La prestigieuse université Columbia à New York, épicentre du mouvement pro-palestinien contre la guerre à Gaza sur les campus américains, a menacé mardi de renvoyer les dizaines de personnes qui occupent un bâtiment de l’établissement, totalement bouclé par la police.
La colère étudiante américaine se propage depuis deux semaines des grandes universités de la côte Est à celles de Californie en passant par le sud et le centre, rappelant les manifestations contre la guerre du Vietnam à la fin des années 1960.
Columbia et ses 37.000 étudiants est aussi au coeur du mouvement contre la guerre d’Israël contre le Hamas dans la bande de Gaza. Mardi soir, le campus aéré et d’habitude ouvert aux passants du nord de Manhattan est entièrement bouclé, et des policiers érigent des barrières avant une possible intervention, selon une journaliste de l’AFP. Quelques dizaines de protestataires sont barricadés depuis la nuit dernière dans un bâtiment, Hamilton Hall, que d’autres ont protégé grâce à une chaîne humaine, masques sanitaires sur le visage et keffiehs sur la tête.
« Vandaliser, casser et bloquer les accès »
Dénonçant une « escalade », le porte-parole de Columbia Ben Chang a menacé de les « renvoyer » de l’université en les accusant de « vandaliser, casser et bloquer les accès » du Hamilton Hall. Le bâtiment a été renommé « Hind’s Hall » par le groupe pro-palestinien « Columbia University Apartheid Divest », en hommage à une fillette de six ans tuée à Gaza.
« Nous ne partirons pas », a proclamé ce groupe, certains militants campant aussi sur une pelouse du campus. La présidence de Columbia avait commencé lundi à « suspendre » administrativement des étudiants qui refusaient de quitter ce « village » de tentes.
À six mois de la présidentielle dans un pays polarisé, le mouvement estudiantin inquiète la Maison Blanche, et aussi l’ONU.
Joe Biden, président du pays allié « indéfectible » d’Israël, a critiqué les tensions ravivées à Columbia, université privée qui forme l’élite : « Occuper par la force un bâtiment universitaire est la mauvaise approche » et ne représente « pas un exemple de manifestation pacifique », a tonné John Kirby, porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche.
Aux Nations unies, le secrétaire général Antonio Guterres a jugé « essentiel en toutes circonstances de garantir les libertés d’expression et de manifestation pacifique » tout en insistant sur le fait que « les discours racistes étaient évidemment inacceptables ».
Avant un duel entre l’ex-président Donald Trump et le sortant Joe Biden, qui a besoin du vote de la jeunesse, le chef républicain de la Chambre des représentants Mike Johnson a dénoncé « l’illégalité et le chaos absolus sur les campus en Amérique », ainsi que « l’antisémitisme et l’échec dans la protection d’étudiants juifs ». Il a réclamé le départ de la présidente de Columbia, Minouche Shafik.
L’université de Columbia refuse tandis que Brown University capitule
Les manifestants pro-palestiniens exigent que leurs universités coupent les ponts avec des mécènes ou entreprises liés à Israël. Columbia refuse.
Mais un autre campus d’élite du nord-est, Brown University à Providence dans le Rhode Island, a annoncé un accord avec les étudiants : démantèlement du campement contre un vote de l’université en octobre sur d’éventuels « désinvestissements de ‘‘sociétés qui rendent possible et profitent du génocide à Gaza’’ ».
L’étudiant Leo Corzo-Clark a sauté de joie pour cette « énorme victoire pour ce mouvement international et le peuple de Palestine ».
À travers les États-Unis, les images de forces de l’ordre en tenue anti-émeute intervenant brutalement sur des campus ont fait le tour du monde.
BREAKING: 🇺🇲Mass chaos breaks out at college campuses across the United States as pro-Palestine protests intensify.
Protesters are crowding Columbia, Harvard, USC, University of Texas at Austin, and more.
At USC, police are using their batons because the protesters are becoming… pic.twitter.com/yqA1s6YK3g
— Megatron (@Megatron_ron) April 24, 2024
Depuis le week-end dernier, des centaines d’étudiants, enseignants, militants d’une vingtaine d’universités ont été interpellés, certains arrêtés en placées en détention.
À l’université du Texas à Austin (sud), près de 80 personnes étaient en garde à vue mardi et seront poursuivies en justice pour « délit d’intrusion », selon le bureau du shérif local.
En Californie, la police « a fait évacuer et sécurisé » à l’aube deux bâtiments de l’université Cal Poly Humboldt et arrêté 35 personnes, afin de « rétablir l’ordre » selon cet établissement.
À l’Université de Caroline du Nord à Chapel Hill, un groupe d’étudiants a revendiqué avoir hissé un drapeau palestinien au centre du campus, avant que la police ne remette en place les couleurs des Etats-Unis, selon la presse.
Les États-Unis, où se déroulent ces manifestations pro-palestiniennes, comptent le plus grand nombre de juifs dans le monde après Israël, et des millions d’Américains arabo-musulmans.
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