Le premier procès en Suisse de l’islamologue suisse Tariq Ramadan s’ouvre à partir de lundi à Genève, où le parquet le poursuit pour « viol et contrainte sexuelle » dans une affaire remontant à 15 ans.
La plaignante suisse, qui dit vivre sous la menace et souhaite donc être appelée « Brigitte » (prénom d’emprunt), était âgée d’une quarantaine d’années à l’époque des faits. Elle assure que l’islamologue l’a soumise à des actes sexuels brutaux accompagnés de coups et d’insultes, le soir du 28 octobre 2008, dans une chambre d’hôtel à Genève. « J’ai rarement vu un dossier à ce point baigné dans les menaces et la peur », a déclaré à l’AFP son avocat français, François Zimeray, dont la cliente s’est constituée partie civile.
Tariq Ramadan, 60 ans, a lui reconnu l’avoir rencontré mais a affirmé au cours de l’enquête avoir renoncé à avoir une relation sexuelle avec elle. Il risque entre 2 et 10 ans de prison, et aura la possibilité de faire appel de la décision du Tribunal correctionnel de Genève, qui est composé d’un président, Yves Maurer-Cecchini, et de deux juges, Alessandra Armati et Antoine Hamdan. Contacté par l’AFP, Me Philippe Ohayon, un de ses avocats français, s’est refusé à tout commentaire. Ce procès très attendu devrait durer deux à trois jours, mais l’on ne sait pas encore à quelle date le verdict sera annoncé.
Soupçons de viol en France également
Le théologien suisse n’a jamais été condamné pour des faits similaires en France mais il y est menacé d’un procès pour des soupçons de viols commis entre 2009 et 2016 sur quatre femmes : le parquet de Paris a requis en juillet son renvoi devant les assises et il appartient aux juges d’instruction chargés des investigations d’ordonner un procès ou pas. Il est, depuis sa sortie de détention en novembre 2018 après plus de neuf mois de détention provisoire, libre sous contrôle judiciaire.
Tariq Ramadan est tenu de résider en France mais a déjà bénéficié de plusieurs autorisations exceptionnelles de sortie du territoire français pour se rendre en Suisse dans le cadre de l’affaire qui est jugée cette semaine à Genève.
Viols et contrainte sexuelle sur une plaignante suisse
Convertie à l’islam, « Brigitte » avait fait sa connaissance lors d’une séance de dédicace quelques mois avant la nuit du 28 octobre 2008, puis lors d’une conférence en septembre. S’en était suivie une correspondance de plus en plus intime sur des réseaux sociaux. Le soir des faits, elle l’a rejoint dans l’hôtel où il séjournait à Genève. Ils sont ensuite montés dans la chambre de l’islamologue pour y remonter un fer et une planche à repasser. C’est alors que, durant des heures, il l’aurait contrainte à des actes sexuels, avec violence.
« Pour elle, un devoir autant qu’une épreuve »
Selon l’acte d’accusation, il s’est rendu coupable de « viol à trois reprises » durant la même nuit et de « contrainte sexuelle », au point de l’étouffer. « Ce procès pour ma cliente est une épreuve et non une thérapie. Elle en attend la reconnaissance de souffrances qui l’ont accompagnées pendant 15 ans et qu’elle s’est faite un devoir douloureux de révéler », a indiqué Me Zimeray à l’AFP. « Elle s’attend à une confrontation difficile, douloureuse mais elle y est prête, convaincue que ce combat est pour elle un devoir autant qu’une épreuve », a-t-il ajouté.
Elle a porté plainte devant la justice genevoise en avril 2018, quelques mois après que les médias suisses aient publié des témoignages anonymes d’anciennes élèves de collèges genevois, selon lesquelles dans les années 90 Tariq Ramadan aurait tenté de séduire l’une d’elles et serait parvenu à entretenir des relations sexuelles avec trois autres.
Le délai de prescription pour le crime de viol est de 15 ans et il échoit donc en fin d’année.
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