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Pour la population de Taïwan, la Chine ne fait que « montrer ses muscles »

mai 23, 2024 13:49, Last Updated: mai 23, 2024 13:52
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Alors que les navires de guerre et l’aviation chinoise encerclaient Taïwan jeudi, population et chaînes de télévision ne semblaient guère s’alarmer de la situation dans le détroit.

Sur la chaîne d’information TVBS, les reportages sur les exercices militaires de Pékin étaient rapidement balayés à l’antenne par des sujets tels qu’un projet d’interdiction des sirènes d’ambulance ou un scandale impliquant un restaurant et un influenceur.

Le ministère taïwanais de la Défense a « condamné fermement » ces exercices et annoncé avoir « déployé des forces maritimes, aériennes et terrestres pour défendre la liberté, la démocratie et la souveraineté » du territoire.

« Comportement militaire provocateur » de Pékin

Taïwan « défendra les valeurs de liberté et de démocratie », a affirmé son président Lai Ching-te. « Je me tiendrai sur la ligne de front avec nos frères et sœurs de l’armée pour défendre ensemble la sécurité nationale », a-t-il ajouté. Un peu plus tôt une porte-parole de la présidence taïwanaise avait déploré « le comportement militaire provocateur » de Pékin.

Les manœuvres militaires de Pékin ont débuté jeudi à 7h45 (23h45 GMT mercredi) et doivent durer jusqu’à vendredi. Elles surviennent trois jours après le discours d’investiture du président Lai Ching-te, que la Chine a perçu comme un « aveu de l’indépendance de Taïwan ». La Chine menace depuis longtemps de recourir à la force pour placer Taïwan sous son contrôle, en particulier si l’île déclare son indépendance. Et Xi Jinping a multiplié les déclarations selon lesquelles l’« unification » est « inévitable ».

« Ce qu’ils veulent au fond, c’est la réunification, ce qui signifie qu’ils veulent nous dévorer », explique un chauffeur de taxi de Taipei, qui se fait appeler Hung. Ce sexagénaire tourne en ridicule les exercices de Pékin en affirmant qu’« ils font juste de l’agitation » et « ne vont pas déclencher une guerre ». S’ils voulaient vraiment la déclencher, « ce seraient des missiles qui survoleraient » Taïwan, ajoute-t-il.

« Veuillez quitter nos eaux restreintes dès que possible »

Les précédents exercices militaires chinois d’ampleur autour de Taïwan avaient eu lieu en août 2023, une « sévère mise en garde » selon Pékin après une visite de M. Lai, alors vice-président, aux États-Unis. Pékin avait aussi lancé des manœuvres d’une envergure historique en août 2022 après la visite sur l’île de Nancy Pelosi, alors présidente de la Chambre des représentants des États-Unis.

La nouvelle série d’exercices s’est déroulée jeudi dans le détroit de Taïwan, au nord, au sud et à l’est de l’île de Taïwan, ainsi que dans les zones situées autour des îles de Kinmen, Matsu, Wuqiu et Dongyin. Ces dernières îles sont situées à proximité immédiate de la côte est chinoise.

Les garde-côtes de Pékin ont indiqué vendredi avoir renforcé leurs patrouilles dans les eaux de Kinmen, à 140 kilomètres à l’ouest de Taïwan. Entre six et onze navires chinois « encerclent » chaque jour cette îles, a précisé lundi le chef des gardes-côtes de Taïwan.

Des images diffusées par les garde-côtes taïwanais montrent des officiers ordonnant par haut-parleur aux navires chinois de quitter les lieux. « Vos mouvements affectent l’ordre et la sécurité de notre pays, veuillez faire demi-tour et quitter nos eaux restreintes dès que possible », clame l’un des officiers dans une vidéo publiée par les garde-côtes sur les réseaux sociaux. Les gardes-côtes taïwanais ont également déployé leur flotte en mer.

S’exprimant à Canberra, le général américain Stephen Sklenka a jugé la situation « inquiétante ». La télévision d’État chinoise CCTV a publié une carte montrant les neuf zones où se déroulent les exercices. La plus proche de l’île de Taïwan semble située à moins de 50 kilomètres des côtes.

« C’est le quotidien »

Pour Puang Chang, guide touristique de Kinmen, « c’est le quotidien ». « Cette situation ne me stresse pas. Je ne pense pas que (la Chine) lancerait une attaque », confie-t-il. Les touristes qui l’accompagnaient jeudi peinaient à apercevoir, à cause du brouillard, les gratte-ciel de la mégapole chinoise de Xiamen, à cinq kilomètres à vol d’oiseau.

À Taipei, Lin, une employée de bureau de 49 ans qui n’a pas souhaité donner son nom complet, ne fait aucun cas de la situation en prétendant que « les marchés financiers sont stables aujourd’hui ». La Bourse de Taïwan a terminé en légère hausse jeudi.

Les exercices militaires ne figuraient pas dans les 18 sujets les plus recherchés à Taïwan sur Google dans la journée. Candice Chen, âgée de 41 ans, explique être « davantage préoccupée » personnellement par les débats houleux au Parlement de Taïwan, que les exercices militaires chinois.

Au lendemain de l’investiture du nouveau président lundi, l’opposition a déposé des projets de loi visant à étendre les pouvoirs du Parlement, que le parti au pouvoir conteste et juge imposés sans consultation adéquate. Pour cette quadragénaire qui travaille dans le e-commerce, la Chine ne fait que « montrer ses muscles ». « Au lieu de m’inquiéter avec tout ça, je devrais simplement vivre ma vie », lâche-t-elle.

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