ANALYSE – Les Français n’apprécient pas le nouveau président américain. C’est ce que nous enseigne une enquête d’opinion publiée la semaine dernière. Cependant, même si l’impopularité de Donald Trump au sein de l’Hexagone est incontestable, elle pourrait s’expliquer par les différences culturelles entre la France et l’Amérique.
8 Français sur 10 ont une mauvaise image de Trump
Une majorité de Français ne portent pas le 47e président des États-Unis dans leur cœur. En effet, selon un sondage de l’institut ELABE pour BFMTV du 7 novembre, ils seraient 79 % à déclarer avoir une mauvaise image de ce dernier. Par ailleurs, parmi ces 79 %, 51 % d’entre eux en ont une « très mauvaise image » et 28 % une « assez mauvaise image ».
Ce rejet semble s’inscrire dans une forme de continuité. Toujours selon ELABE, en 2016, année de la première candidature de Donald Trump à l’élection présidentielle, 83 % des Français affirmaient avoir une mauvaise image du président républicain. Quatre ans plus tard, 8 Français sur 10 souhaitaient la victoire de son adversaire démocrate Joe Biden, selon un sondage Odoxa-Dentsu Consulting réalisé pour France Info et Le Figaro.
Différentes visions de l’argent…
Si celui qui retournera officiellement dans le bureau ovale au mois de janvier n’a pas bonne presse au sein de l’Hexagone, les approches différentes de certains concepts des deux côtés de l’Atlantique pourraient en être la raison, à commencer par l’argent. « L’argent : tabou français, totem américain », écrivait le psychanalyste Jacques-Alain Miller dans un article publié dans Le Point en 2012. Et les dollars sont au cœur du parcours de Donald Trump. Le 45e et 47e président américain a, en effet, construit sa célébrité autour de son statut d’homme d’affaires new-yorkais et surtout de milliardaire. Il en a joué au point d’être la star de l’émission de téléréalité The Apprentice de 2004 à 2015.
Par ailleurs, le futur locataire de la Maison-Blanche parle d’argent très librement et en a même fait un argument de campagne quand il s’est lancé dans l’arène politique en 2015. En septembre de la même année, à l’occasion d’un sketch humoristique auquel il participait avec le célèbre animateur Jimmy Fallon, il déclarait : « Je suis vraiment riche. » Quelques mois plus tard, lors d’un débat des primaires républicaines, il se vantait de ne « pas vouloir » et de ne pas « avoir besoin » de l’argent de grands donateurs. Des propos qui ne verront probablement jamais le jour en France, tant parler d’argent n’est toujours pas bien vu. Et la politologue et sociologue Janine Mossuz-Lavau, auteure de L’argent et nous (Éditions de la Martinière, 2007) en a expliqué les causes, notamment dans une interview accordée au Figaro en 2007. Pour elle, il y en a trois : l’héritage de la culture paysanne, le catholicisme et l’influence du marxisme. « Nous avons retenu que le profit, c’est immoral », affirme-t-elle.
« L’argent est presque vu en France comme quelque chose de vulgaire, alors qu’aux États-Unis, il s’agit d’un élément important conduisant à la réussite personnelle », confie à Epoch Times Matt (le prénom a été modifié), militant républicain vivant en France depuis une vingtaine d’années. « Donald Trump incarne pour beaucoup d’Américains cette réussite ultime, et c’est, je pense, la raison pour laquelle, il a remporté la semaine dernière l’élection présidentielle pour la deuxième fois », poursuit-il.
… et du rôle de l’État
Au-delà de l’argent, le rejet de Donald Trump par les Français pourrait également s’expliquer par certaines politiques mises en avant par le républicain, notamment celle de la diminution du poids de l’État fédéral. Mardi 12 novembre, le président élu a d’ailleurs nommé les milliardaires Elon Musk et Vivek Ramaswamy à la tête d’un ministère de « l’efficacité gouvernementale ». Selon le nouveau président américain, l’idée serait de « démanteler la bureaucratie gouvernementale, sabrer les régulations excessives, couper dans les dépenses inutiles, et restructurer les agences fédérales ».
Une réforme de type libéral voire libertarien qui serait sûrement difficile à mettre en œuvre en France. Un sondage de l’IFOP réalisé en 2023 indiquait que seuls 50 % des Français déclaraient que le « libéralisme leur évoque quelque chose qu’ils aiment » contre 70 % en 1999. Par ailleurs, la même étude précise qu’une majorité relative de Français « appellent à une présence renforcée de l’État » dans l’économique et le social.
« Je pense que les Français attendent beaucoup de l’État. Nous l’avons constaté pendant la crise de la Covid. Et ils ne se reconnaissent pas dans les réformes défendues par Donald Trump de réduction de la bureaucratie, très éloignées de l’étatisme français », remarque Matt. « Ces réformes ne sont pas sans rappeler celles de Ronald Reagan dans les années 1980. N’oubliez pas qu’au moment où l’Amérique élisait Reagan, la France portait au pouvoir Mitterrand ! Tout est dit » ajoute-t-il.
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