« Propager des rumeurs » sur l’internet chinois vous fera gagner un aller simple pour la prison

11 novembre 2015 17:33 Mis à jour: 11 novembre 2015 21:06

Selon une nouvelle loi chinoise promulguée le 1er novembre dernier, les internautes chinois reconnus coupables de « répandre des rumeurs » ou de faire circuler des « informations fabriquées » en ligne risquent une peine de prison pouvant aller de trois à sept ans.

Le neuvième amendement du droit pénal chinois a été adopté le 29 août 2015 lors de la 16e session du Comité permanent de l’Assemblée nationale populaire.

Selon le Quotidien du Peuple, géré par l’État, ceux qui publient de fausses alarmes sur les catastrophes naturelles, les avis de police, ou propagent délibérément des rumeurs sur Internet, encourront jusqu’à trois ans de prison si leur action a « perturbé l’ordre public ». Quant aux auteurs de rumeurs ayant conduits à des « conséquences graves », ils pourront être mis derrière les barreaux pour un terme allant entre trois et sept ans.

Une première loi de 2013 condamnait déjà certains types de comportement en ligne. Celle-ci comprenait 10 articles et était plutôt évasive sur son application ; il était seulement précisé que la «  fabrication des faits pour calomnier autrui » et « les violations graves » seraient punis. De quoi laisser libres les autorités d’interpréter ce qui est ou n’est pas une infraction à leurs yeux. Une chose demeure certaine : si un contenu, indésirable de leur point de vue, a été vu par plus de 5 000 internautes ou retweeté plus de 500 fois, l’auteur des propos sera poursuivi.

Outils de répression

Les militants des droits de l’homme soulignent que ces nouvelles réglementations renforcent les mesures permettant au Parti communiste chinois de restreindre la liberté d’expression et les droits de l’homme au nom du « maintien de la stabilité » et de « l’harmonie sociale ». De forts doutes subsistent sur le fait que cette nouvelle loi soit appliquée de manière universelle et équitable.

Suivant les nouvelles règlementations de l’Internet chinois, les autorités devraient elles-mêmes se retrouver derrière les barreaux.

Ou Biaofeng, militant de droit de l’homme de la province du Hunan, a confié à Voice of America que de nombreuses rumeurs circulant sur le net chinois proviennent en fait de l’absence de liberté d’expression et d’information en Chine. Il craint que le nouveau règlement soit utilisé contre les militants, les dissidents et les commentateurs d’informations.

Ou Biaofeng affirme que « l’intention est de réprimer les défenseurs des droits de l’homme et les dissidents. Les autorités ne tolèrent pas la critique. C’est une nouvelle répression de la liberté d’expression au nom de la loi et dans l’intention de créer un climat général de peur dans la société ».

Wu Bin, un autre militant des droits de l’homme, remet en question les critères de distinguer une vraie information d’une fausse, ainsi que la façon de déterminer qui est vraiment coupable ou simplement victime de messages trompeurs.

« Ils établissent les critères de manière à pouvoir être très flexible dans leur manipulation », a-t-il déclaré à Voice of America. « S’ils veulent vous attraper, ils diront que vous l’avez su et vous l’avez répandu. Pour les dissidents comme nous, pour ceux qui critiquent le gouvernement, ils feront tout leur possible pour monter un coup contre nous ».

Les internautes ont également critiqué l’évidente contradiction avec les falsifications propagées à longueur de temps par les médias d’État chinois. Ces derniers ont pour habitude de manipuler les données économiques, le nombre de victimes lors d’accidents ou de catastrophes naturelles -présentés au milieu d’autres informations embellies ou agréables. Suivant les nouvelles règlementations de l’Internet chinois, les autorités devraient elles mêmes se retrouver derrière les barreaux.

Wu Bin trouve que le régime doit montrer lui-même l’exemple avant d’imposer ses exigences au peuple chinois. Il soupçonne de voir les nouvelles mesures s’appliquer aux soi-disant internautes « à 50 cents du Parti » – des internautes payés par le régime pour poster des messages en faveur de la politique du régime ou pour faire taire les voix des dissidents.

 

Version anglaise : It’s Official: ‘Spreading Rumors’ Online in China Will Get You in Jail

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