Plusieurs rapports officiels récemment publiés en Chine font état de la mise en place de bureaux militaires aux sein d’entreprises Ces entités paramilitaires dépendent de l’armée et du régime, et ont pour rôle d’encadrer les milices chinoises.
Une grande entreprise d’État de Shanghai, le centre économique et financier de la Chine, aurait lancé sa propre force de frappe jeudi dernier.
Selon une publication de l’armée chinoise, l’entreprise SMIG, une société de services de construction d’infrastructures et de développement immobilier gérée par le gouvernement municipal de Shanghai, a organisé une cérémonie officielle à l’occasion du lancement de son bureau militaire le 28 septembre, en présence des deux généraux de l’armée.
Le secrétaire général du PCC au sein de l’entreprise a déclaré lors de la cérémonie de lancement que SMIG « est une force clé dans la prévention des catastrophes urbaines, ainsi que dans les secours d’urgence ». Et d’affirmer que l’entreprise dispose de sept équipes spécialisées dans les interventions d’urgence, notamment l’approvisionnement en eau des villes, la lutte contre les inondations, la gestion de l’environnement aquatique et l’élimination des déchets dangereux.
Grâce à son expérience et à ses ressources, dit-il, l’entreprise espère « atteindre un développement de haute qualité dans le domaine de la construction et de la défense nationale dans cette nouvelle ère ».
Mais s’il semble s’agir officiellement d’une mesure de défense nationale, les experts de la Chine sont plus circonspects et y voient surtout une tentative de la part du PCC de prévenir les risques d’une agitation sociale massive à l’heure où l’économie et la politique nationales sont en crise.
Epoch Times a contacté SMIG mais n’a pas reçu de réponse à l’heure où nous mettons sous presse.
Ces bureaux sont affiliées aux garnisons militaires locales et aux gouvernements et supervisent les milices en temps de guerre ou en cas d’urgence, notamment.
Ce type de structure a été mis en place à tous les niveaux du gouvernement, au sein des établissements d’enseignement et des entreprises d’État après la prise de contrôle de la Chine par le régime communiste et le renforcement de son contrôle sur la milice chinoise. Originellement, la milice servait de force auxiliaire et de réserve à l’armée régulière du régime communiste et supervisait la mobilisation de la défense nationale de la Chine. Les membres de la milice sont de simples employés équipés d’armes à feu en temps de paix. Ils reçoivent un entraînement militaire régulier pour se préparer à d’éventuels combats ou au maintien de l’ordre social.
A l’époque où la Chine s’est tournée vers l’économie de marché dans les années 1980, les bureaux militaires ont peu à peu disparu de certaines structures ou entreprises affiliées au gouvernement. Elles sont réapparues ces dernières années, et interrogent quant à leur rôle dans le pays alors que l’agitation monte. Il y a cependant toujours eu des miliciens dans les organismes gouvernementaux et les entreprises d’État.
La Chine compte huit millions de miliciens, selon Defense One, une publication de renseignement militaire basée aux États-Unis.
Certaines grandes entreprises d’État chinoises et des entités affiliées au gouvernement auraient commencé à mettre en place des bureaux militaires internes dès 2021.
Selon un rapport publié en mai 2021 sur le site officiel du ministère chinois de la défense, des bureaux militaires ont été créées dans 25 entreprises d’État à Fushun, une ville préfecture de 1,8 million d’habitants située dans la province chinoise du Liaoning, dans le nord-est du pays. Le rapport indique que près de 1500 personnes au sein de ces 25 entreprises ont été recrutées pour servir dans la milice.
La milice chinoise est divisée en deux catégories : les membres du noyau dur de la milice et les membres de la milice ordinaire. Les miliciens du noyau dur jouent un rôle clé au sein de l’organisation. Ils sont généralement plus expérimentés, mieux formés et y occupent des postes de direction. Les membres ordinaires sont des travailleurs normaux en temps de paix et deviennent soldats en temps de guerre.
Le 31 août 2023, un groupe agricole de Wuhan géré par le gouvernement a créé son propre bureau militaire, selon un rapport publié sur le site web du gouvernement. La société a été créée en septembre 2020, l’année où la pandémie a éclaté à Wuhan.
Le rapport indique que huit autres entreprises d’État de Wuhan ont également mis en place leurs propres bureaux militaires depuis le début de l’année.
Plusieurs situations similaires ont été enregistrées, notamment à Nantong, une ville située sur la côte est de la province chinoise du Jiangsu, qui compte 7,7 millions d’habitants, à Huizhou, une ville de la province chinoise du Guangdong (sud), ou bien encore à Horinger, un comté de la région autonome de Mongolie intérieure dans le nord de la Chine
Les bureaux militaires face à une recrudescence des troubles sociaux selon les experts de la Chine
Les experts ne pensent pas que ces nouvelles mesures aient pour but d’anticiper une éventuelle entrée en guerre de la Chine. Il s’agirait plutôt de préparer la milice interne pour prévenir et contenir les risques d’agitation sociale en Chine.
Zhang Tianliang, un expert reconnu dans le domaine des relations sino-américaines, rappelle qu’une série de défaut de paiement s’est produite dans le secteur immobilier chinois à la suite d’Evergrande, le « premier domino ».
« Cette réaction en chaîne va forcément entraîner des mouvements de protestation, notamment de la part des propriétaires de biens immobiliers inachevés et des investisseurs dont le capital et le rendement ont été perdus », selon M. Zhang dans l’une de ses chaînes vidéo le 3 octobre dernier.
Selon lui, la dette totale des sociétés d’investissement municipales en Chine représente environ 60 à 70 % du produit intérieur brut (PIB) annuel de la Chine, soit environ 903 milliards de dollars.
« En tant que principaux émetteurs de dette en Chine, ces sociétés d’investissement sont devenues une cible privilégiée pour les investisseurs », explique-t-il dans une vidéo.
Ainsi, la mise en place de bureaux militaires dans ce type de sociétés est dans l’intérêt des sociétés elles-mêmes. Il a également déclaré que des protestations éclateraient également dans d’autres secteurs.
Les défaillances du secteur immobilier ont donné lieu à des campagnes massives de recouvrement de dettes de la part des acheteurs de logements, des investisseurs et des ouvriers du bâtiment.
Le ressentiment de la population à l’égard du PCC touche également d’autres secteurs. L’agitation sociale liée aux restrictions du Covid-19 s’est généralisée au cours des trois dernières années, avec des manifestations massives dans tout le pays pendant la pandémie, et des manifestants qui réclamaient le « départ » du PCC. Les mesures de confinement radical ont fortement impacté l’économie et le taux de chômage des jeunes.
Une vidéo publiée sur Weibo, le média social chinois de type Facebook, montre un entraînement militaire à l’université de Chuxiong, dans la province du Yunnan (sud-ouest de la Chine). Dans la vidéo, les autorités de l’école font jouer à certains étudiants le rôle des revendicateurs de salaires impayés, d’autres étudiants jouant le rôle de policiers anti-émeutes censés réprimer les manifestants qui veulent récupérer leur argent.
Lai Jianping, un ancien avocat chinois qui vit aujourd’hui aux États-Unis, pense que les troubles sociaux existent dans de nombreux autres secteurs, et pas seulement dans celui de la perception des salaires.
Il explique à NTD, le média partenaire d’Epoch Times, que cette vidéo a été postée afin de servir à la fois d’endoctrinement et d’avertissement.
« Elle [la vidéo en ligne] sert de menace, pour dire aux étudiants et au public : ‘Quelle que soit l’injustice que vous rencontrez, si vous descendez dans la rue pour protester, vous serez réprimés sans pitié, tout comme ces revendicateurs de salaires' », dit-il.
Il explique que l’ensemble du pays, y compris les établissements d’enseignement supérieur, se préparent à ce que le PCC appelle le « maintien de la stabilité sociale », démontrant, s’il le fallait, que les injustices sociales sont largement répandues en Chine.
En vertu de la loi de la République populaire de Chine sur la défense nationale (« la loi »), les forces armées chinoises se répartissent en trois grandes catégories : l’Armée populaire de libération (APL), la Police armée populaire et la Milice. La loi stipule que la milice « assume les tâches de préparation à la guerre et aux opérations de défense et contribue au maintien de l’ordre public » en Chine.
Li Jing a contribué à cet article.
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