Pour un dos en bonne forme

19 décembre 2015 14:37 Mis à jour: 15 août 2016 07:44

Selon l’agence nationale de santé publique, environ 85% de personnes souffrent du mal de dos. C’est la deuxième cause de consultation et la principale cause d’invalidité dans le monde entier.

Dans son livre intitulé Uprise : Back Pain Liberation by Tuning Your Body Guitar, le docteur Sean Wheeler, spécialiste en médecine du sport et en gestion de la douleur, précise que travailler la force et la stabilité fait toute la différence dans la récupération et la prévention.

Selon lui, les médecins ne devraient pas seulement traiter la douleur, mais aussi la faiblesse qui lui est liée.

« Nous faisons en sorte que les gens se sentent mieux sans résoudre le problème à la base, ce qui fait qu’ils reviennent quand la douleur réapparaît », écrit-il. « Soigner les symptômes de la douleur est important mais cela peut effectivement aggraver le problème à long terme. »

Renforcement des muscles

Une fois qu’il a soulagé ses patients, Sean Wheeler leur propose des exercices pour renforcer les muscles de soutien ou muscles profonds. Ces muscles sont essentiels pour maintenir une bonne stabilité.

Les muscles d’action sont conçus pour le mouvement. Ils fléchissent, s’étirent et quand nous les entraînons, ils se développent.

Les muscles de soutien sont au contraire conçus pour supporter le poids du corps, pour l’endurance, l’équilibre, le maintien et la stabilité du corps. Tout comme les muscles d’action, ils se trouvent sur tout le corps, mais sont plus difficiles à percevoir.

Des années de mauvaise posture et de tabagisme affaiblissent les muscles de soutien.

Selon le docteur Wheeler, ce sont « des muscles qui se contractent avant le mouvement. Lorsque le cerveau vous dit de taper du pied, les muscles de soutien se contractent quelques millisecondes avant ceux de la jambe ou du pied. Lorsque vous tournez la tête, ces muscles vont se contracter juste avant le mouvement. Ce n’est pas conscient, donc ils sont difficilement contrôlables ».

Des années de mauvaise posture et de tabagisme peuvent affaiblir les muscles de soutien, il peut alors être difficile de les renforcer. Les muscles d’action montrent une amélioration notable après quelques semaines d’entraînement, mais le docteur Wheeler affirme que les patients doivent travailler les muscles de soutien au moins six mois avant de voir une différence dans leur force et leur stabilité. Il s’agit d’isoler les muscles de soutien et de les exercer.

Pour tester la force musculaire de soutien, il suffit de se tenir debout, le dos dans l’alignement du ventre, légèrement rentré, les oreilles au-dessus des épaules, le poids réparti sur les deux pieds, vos muscles de soutien sont engagés. Vous pourriez être en mesure de maintenir cette bonne posture quelques minutes, voire quelques heures, mais peu d’adultes ont la force musculaire de soutien pour la maintenir toute la journée. Lorsqu’ils se fatiguent, le poids se transfère d’un pied à l’autre. Ce sont alors les muscles d’action qui prennent le relais.

Ce mode de compensation devient une habitude et la flexibilité diminue. Les muscles d’action deviennent chroniquement tendus parce qu’ils sont stimulés bien plus qu’ils ne le devraient. Pendant ce temps, les muscles de soutien s’atrophient. Nos corps peuvent supporter cela pendant des années, mais ils peuvent devenir de plus en plus vulnérables aux traumatismes.

 

Entretien avec le docteur Sean Wheeler

Dans votre livre, vous racontez l’histoire d’un joueur de football qui vous consulte. Il pense que vos exercices musculaires sont une perte de temps, parce qu’il a l’habitude d’un entraînement plus rigoureux. Vous l’amenez à les faire pendant 20 minutes et quand vous revenez dans la pièce, il vomit dans une poubelle comme un enfant de huit ans. Vous lui dites alors : « Ne vous inquiétez pas. Avec le temps, cela devient plus facile ». Pourquoi est-ce si difficile d’exercer les muscles de soutien ?

Le problème avec ces muscles est que, s’ils sont fatigués, rien ne va plus. Au lieu de nous dire : « J’ai fatigué les muscles qui me stabilisent et je ne suis plus capable d’avoir un bon maintien, je vais donc arrêter de fumer », nous commençons à compenser en exerçant d’autres muscles.

Il est difficile d’isoler ces muscles, surtout si on ne connaît pas la façon de faire. Nous voyons des gens qui souffrent depuis des années nous dire, quand on leur explique qu’il faut développer ces muscles très spécifiques, ils répondent : « Eh bien, je l’ai fait ce renforcement de base ». Oui, mais cela ne concerne que la façon de se déplacer. Je parle de la façon dont on reste immobile. Ce que vous avez perdu est votre immobilité.

Si à un certain moment de votre vie, vos muscles de soutien étaient forts et réguliers, suite à une blessure qui vous a immobilisé, vous avez perdu un peu de ce maintien.

Ces muscles d’endurance se fatiguent et s’affaiblissent plus vite que vous ne l’imaginez et cela va prendre un certain temps pour les récupérer. Vous pourriez les avoir perdus en une ou deux semaines et devrez passer six mois à essayer de les récupérer. Et si personne ne vous le montre, vous allez continuer à compenser et vous contracter.

Même si nous ne souffrons pas de maux de dos, la plupart des adultes ont une faiblesse des muscles de soutien. Est-ce notre mode de vie qui conduit à cet état ?

Nous nous asseyons trop et nous ne nous tenons pas droit. Nous nous appuyons sur une jambe. Nous fermons nos genoux. Nous faisons toutes sortes de choses qui tentent de compenser le fait que nous avons perdu une partie de cette force dans les fessiers, le fléchisseur de la hanche et de la flexibilité. Les enfants à la maternelle sont flexibles, mais au CP ils ne le sont plus.

Nous avons besoin d’une certaine méthode pour évaluer les enfants tout au long de leur enfance, car avec l’âge, nous devenons moins souple. La perte de la flexibilité amène à compenser. Alors, nous devons maintenir nos enfants sur la bonne voie pour qu’ils n’aient pas de blessure à vie.

En lisant votre livre, j’ai été plus conscient de ma posture. Le premier jour, je l’ai tenue correctement, mais par la suite, je revenais à mes anciennes habitudes. Pourquoi est-ce si difficile de se tenir debout ?

J’avais une application iPhone et tout le monde la détestait. Toutes les 10 à 20 minutes, elle m’interrogeait et j’étais censé dire si ma posture était correcte ou non.

La première étape était de rester assis bien droit. Il fallait que durant une semaine vous restiez droit pendant 80% de la journée pour passer à l’étape deux. La plupart des gens ont souffert un à deux jours, après il y a eu un déclic et c’était bon. Il leur a fallu neuf jours avant de passer à l’étape suivante.

La deuxième étape était de garder le ventre légèrement rentré. La plupart des gens ont commencé l’étape en trichant. Personne ne le faisait. Rentrer le ventre en basculant le bassin en avant est difficile, car cela implique un muscle durable.

La troisième étape consiste à aligner vos oreilles sur vos épaules. Pas une seule personne n’est arrivée à la fin de l’étape trois. La plupart des gens ont commencé à tricher parce qu’ils étaient tout simplement frustrés de ne pas réussir.

Vous avez eu beaucoup de succès avec votre méthode, comment vos collègues ont-ils réagi à vos idées ? Avez-vous rencontré de la résistance ou ont-ils adhéré ?

Les thérapeutes physiques ont rapidement adhéré. Certains médecins sont vraiment hésitants. J’ai eu une conversation sur LinkedIn avec un chercheur de retour de Suède. Il a dit : « Je ne sais pas de quoi vous parlez, il y a eu toutes sortes d’études montrant que les six semaines de renforcement ne fonctionnent pas ».

Je lui ai dit : « Six semaines ne suffisent pas. Qui va se préparer pour un marathon en six semaines ? » Il m’a répondu : « Deux études ont parlé de 12 semaines .» À cela, j’ai répliqué : « 12 semaines ! Voilà un début. Vous n’êtes pas encore tout à fait à la moitié du chemin ».

Si quelqu’un qui ne souffre pas du dos veut faire ces exercices musculaires, que doit-il faire ? Serait-il juste de voir un kinésithérapeute pour les apprendre et prendre conscience de sa posture ?

Absolument, vous savez, en écrivant ce livre, je ne voulais pas que les gens accourent à ma clinique. J’ai assez de travail. Ce devait être mon cadeau à l’humanité : « Regardez ce que vous pouvez faire, quand vous avez mal au dos, pour que cette douleur vous quitte définitivement ».

Je ne pense pas que ce soit déraisonnable de dire : « À 80 ans je serai encore très flexible. Je n’aurai pas d’arthrite, parce que l’arthrite est juste une façon qu’a le corps de stabiliser l’organisme. Pourquoi votre posture ne pourrait pas être bonne pour toujours ? Pourquoi ne pourriez-vous pas être flexible et mobile ? Vous pouvez créer des situations où vous n’aurez pas d’arthrite au genou ou à la hanche ».

Je ne mets pas trop d’exercices dans le livre parce que je pense que dans cinq ans ils seront différents. Je veux que mon travail profite à la communauté médicale et qu’elle l’améliore. J’espère que dans cinq ans, nous aurons une meilleure compréhension sur la façon de garder plus longtemps tout le monde en bonne santé, il ne s’agit pas seulement de guérir les maux de dos.

Mais les gens doivent s’impliquer. Ce n’est pas facile. Il n’y a que pour les enfants que cela peut être facile. En tant que médecin, nous vérifions si les enfants souffrent de scoliose à un certain âge. Ce devrait être semblable pour la posture. Tout n’est pas gagné, mais nous l’avons déjà fait dans d’autres domaines de la santé.

 

www.bodyguitar.com

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