L’influent sénateur nigérian Ike Ekweremadu, reconnu coupable à Londres d’avoir voulu prélever le rein d’un jeune homme pour le faire greffer à sa fille, connaîtra vendredi sa peine à l’issue du premier procès de ce genre au Royaume-Uni.
L’élu de 60 ans, son épouse Beatrice et un médecin ayant servi d’intermédiaire ont été reconnus coupables en mars d’avoir organisé le voyage au Royaume-Uni de leur victime, un vendeur de rue de 21 ans originaire de Lagos, pour lui prélever son rein. Ils ont tous les trois été condamnés en vertu de la loi britannique sur l’esclavage moderne, utilisée pour la première fois dans une affaire de prélèvement d’organes. Ils risquent la prison à vie. La fille du couple, Sonia, 25 ans, a elle été innocentée.
L’affaire est très suivie au Nigeria, où – comme l’avait rappelé l’accusation au début du procès – la famille Ekweremadu dispose de « pouvoir et d’influence ». Ancien vice-président du Sénat, M. Ekweremadu est toujours officiellement membre du Parlement, le nouveau Sénat élu en début d’année n’ayant pas encore pris ses fonctions.
Contrairement au couple Ekweremadu, la victime est un jeune homme défavorisé, vendeur de rue à Lagos. On lui avait promis selon l’accusation jusqu’à 7000 livres sterling (7800 euros), assortis de la promesse de travailler et rester au Royaume-Uni. Durant le procès, le jeune homme avait raconté qu’il pensait qu’on l’avait fait venir au Royaume-Uni pour travailler. Il avait affirmé ne s’être rendu compte qu’une fois face aux médecins britanniques qu’il s’agissait d’une transplantation d’organe.
Une décision « importante » et le courage d’avoir dénoncé les faits
Le rein devait être greffé à Sonia et la famille Ekweremadu avait demandé à la victime de se faire passer pour le cousin de la jeune femme. Au Royaume-Uni, il est légal de donner un rein de manière altruiste, pour un proche notamment, mais illégal de le faire pour une « récompense » financière ou matérielle. Après avoir compris le vrai motif de sa venue en Angleterre, la victime s’était rendue en mai 2022 à la police « à la recherche de quelqu’un pour (lui) sauver la vie ». L’opération n’a pas eu lieu et le couple Ekweremadu avait été arrêté à l’aéroport d’Heathrow à Londres en juin.
Élu d’une circonscription du sud-est du Nigeria pour le Parti démocratique du peuple (opposition), Ike Ekweremadu n’avait pas pu se présenter aux récentes élections car il était en détention provisoire, l’accusation ayant mis en avant les risques de fuite.
Dans un communiqué publié par la police après la déclaration de culpabilité, la procureure Joanne Jakymec avait fustigé le « mépris total des prévenus envers le bien-être et la santé de la victime », l’utilisation de leur « influence considérable » pour tenter d’arriver à leurs fins face à une victime qui n’avait qu’une « compréhension limitée de ce qui se passait en réalité ». Esther Richardson, de l’unité de la police londonienne de lutte contre l’esclavage moderne, avait elle salué une décision « importante » et le courage de la victime d’avoir dénoncé les faits.
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