grandes entreprises japonaises dans le secteur du bâtiment et en matériaux de construction figurant sur la liste Fortune 500. Les entreprises japonaises ont une approche très conservatrices, et Kashima, fondée en 1840, est encore plus conservatrice, a-t-il expliqué. Notre société a été enregistrée en octobre 2009 avec un capital relativement faible de 100 millions de yuans (92,6 millions d’euros) et nous avons signé des contrats avec Kashima déjà en décembre 2009.
« Votre entreprise a été créée il y a seulement quelques mois. Comment les avez-vous amenés en Chine? », a demandé M. Matsumoto.
J’ai exposé les trois points essentiels à M. Matsumoto.
- La ville de Shenyang a une superficie de 200 km. Cette zone constructible équivaut à celle de tout le Japon.
- La qualité des matériaux de construction est très différente entre la Chine et le Japon, en particulier dans la construction préfabriquée, où la Chine est au plus bas niveau, alors que le Japon est au top niveau mondial. La technologie japonaise de construction préfabriquée a des avantages en Chine lui permettant de s’imposer sur le marché.
- Bien que notre entreprise soit très petite, les membres de notre équipe sont tous des entrepreneurs et nous connaissons bien le marché. Les entreprises japonaises qui veulent investir en Chine ont besoin d’un partenaire qui comprend le marché local.
Ces trois points n’en sont en fait qu’un seul: le marché, le marché, le marché.
Ce qui est le plus important pour les entrepreneurs, c’est le marché. Les entreprises japonaises sont venues sur le marché chinois. Nous avons signé des contrats avec Kashima, ce qui a amené Lixil. Ils ont également amené 17 sociétés affiliées à investir dans le marché chinois.
Cependant, lors de notre repas au restaurant japonais, M. Matsumoto a expliqué qu’à cause du sentiment anti-Japon en Chine, de nombreuses entreprises japonaises ont des doutes par rapport aux perspectives d’investissements en Chine. Il m’a donc demandé mon point de vue, en tant qu’entrepreneur chinois, sur l’avenir de la coopération commerciale sino-japonaise.
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J’ai été très optimiste et lui ai dit que les trois décennies du développement en Chine ont bénéficié de la politique d’ouverture. Dans l’avenir ce pays ne devrait pas diverger de cette stratégie.
En outre, les consommateurs sont très pragmatiques. Je l’ai rassuré qu’on ne devait pas s’inquiéter pour le marché quand ont a de bons produits. L’outrage nationaliste et le pragmatisme dans les achats ne sont pas la même chose.
De plus, ceux qui boycottent les produits étrangers et cassent les voitures dans la rue ne sont qu’une minorité, lui ai-je dit.
M.Matsumoto était d’accord avec mon analyse. Il m’a parlé de la sincérité du gouvernement japonais au sujet de l’amitié sino-japonaise et de rassurer les entreprises japonaises sur la Chine. Il m’a également parlé du projet de construction de route japonaise dans le district de Hunnan à Shenyang qui offrirait un environnement favorable aux hommes d’affaires japonais et il nous a invités à investir dans ce projet.
Peu de temps après ma rencontre avec M. Matsumoto, un jeune homme qui avait détruit une voiture à Xi’an a été condamné à la prison. Mais les entreprises japonaises sont restées sensibles, réalistes et conservatrices; cela n’a pas beaucoup aidé à créer une attitude plus optimiste.
Quelques mois plus tard, les groupes Kashima et Lixil ont décidé de se retirer du marché chinois. Le projet d’amener en Chine 17 autres entreprises japonaises s’est également évaporé.
En tant que leur partenaire commercial, nous avons essayé de trouver des solutions viables. J’ai demandé à deux reprises de m’entretenir avec les cadres supérieurs de ces sociétés pour étudier la question de l’adaptabilité des produits en Chine et résoudre les difficultés opérationnelles. Mais ils ont refusé de me recevoir. Ils ne voulaient même pas entendre mes propositions de solutions. Ils étaient déterminés à se retirer et à assumer les pertes financières et de crédibilité. Ce n’était évidemment pas une décision motivée par l’argent. Ils avaient simplement perdu confiance dans le marché chinois. Si un entrepreneur a confiance dans le marché, il va tout d’abord essayer de trouver des solutions aux problèmes au lieu de se retirer sans même écouter les solutions possibles.
Les groupes Kashima et Lixil sont partis. Bien que nous ayons pris en charge leur technologie et leur équipe, il était difficile d’obtenir les résultats qu’ils espéraient obtenir de leurs investissements de dizaines de millions. Les dizaines de voyages que notre équipe a effectués au Japon pour négocier avec ces sociétés n’ont finalement aboutis à rien. Notre rêve de construire en Chine des logements résistant aux séismes selon les normes architecturales japonaises s’est avéré difficile à réaliser à court terme.
En fin de compte ce sont les Chinois qui sont les plus grands perdants.
Je comprends les entreprises japonaises. La confiance des investisseurs est basée sur la prévisibilité. Si la demande n’est pas le facteur clé du marché d’un pays, si à sa place on trouve des facteurs d’incertitude, tels que les préférences politiques, diplomatiques et nationalistes, cela ébranlera certainement la confiance des investisseurs étrangers. Ceux qui ont des capitaux ne sont pas disposés à les risquer dans un environnement qui n’offre aucune sécurité.
Le fondement le plus important de l’économie de marché est la protection de la propriété privée. Les consommateurs en font partie et ils sont la seule source de rendement de l’investissement. L’encouragement du boycott des produits est en fait un encouragement à la contrefaçon et à la violation des droits de propriété. Si la pratique d’influencer le marché par des facteurs non économiques est considérée comme légitime et correcte, et est fréquente dans une société, cela secouera le fondement de l’économie de marché.
Bien que les manifestations antijaponaises en Chine aient été brèves, les entreprises voient ce qu’elles impliquent. C’est comme voir de la poussière dans le coin d’une pièce, on concluera tout de suite que la pièce est sale.
Ces dernières années, de nombreuses entreprises financées par des capitaux étrangers se sont retirées de la Chine. La galerie marchande d’Isedan, où M. Matsumoto m’a invité à dîner, a également fait faillite. Le taux de réussite des investissements étrangers a considérablement diminué. Bien sûr, on peut parler de nombreux facteurs. Toutefois en partageant ma propre expérience, je souhaite rappeler (à mes compatriotes chinois) tout le mal que nos actions, guidées par nos sentiments patriotiques, ont causé aux entreprises étrangères.
Je pense que les hommes politiques et les diplomates devraient recourir à la sagesse, à la patience et trouver les moyens pour résoudre les différends entre les pays. Ils ne devraient pas inciter les gens à casser des voitures étrangères, à boycotter des supermarchés ou des chaînes de restauration rapide car ceci nuit à la politique globale de l’ouverture économique et au fondement de l’économie de marché.
Version anglaise : A Chinese Entrepreneur’s Plea for Rationality
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