Qu’est-ce que la pensée libertarienne et comment est-elle née ?

Par Julian Herrero
9 décembre 2024 18:45 Mis à jour: 9 décembre 2024 19:23

DÉCRYPTAGE – Le libertarianisme, peu répandu dans l’Hexagone, est surtout connu pour être un courant de pensée populaire aux États-Unis, où il est notamment porté par un parti politique. Cependant, il semblerait que ses origines soient plus complexes et qu’il doive aussi son existence à des intellectuels européens.

Un courant très développé outre-Atlantique

La pensée libertarienne, que l’on pourrait définir comme une philosophie politico-économique prônant ardemment la liberté individuelle et la réduction drastique du rôle de l’État, évoque assez rapidement l’Amérique. C’est en effet au pays de l’Oncle Sam que ce courant est le plus florissant.

Des intellectuels l’ont travaillé et développé, notamment Murray Rothbard qui publiait en 1973 : Renouer avec la liberté : Le manifeste libertarien ; ainsi que le célèbre économiste libéral, Milton Friedman. D’ailleurs, son fils, David Friedman est aussi un penseur clé de l’univers libertarien américain. Il publiait dans les années 1970 un ouvrage au titre plus qu’explicite : Vers une société sans État.

Mais de l’autre côté de l’Atlantique, cette philosophie est également incarnée et présente sur la scène politique. En 1971, le Parti libertarien voit le jour. Parmi ses figures majeures, on peut compter l’ancien représentant du Texas et triple candidat à l’élection présidentielle, Ron Paul. Bien que le parti n’ait jamais réalisé de scores très importants, il a quand même su s’imposer comme la troisième force politique du pays derrière les mastodontes démocrates et républicains.

Le mouvement a aussi créé la surprise lors de l’élection présidentielle de 2016 : le candidat du parti de l’époque, Gary Johnson avait réussi à convaincre plus de 4 millions d’électeurs (3,28 %). En termes de prises de position, le parti libertarien en surprendrait plus d’un en France. Par exemple, Chase Oliver, candidat libertarien à l’élection présidentielle de 2024, est un farouche partisan du port d’armes et du libre marché, tout en étant un défenseur de l’avortement et un opposant à la peine de mort.

Des racines européennes

Mais si le courant libertarien semble, à première vue, être seulement un phénomène américain, la réalité est différente, car ses origines remontent à l’Europe du XIXe siècle.

« Sa conceptualisation, contrairement à la croyance populaire, n’est pas née en Amérique, mais en Europe de l’Ouest », rappelle John Tomasi, professeur associé de sciences politiques à l’université de Brown dans un entretien à la revue Le Grand Continent en novembre 2023. « Herbert Spencer en Angleterre, Frédéric Bastiat en France et Gustave de Molinari, un Belge qui a surtout travaillé en France […] ont développé et radicalisé les principes du libéralisme classique tels qu’ils étaient défendus par Adam Smith et John Locke », ajoute-t-il.

Ces penseurs, sans jamais avoir utilisé le terme libertarien, ont posé les bases du courant que nous connaissons aujourd’hui. Frédéric Bastiat, par exemple, est connu pour ses écrits dans lesquels ils s’opposent farouchement à l’interventionnisme étatique. Dans L’État, essai publié en 1848, il écrit ce qui deviendra plus tard une citation célèbre : « L’État, c’est la grande fiction par laquelle tout le monde s’efforce de vivre aux dépens de tout le monde. »

Même chose du côté de l’anglais Herbert Spencer, qui prônait une réduction du rôle de l’État à ses fonctions minimales, c’est-à-dire la protection des libertés individuelles et le maintien de la sécurité intérieure et extérieure.

Qui l’incarne aujourd’hui ?

De nos jours, le chef d’État argentin, Javier Milei, est sans doute la personnalité qui incarne le mieux le libertarianisme dans le monde.

Ce dernier s’en revendique et s’est inspiré des intellectuels qui l’ont façonné, notamment Murray Rothbard. Il se définit même comme un « anarcho-capitaliste », concept clé de la pensée de l’économiste américain. Sa vision de la liberté a aussi confirmé son ancrage dans cette idée politique. « Le seul moyen de sortir de la pauvreté est d’avoir plus de liberté », déclarait-il lors de son premier discours en tant que président en décembre 2023.

Aux États-Unis, Elon Musk fait aujourd’hui partie des personnalités politiques américaines de premier rang qui se rapprochent le plus de cette idée politique. Il ne s’en réclame pas, mais est souvent décrit comme un libertarien outre-Atlantique. D’ailleurs, en tant que ministre de l’Efficacité gouvernementale de Donald Trump, en binôme avec Vivek Ramaswamy, le fondateur de Space X sera amené à mettre en œuvre une politique qu’aucun libertarien ne remettrait en cause, à savoir « démanteler la bureaucratie gouvernementale ».

En France, personne au sein de la classe politique ne semble clairement l’incarner et s’en revendiquer. Cependant, les plus libéraux s’en rapprochent, à l’instar du président de l’UDR Éric Ciotti, qui a d’ailleurs écrit le 9 décembre sur le réseau social X que « les recettes du président Milei fonctionnent » et qu’il « faut même la même tronçonneuse en France ».

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